Méthode aussi vorace en énergie que coûteuse pour les ménages, le chauffage électrique s'allie avec notre mauvais score en matière d'isolation
Est-ce que vous vous chauffez au radiateur électrique ? Est-ce que votre logement est mal isolé ?
Si vous répondez par l'affirmative à ces deux questions, vous dépensez sans doute plus de 10% de vos revenus dans votre facture énergétique, faites donc partie des 12 millions de Français en situation de précarité énergétique... et risquez donc plus d'avoir des problèmes de santé!
Méthode aussi vorace en énergie que coûteuse pour les ménages, le chauffage électrique s'allie avec notre mauvais score en matière d'isolation (plus de 40 % des habitations françaises sont classées entre "E" et "F") pour faire de notre parc immobilier une véritable passoire thermique.
En cette année électorale, il est difficile de trouver un sujet plus rassembleur que l'isolation des logements : c'est bon pour l'économie ("quand le bâtiment va, tout va"), c'est bon pour l'environnement, et c'est bon pour le pouvoir d'achat des Français. Pourtant, plus de huit millions de foyers se chauffent grâce aux radiateurs électriques en France, autant que... tout le reste de l'Europe! Alors, qui peut bien avoir intérêt à maintenir cette situation où des "grille-pain" fonctionnent à plein régime pour chauffer des logements remplis de courants d'air ?
Le nucléaire, et donc EDF évidemment !
Car la passion française pour les radiateurs électriques ne vient pas de nulle part: elle date des années 1970, lorsqu'EDF se retrouve avec un surplus d'électricité produite par ses nouvelles centrales nucléaires, qu'il faut bien écouler (et surtout en heures creuses, d'où une tarification spécifique). C'est ainsi que l'entreprise se lance dans une vaste campagne de publicité pour installer le chauffage électrique dans les foyers français. Les radiateurs électriques sont alors une technologie de pointe: faciles à installer et bon marché... la campagne fait mouche, le marché explose.
Depuis, la donne a changé : la demande d'électricité a explosé en 30 ans (et elle stagne depuis 2008 grâce aux gains d'efficacité énergétique) et son coût aussi. Mais surtout des méthodes de chauffage et d'isolation bien plus performantes ont vu le jour. Une maison bien isolée consomme 50 kWh/m²/an, contre 231 à 330 pour une habitation classe E !
En cette période hivernale, le risque de black-out électrique est bien réel, d'autant plus qu'un problème générique de sûreté a obligé EDF à arrêter 15 réacteurs en décembre. Pour y faire face, nous pouvons soit accepter passivement le productivisme d'EDF, qui pousse l'Etat à financer de nouveaux réacteurs ou à allonger dangereusement la durée de vie du parc nucléaire existant, afin d'alimenter ses radiateurs à l'inefficacité prouvée. Soit faire preuve pour une fois de bon sens et investir cet argent dans l'isolation thermique et le chauffage durable. Chaque euro investi dans l'efficacité énergétique est un pas de plus vers la fermeture des centrales nucléaires et 0,42€ d'économie sur les dépenses de santé.
Prenons donc exemple sur l'Allemagne, où les banques sont tenues de diminuer les intérêts de leurs prêts au prorata des objectifs thermiques des travaux de rénovation. Nous pouvons également encourager le projet GreenFlex, inspiré des Pays-Bas et soutenu par la Commission européenne, qui consiste à rénover les logements par tirs groupés, pour diminuer massivement le prix des travaux. Et pourquoi ne pas inclure systématiquement la note d'électricité dans le loyer, ce qui donnerait un signal clair aux locataires et inciterait les propriétaires à rénover leurs logements? Les bonnes idées ne manquent pas, l'énergie, si et notre dépendance à celle-ci a bien trop de conséquences pour que l'on ne s'en soucie pas...
Et que ce soit dit une bonne fois pour toutes : "L'énergie la moins chère, celle qui pollue le moins... c'est celle que l'on ne consomme pas!"