Accord de libre-échange : avec la Chine ou avec les Etats-Unis ?

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Par Jean-Paul Betbèze Modifié le 17 juin 2013 à 5h08

Avec les deux, avec tous, mais en étant plus et mieux préparés, autrement dit plus forts et plus unis ! On le sait, la concurrence est le nerf de la guerre économique, mais à condition d'être normée entre entreprises, secteurs, pays, régions. On comprend alors que les enjeux ne cessent de monter, avec les risques de toutes ces opérations, risques de rapport de force notamment qui peuvent déséquilibrer des activités et des régions, avec les risques sociaux et politiques qui vont avec.

L'organisation mondiale du commerce est bloquée depuis que tous les "grands" y ont adhéré

Le « libre échange » se répand dans le monde, selon deux voies : la voie globale, embouteillée, la voie inter-régionale, qui paraît plus souple. La voie globale est en effet celle de l'OMC (organisation mondiale du commerce), avec de très longues discussions où il s'agit d'avancer par activité - en développant des règles valables pour tous. On imagine la complexité et la lenteur du processus, sachant que l'OMC comporte une instance de gestion des conflits à l'amiable, mais aussi de sanction. C'est même la seule de son espèce auprès de laquelle les Etats-Unis ont accepté d'aliéner leur indépendance.

Sans que ce soit la seule raison de ses difficultés, il semble bien que l'OMC est bloquée. L'organisation internationale n'est plus portée par les forces de la grande croissance qui avaient expliqué sa naissance, au temps où la Chine et la Russie frappaient longtemps à sa porte. Maintenant, tous les grands sont dedans. Maintenant tout est terriblement plus compliqué dans la voie globale.

D'où la faveur des accords régionaux, « relativement » plus simples car taillés aux mesures des partenaires, mais qui éloignent de fait de logiques plus globales. Nous n'avons pas le choix. Donc l'Europe discute avec ses deux grands partenaires, Chine et Etats-Unis, sachant que ses divers membres discutent aussi avec les deux. On peut difficilement imaginer que tout ceci va marcher spontanément ensemble... Mais il faut continuer à marcher.

Les rapports triangulaires Chine-Etats-Unis-Europe doivent être gérés le plus tard possible

Le jeu se complique pour l'Europe avec ses deux grands partenaires, car il lui faut négocier avec l'un, sachant que l'autre est tout à fait au courant de ce qui se passe. Il peut donc demander des avancées semblables, sachant aussi que la Chine a une avance salariale et les Etats-Unis technologique, sachant qu'il y a tout un jeu d'interdépendances politiques, culturelles, affectives, militaires entre les divers protagonistes.

Le plus simple est donc de ne rien mélanger et de traiter chaque débat avec X et Y en termes purement techniques et de les mener ainsi aussi longtemps que possible. Une instance doit naître au niveau de la Commission, confidentielle, pour étudier les effets de ces négociations séparées. Il faut éviter la situation où X et Y formeraient une configuration de fait contre l'Europe.

La conséquence est donc qu'il ne faut pas répondre, à ce stade, à la question de l'article... Ce n'est que quand un accord sera proche avec l'un que l'on pourra négocier avec l'autre et jouer ainsi d'un effet de concurrence. Le système pourrait en effet devenir 2 contre 1, Europe plus X contre Y. C'est à ce moment que l'on obtiendra plus de chacun et que les discussions seront de fait plus interdépendantes. Mais nous n'y sommes pas.
Donc renforçons-nous, c'est le cœur du jeu ; donc discutons techniquement et séparément avec X et Y ; donc faisons en sorte de gérer des rapports triangulaires le plus tard et les plus indirectement possible. Donc parlons-nous plus que jamais, entre Européens.

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Jean-Paul Betbèze est PDG de Betbèze Conseil, membre de la Commission Economique de la Nation et du Bureau du Conseil national de l'information statistique (France), du Cercle des économistes et Président du Comité scientifique de la Fondation Robert Schumann. Professeur d'Université (Agrégé des Facultés, Professeur à Paris Panthéon-Assas), il a été auparavant chef économiste de banque (Chef économiste du Crédit Lyonnais puis Chef économiste & Directeur des Etudes Economiques, Membre du Comité Exécutif de Crédit Agricole SA) et membre pendant six ans du Conseil d'Analyse économique auprès du Premier ministre. Il est l'auteur des ouvrages suivants:· "Si ça nous arrivait demain..." aux éditions Plon, Collection Tribune Libre· "2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France" aux Editions PUF, 2012.. "Quelles réformes pour sauver l'Etat ?" avec Benoît Coeuré aux Editions PUF, 2011.. "Les 100 mots de l'Europe" avec Jean-Dominique Giuliani aux Editions PUF, 2O11. "Les 100 mots de la Chine" avec André Chieng aux Editions PUF, 2010. Son site : www.betbezeconseil.com

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