Le nucléaire en France, J’accuse en 2014 !

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Par Gabriel Weisser Modifié le 29 novembre 2022 à 10h09

APPEL AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Par un citoyen-riverain d'une centrale nucléaire

Monsieur le Président de la République,

Me permettez-vous de solliciter de votre temps et de m'adresser à vous en tant que citoyen-riverain d'une centrale nucléaire française afin de lancer un appel pour la sauvegarde de la France ?Voilà maintenant depuis 1974 que la France a fait le choix de produire son électricité exclusivement à partir de la fission nucléaire. Nous sommes aujourd'hui en 2014 et avec nos 58 réacteurs nucléaires, nous produisons presque 80% de notre électricité. L'industrie nucléaire nous a rendu service pour garantir notre indépendance énergétique et le service public d'approvisionnement en électricité a toujours été assuré. Grâce au savoir-faire d'EDF et des employés de l'industrie électronucléaire française, aucune de nos centrales n'a connu jusqu'à présent d'accident majeur. Néanmoins les incidents à répétition qui touchent aujourd'hui nos vieilles centrales atomiques et plus particulièrement celle de Fessenheim en Alsace, ne cessent de nous inquiéter et nous font craindre un accident nucléaire majeur en France.

Nous savons aujourd'hui suite aux accidents nucléaires majeurs de Tchernobyl en Ukraine en 1986 et de Fukushima au Japon en 2011, le caractère irréparable des dommages causés par une catastrophe nucléaire à la Vie, à l'Environnement et à l'Homme. Les leçons de l'Histoire de l'industrie électronucléaire et les « FAITS » devraient nous conduire en France à fermer les centrales atomiques dans les meilleurs délais avant qu'il ne soit trop tard.

Pourtant en dépit de l'Histoire électronucléaire mondiale récente, les pouvoirs publics français continuent en 2014 à promouvoir l'industrie nucléaire comme avenir exclusif de production d'électricité et précipite ainsi la France dans un « abîme atomique ».

Alors, au nom du droit à l'information, j'accuse les autorités françaises d'avoir organisé une propagande pour soutenir l'industrie nucléaire et d'avoir pris en otage les Français par une communication tendancieuse et indigne d'une démocratie. Les questions de l'emploi et de l'approvisionnement électrique sont encore présentées d'une manière tronquée et l'on a fait croire aux Français que la sortie du nucléaire serait synonyme de chômage et de « retour à la bougie ». Présenter ainsi la question du nucléaire en France, c'est -TOUJOURS- interdire aux Français de penser l'avenir de l'approvisionnement électrique autrement et de s'ouvrir à « l'après nucléaire ».

Au nom du principe d'économie d'énergie, j'accuse les pouvoirs publics d'avoir incité les Français à s'équiper à outrance en appareils électriques énergivores, notamment en radiateurs de chauffage électrique, afin de légitimer la filière nucléaire.

Au nom du besoin d'une transition énergétique rapide, j'accuse les pouvoirs publics d'avoir cassé l'industrie des énergies nouvelles et renouvelables en diminuant le prix de rachat de l'électricité photovoltaïque produite en France et en mettant en place une règlementation contraignante empêchant le développement de l'énergie éolienne.

Au nom des comptes publics, j'accuse le pouvoir politique d'avoir menti sur les vrais coûts de l'industrie électronucléaire et d'avoir notamment minimisé les frais à venir de traitement des déchets et de démantèlement des centrales.

Au nom de la continuité du service public d'électricité, j'accuse le pouvoir de maintenir la France dans un « État pro-nucléaire » qui nous conduit vers une impasse énergétique majeure à moyen terme. La législation actuelle sur les installations électronucléaires ne permet pas au pouvoir politique français de fermer une centrale nucléaire.

Au nom de la santé publique, j'accuse les pouvoirs publics ((suite aux explosions des réacteurs nucléaires de Tchernobyl en Ukraine en 1986 et de Fukushima au Japon en 2011)) d'avoir systématiquement minimisé les effets des conséquences sanitaires dus à ces deux accidents nucléaires majeurs. On se souvient notamment qu'aucune disposition sanitaire sérieuse n'avait été prise en France en 1986 et que la communication officielle avait fait croire que le « nuage de Tchernobyl » s'était arrêté à la frontière sur le Rhin, alors que les autorités allemandes par exemple avaient pris des dispositions pour interdire notamment la consommation de produits alimentaires susceptibles d'être contaminés. La communication assurée par les pouvoirs publics en France en 1986 avait eu pour seul objectif de rassurer les populations « à tout prix » quitte à faire une entorse au principe de précaution. L'augmentation des graves atteintes de la thyroïde et des cancers en France ne cesse de nous interroger sur l'attitude irresponsable et scandaleuse des pouvoirs publics d'alors dont le seul objectif était finalement de protéger la filière nucléaire.

Au nom du principe de réalité, j'accuse les pouvoirs publics de faire croire aux Français qu'un accident nucléaire majeur ne peut arriver qu'aux autres et que jamais aucune centrale française ne connaitra d'accident nucléaire majeur.

Au nom du patrimoine historique et gastronomique français, j'accuse les pouvoirs publics de transformer la France en poubelle nucléaire du monde et de ternir l'image touristique de notre pays.

Au nom du principe de précaution, j'accuse les pouvoirs publics de mise en danger de la vie d'autrui en matière de production électrique, en faisant courir aux populations riveraines des centrales nucléaires françaises, un risque connu et aux dommages incommensurables.

Au nom des Droits de l'Homme et du Développement durable, j'accuse le pouvoir politique français d'enfreindre les droits des générations à venir, en léguant un patrimoine de déchets radioactifs hautement dangereux et qui fera courir un risque aux Français de demain.

Au nom du Siècle des Lumières, j'accuse le pouvoir français de dogmatisme pro-nucléaire qui relègue le citoyen en simple serviteur et consommateur de l'atome.

Face à ce déni de réalité, face aux conséquences de fonctionnement de l'industrie électronucléaire, nos enfants, nos petits enfants et les générations à venir ont le droit de savoir que nous connaissions tous en 2014, les dangers liés à la fission nucléaire, aux déchets produits, aux risques induits (Tchernobyl, Fukushima) et que les autorités françaises ont maintenu en l'état notre parc de centrales nucléaires comme si de rien n'était. Nous savions produire autrement l'électricité, mais nous n'avons rien fait pour sortir du modèle atomique en France.

Voilà le prix à payer pour notre « confort électrique et économique » d'aujourd'hui, des déchets et des produits radioactifs disséminés dans la nature, consécutifs à l'activité humaine de l'industrie nucléaire en cette fin de XX siècle et ce début du XXI siècle. L'ensemble de notre science nucléaire sans conscience sera à supporter ainsi par les générations à venir.

Alors au nom de la République, j'accuse l'ensemble des irresponsables politiques français de la « transition électrique molle » d'avoir instrumentalisé l'appareil d'État, afin de mentir à la nation et de prendre en otage les Français en entretenant un discours fondé sur l'interdit de sortir du nucléaire et sur l'impossible liberté d'ouvrir la France aux énergies alternatives dans des délais acceptables.

Face à l'électricité nucléaire, notre responsabilité devant l'Humanité est désormais engagée aujourd'hui !

J'attends de vous, Monsieur le Président de la République, les décisions responsables en matière d'industrie électronucléaire qui s'impose à l'Homme politique d'aujourd'hui en charge de l'avenir de la France de demain.

Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l'assurance de mon profond respect.

Au nom de mes enfants,

Pour le respect de l'Environnement et de la Vie,

Un citoyen-riverain de la centrale nucléaire de Fessenheim.

Gabriel WEISSER

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En tant que citoyen-riverain d'une centrale nucléaire, Gabriel Weisser est entré en résistance contre le nucléaire après l'accident de Fukushima. Depuis, il a fait un certain nombre de contributions pour dénoncer la dangerosité du nucléaire, dont certaines ont connu une audience médiatique. En 2011 il s'est opposé à ce que la SFEN (Société française d'énergie nucléaire), présidée par Luc Oursel, dirigeant d'AREVA, arrête ses interventions au sein des établissements scolaires en Alsace. À ce jour la SFEN n'intervient plus dans les établissements scolaires de la région. En tant que conseiller principal d'éducation dans un lycée, il a pris en charge l'éducation à l'environnement et a initié en février 2014 un projet à vocation environnementale nommé "Lycée en transition". L'ensemble de sa contribution privée et professionnelle au service de l'environnement lui a valu d'être élu "l'Alsacien de la semaine" en mars 2014 par le journal "L'Alsace".

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