La mauvaise surprise de la baisse des rentrées fiscales, alors que le déficit budgétaire dérape

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Par Charles Sannat Modifié le 10 juin 2013 à 13h49

Il y a deux grandes informations à retenir de ce week-end qui, pour la première fois, a vu des températures presque de saison, avec des rayons de soleil disparu depuis longtemps.

Il faut dire que Rain Man (le président de la République Normal 1er dit « le Juste ») est au Japon, où ils n'avaient pas vue autant de pluie depuis longtemps. Il faut dire que là-bas, c'est la sécheresse... Et personne pour dire aux Japonais qu'en France, on n'a peut-être pas de pétrole (mais beaucoup de gaz de schiste) mais on sait faire pleuvoir depuis 1 an avec une facilité déconcertante.

Bref, Hollande est au Japon où il découvre les miracles de la politique monétaire japonaise. Moi qui pense que l'euro est voué à l'échec, il n'en demeure pas moins que si Normal le Juste avait sa propre planche à billets, il est fort à parier qu'il ferait aussi bien que le Japon... voire pire !

La deuxième information, c'est notre déficit budgétaire... qui s'aggrave. Au mois d'avril, nous étions déjà à plus de 66 milliards d'euros de nouvelles dettes ! Or de janvier à avril, cela ne fait que 4 mois alors qu'une année en compte, me semble-t-il d'après mes toutes dernières informations, au moins 12 !

C'est un peu plus compliqué que ça mais si nous continuons sur la même trajectoire (concept cher aux yeux de nos mamamouchis), nous terminerions l'année avec un découvert de 66 que multiplie 3 soit, d'après ma fidèle calculatrice, ... 198 milliards d'euros, le budget de notre État étant d'environ 380 milliards d'euros soit un bon 50 %...

Oui je vous rappelle que l'on comptabilise notre déficit par rapport au PIB qui n'a rien à voir avec le schmilblick. Un peu comme si en tant que salarié de la société Total vous expliquiez à votre banquier que votre découvert à la banque n'est « QUE » de 0,0001 % du chiffre d'affaires de Total... peu importe que ce découvert représente 50 % de votre salaire... ce que votre banquier, dans sa grande sagacité, ne manquera pas de vous rappeler.

Bref, on ne pouvait pas savoir, il était impossible de l'imaginer, l'envisager n'était point pensable mais figurez-vous que, contre toute attente, de façon inattendue, le déficit va être pire que prévu... et ce qui se passe est incroyable ! Figurez-vous que, alors que l'on augmente les « zimpôts », les rentrées fiscales baissent !

Je pense que c'est à cause de la grande évasion fiscale... sans doute le syndrome Cas-Huzac ! À moins que la récession n'entraîne une chute mécanique des rentrées fiscales... ce que l'on sait très bien depuis des années mais que personne ne veut entendre.

Ce qui se passe est une évidence !
Inutile d'invoquer l'histoire économique, les théories, les grands penseurs, ou les plus grands génies, il suffit juste d'avoir observé au moins 5 minutes ce qui s'est passé en Grèce, en Espagne, en Angleterre, en Italie, à Chypre, en Argentine, et dans tous les pays du monde qui ont mis en place des politiques d'austérité.

L'augmentation des « zimpôts » entraîne une baisse proportionnellement d'ailleurs un peu plus forte (les ménages prenant une marge de précaution supplémentaire) de la consommation. Cette baisse de la consommation impacte directement les rentrées de TVA ! Or les « zimpôts zindirects » rapportent beaucoup plus que les zimpôts directs comme l'impôt sur le revenu.

Cette observation empirique débouche sur l'inévitable « trop d'impôts tue l'impôt » ! En réalité, ce n'est pas que trop d'impôts tue l'impôt... c'est tout simplement que les ménages ont un budget. Ils ont un disponible de dépenses et ce disponible de dépenses est fini. Si on augmente le poste impôts des ménages, il faut que ces derniers réduisent leur poste dépenses. Comme ils sont nettement moins crétins que nos États surendettés (et aussi parce que personne ne leur prêterait autant), ils coupent dans le superflu.

Comme ils anticipent que les tours de vis vont se succéder, ils coupent plus dans leur dépense et prennent une marge de précaution qui entraîne une baisse importante des rentrées fiscales et de l'activité économique. Le cercle vicieux de la récession se referme. Les « zimpôts » continuent à augmenter et les rentrées fiscales à diminuer, et les dépenses restent constantes et parfois même augmentent... Résultat : avec une politique d'austérité, le pays qui la mène se rapproche encore plus vite de l'insolvabilité, c'est-à-dire de la faillite généralisée.

C'est ce qui s'est passé en Grèce, où les dettes augmentent chaque année en pourcentage du PIB alors que tout le reste diminue. C'est ce même processus qui est partout à l'œuvre dans les pays d'Europe du Sud et maintenant en France.

Les recettes fiscales rentrent mal, le déficit de l'État se creuse
C'est le titre d'un article du Figaro, fort gentil soit dit en passant.

Le Figaro, journal « d'opposition » qui cherche des excuses au gouvernement, nous explique donc que « cet écart a des explications techniques, que Bercy prend bien soin de rappeler : il tient d'abord à la perception début 2012 de 2,6 milliards d'euros de recettes liées à l'attribution des licences de téléphonie mobile 4G, perception qui, par définition, ne se reproduira pas en 2014 ; à l'augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) pour un montant de 1,6 milliard, ensuite ; à la dotation de 3,3 milliards au Mécanisme européen de stabilité (MES), enfin ».

Je trouve étonnant d'essayer de nous faire gober de telles âneries. Reprenons point par point histoire de ne pas succomber à l'intoxication gouvernementale.

1/ Il est évident que l'on ne peut pas considérer l'absence de « produits exceptionnels » comme un élément technique justifiant un dérapage des finances publiques. Un produit exceptionnel c'est la vente par exemple des fréquences de téléphonie mobile, qui par définition ne se vendent qu'une seule fois. S'étonner l'année suivante du trou provoqué par l'absence de cette rentrée fiscale non récurrente relève de l'escroquerie intellectuelle.

2/ Il a fallu augmenter le capital de la BEI. Certes et alors ? Il s'agit là en revanche d'une dépense qui sera récurrente ou presque car si on ne renforce pas le capital de la BEI, il faudra bien renforcer le capital de DEXIA. Si ce n'est pas DEXIA, on trouvera bien une entreprise en difficulté comme par exemple je ne sais pas moi, au hasard allez... PSA par exemple, qu'il faudra aider pour éviter un carnage sur l'emploi. Puis si ce n'est pas pour eux, on trouvera bien comment dépenser nos sous !

3/ C'est la même logique pour la dotation de la France au MES qui est le machin européen pour aider à sauver des pays condamnés ! Ça ne marchera pas mais cela va nous coûter bonbon et tous les ans, et en plus de plus en plus cher ! Donc on peut même prévoir une augmentation de ces sommes, sans oublier qu'au total, l'engagement de la France dans le MES c'est 180 milliards d'euros à trouver... quelle brillante idée que ce machin européen stupide dès sa création !

On le savait, on le sait, et on le paiera... c'est une évidence... encore une fois que personne ne veut voir. La France n'a pas les moyens de participer financièrement au MES. C'est aussi simple que ça. C'est aussi le cas pour l'Espagne qui doit verser au MES 80 milliards d'euros qu'elle n'a pas et qu'elle doit emprunter sur les marchés à 5 %... pour se les faire reprêter ensuite par le MES à 3 % (l'Espagne paie donc deux fois sur les mêmes sommes)... Aberrant, mais tout le monde est très fier de cette invention digne d'Ubu... Cela ne choque personne à part, semble-t-il, notre petite communauté qui hésite entre rire jaune et écœurement total face à autant de bêtise.

Enfin, comme nous l'explique le Figaro, journal d'opposition consentant... « au-delà de ces éléments au caractère exceptionnel, la détérioration tient également à la «faiblesse des rentrées fiscales», soulignent les services de Bernard Cazeneuve. Un élément plus inquiétant parce que structurel. La mauvaise conjoncture économique du début de l'année a ralenti les rentrées fiscales. Dans le détail, les rentrées d'impôt sur le revenu sont les seules à progresser sur un an : +11 %. À l'inverse celles de TVA, qui représentent la moitié des recettes de l'État, reculent de 2,3 % – en lien avec le net ralentissement de la consommation des ménages –, celles de l'impôt sur les sociétés de 5,8 % et la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, de 6,1 % ».

Hormis l'impôt sur le revenu que le gouvernement vient d'augmenter, et cela fonctionne jusqu'à ce que nous perdions tous ou presque notre travail, pour tout le reste les rentrées fiscales s'effondrent...

Pourtant, l'austérité en France reste très, très mesurée. À tel point d'ailleurs que de plus en plus de gens s'élèvent et nomment cette politique la « Faustérité » c'est-à-dire la fausse austérité, ce qui n'est pas tout à fait faux quand on regarde... l'augmentation des dépenses publiques !!

On peut donc prévoir, sans trop se tromper, que l'on nous expliquera à la fin de l'année que nous ne tenons pas nos prévisions, encore moins nos objectifs, mais on ne pouvait pas savoir et que tout va s'arranger au second semestre de l'année prochaine (2014).

Hollande et l'empereur Akihito causent météo
Ça c'est le titre d'un article somptueux de Libération... journal de la majorité et parfaitement dans son rôle de cirage de pompes. Bon là, sur ce coup, ils en font un peu trop. Je vous laisse le lire et je ne vous en dit pas plus, mais ceux qui veulent bien rigoler (je rappelle que pour être heureux, sain et équilibré il faut se « marrer » 20 minutes par jour), pour prendre votre dose quotidienne, allez donc jeter un œil sur ce papier. C'est grandiose, de la communication digne des temps immémoriaux de l'ORTF. Hollande qui parle littérature japonaise, Hollande qui fait pleuvoir, Hollande le Président de Crise, sans oublier la cérémonie du thé. Tout y est.

Enfin, le ridicule ne tue pas, mais comme le rajoutait ma grand-mère avec son bon sens habituel, « peut-être qu'il ne tue pas... mais ça fait mal quand même »... Sinon, je ne sais pas pour vous, mais moi je suis surpris par la baisse surprise des rentrées fiscales!

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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