Les Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens ne peuvent que se réjouir des intentions et du contenu du rapport Combrexelle « la négociation collective, le travail et l’emploi ».
Aujourd’hui, comme le rappelle ce rapport « la très grande majorité des acteurs sociaux sont convaincus de la nécessité de la réforme ». Le modèle social que nous quittons pouvait fonctionner parce que, comme le dit André Bergeron, il y avait « du grain à moudre ». Aujourd’hui, le grain se faisant plus rare, il est nécessaire d’adapter le droit du travail et le dialogue social à un contexte moins faste.
Pour s’adapter et se développer, les entreprises ont besoin de plus souplesse. Tout l’opposé du droit du travail français champion du monde toute catégorie de la lourdeur et de la complexité.
Le dialogue social pourrait relancer une dynamique, mais il est aujourd’hui en panne. Il est trop souvent subi par les entreprises comme des « obligations à satisfaire ». Il l’est aussi par les syndicats affaibli par le manque de représentativité et par la difficulté à recruter et à former des cadres de qualité. Le risque « de divergence entre les accords collectifs » et la diversité des attentes des salariés croît, notamment quand les jeunes générations sont concernées.
L’une des grandes qualités du rapport est de pousser, sans le nommer, dans le sens du principe de subsidiarité.
La subsidiarité, pilier de la Pensée Sociale Chrétienne, guide au quotidien les Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens.
En disant qu’il faut « donner la responsabilité au plus petit niveau compétent pour résoudre le problème », le principe de subsidiarité, qui vient de subsidium : aide, « protège les personnes des abus des instances sociales supérieures et incite ces dernières à aider les individus et les corps intermédiaires à développer leur fonction ». Il invite les instances supérieures à leur venir en aide autant mais pas plus que nécessaire.
Pour la Pensée Sociale Chrétienne, c’est une condition de la dignité de toutes personnes invitées à exercer leur responsabilité au service du bien commun. C’est aussi une source d’efficacité. En responsabilisant les acteurs, en leur donnant les moyens d’agir, elle mobilise davantage les énergies et donne aux organisations une plus grande flexibilité.
Ainsi, comment ne pas être d’accord avec la très subsidiaire proposition 26 du rapport prévoyant la mise en place rapide « d’une nouvelle architecture du code de travail faisant le partage entre les dispositions impératives, le renvoi à la négociation collective et les dispositions supplétives en l’absence d’accord » ?
Mais, la mise en place de la subsidiarité est exigeante
L’évolution du cadre légal du dialogue social ne changera rien si, ceux qui en ont la charge, n’adaptent pas leurs propres attitudes. Le rapport fait appel à « la capacité de sursaut de l’ensemble des partenaires… ». C’est bien de cela dont il s’agit. Au niveau national, au niveau des branches mais aussi dans chacune de nos entreprises. Là est le vrai et peut-être l’unique défi à relever car, à la différence d’autres pays européens, la culture politique de la France n’est pas subsidiaire. En associant le terrain aux décisions et en le responsabilisant vraiment, le rapport ouvre la voie à une vraie transformation de nos fonctionnements et de nos habitudes.
En premier, la subsidiarité nécessite des relations de confiance. Le rapport nous invite à nous inspirer des entreprises et des branches qui ont su « sans méconnaitre les positions des uns et des autres instaurer un climat de confiance permettant de construire et d’innover ». Cette confiance, souligne Jean-Denis Combrexelle, nécessite de la loyauté dans le déroulement des négociations et dans la mise en œuvre des accords.
Ensuite, il s’agit de sortir de ces rapports dialectiques qui ont trop construit les rapports sociaux sur la conviction qu’ils ne pouvaient être qu’en opposition. L’enjeu d’un nouveau dialogue social est de construire un destin commun et donc de partager des enjeux et des modes de fonctionnement commun.
Cela demande notamment une réforme en profondeur du comportement des organisations professionnelles et de l’Etat. Il s’agit pour eux d’être en subsidiarité c’est-à-dire en posture d’aide des niveaux inférieurs de leur organisation. C’est-à-dire tout faire pour que les négociations aient bien lieu au niveau des entreprises. Cela implique de résister à la tentation de faire masse et de jouer des jeux médiatiques et institutionnels.
Il s’agit, comme l’indique le rapport, de former les personnes en charge des négociations mais aussi de les inciter à construire ces négociations. Mais cela va plus loin ! Il sera impossible de bouger si les autres organisations ne fonctionnent pas elles-mêmes en subsidiarité. En particulier si l’Etat n’entre pas dans un fonctionnement subsidiaire, dans un rôle d’aide et pas seulement de contrôle. Jean-Denis Combrexelle suggère de donner une valeur constitutionnelle à ces réformes et nous en sommes d’accord. Nous venons de publier un « cahier des EDC » sur le principe de subsidiarité et sa mise en oeuvre dans l’entreprise ; nous sommes convaincus que la seule inscription législative ne changera rien, si elle ne s’accompagne pas d’une évolution des cultures et des comportements. Sans plus attendre, inscrivons le principe de subsidiarité dans notre Constitution afin de créer les conditions d’un dialogue social efficace pour toutes les parties prenantes de l’entreprise. D’autres pays européens l’ont fait, pourquoi pas la France ?!