Baisse des taux longs, repli de la livre et hausse de la bourse ; il est bien en train de se passer quelque chose au Royaume-Uni. De fait, la démission hier de Boris Johnson a suivi celle de David Davies quelques heures auparavant. Crise politique chez nos amis britanniques, sans doute ; mais avec quelles conséquences ?
Le Brexit, sera-t-il « soft » ?
Faisons en la matière quatre commentaires. Premièrement on ne peut sans doute pas parler d’une guerre ouverte au sein du gouvernement entre tenants du hard Brexit et défenseurs du soft Brexit. Les ministres Gove et Fox, clairement à ranger dans le premier camp, restent au sein du Cabinet. Le premier a même défendu la proposition de Theresa May en matière de relations futures avec l’UE.
Deuxièmement, il apparaît que le gouvernement est dorénavant mieux rangé que jamais derrière la Première ministre.
Troisièmement, rappelons-le, le centre de gravité du Parlement est du côté du soft Brexit.
Quatrièmement, et cela tient aussi du rappel, le Parti conservateur est davantage en faveur du Hard Brexit. Que conclure de ces éléments ? Peut-être que le Parti réussira à trouver quarante-huit députés pour enclencher le processus d’une motion de censure contre Theresa May. Mais ce n’est pas sûr et il est très probable que celle-ci ne serait pas majoritaire. Bref, du côté britannique, la perspective s’éclaircit, avec une proposition de type soft Brexit faite à Bruxelles. De quoi améliorer les perspectives économiques au Royaume-Uni et redonner des couleurs à la livre ? On a envie de le dire. Mais n’allons pas trop vite en besogne. Les propositions de la Première ministre seront à retravailler. Dans leur forme actuelle, elles sont trop de nature cherry picking, ce dont l’UE ne veut pas, et ne règlent pas ad vitam aeternam la question de la frontière entre Eire et Ulster.
Chine : les prix à la consommation s'accélèrent
Parlons d’inflation en Chine. Son accélération est-elle à même de gêner le processus d’assouplissement en cours de la politique monétaire ? De fait, le glissement sur un an des prix à la production est passé de 4,1% en mai (après +3,4% en avril) à 4,7% en juin. Du côté des prix à la consommation, la hausse est moins marquée : +1,9% après +1,8%.
Que se passe-t-il ? Le renchérissement des prix à la production est largement le fait des matières premières et des produits bruts, avec pas mal d’effet-base. Un ralentissement devrait intervenir à l’horizon des prochains trimestres. Par ailleurs, si l’indice d’ensemble des prix à la consommation accélère un peu, ce n’est pas le cas du noyau dur (hors énergie et produits alimentaires). Cependant, une certaine normalisation des prix de l’alimentation et la fermeté du marché du travail créent probablement les conditions d’un peu d’accélération. In fine, le profil des prix ne devrait pas être jugé inquiétant par la banque centrale. La politique monétaire apportera son écho au soutien à la croissance en ce moment compliqué (mise en œuvre de réformes de structure et montée des tensions commerciales avec les Etats-Unis).
États-Unis : la Fed ne parvient pas à faire baisser les taux longs
Finissons par la politique monétaire américaine. On sait que la Fed a du mal à maintenir le taux effectif des fonds fédéraux au milieu de la fourchette définie. Malgré la décision du 13 juin 2018 de relever le taux versé sur les réserves excédentaires des banques commerciales auprès de la Fed de 20 centimes, alors que la fourchette du taux des fonds fédéraux l’était de 25 centimes, le taux effectif reste dans la partie haute de la fenêtre. A l’heure actuelle, 1,91% pour un segment de 1,75% à 2%. C’est cependant mieux qu’avant la dernière hausse du taux directeur. Début juin, par exemple, 1,70% à comparer à une fourchette de 1,50% à 1,75%. Le problème est-il résolu, sachant que les dirigeants de la Fed ne veulent évidemment pas que le taux effectif passe au-dessus de la borne haute ? Pour répondre à la question, il faut revenir à la genèse du phénomène ; à savoir la réduction des réserves des banques au passif du bilan de la Fed, en contrepartie de la réduction de la taille du bilan par vente d’actifs.
Faut-il alors considérer que la Fed devrait réduire ses ambitions en matière de diminution de la taille de son bilan ? Eventuellement oui. Avec alors quel impact sur le niveau des taux longs ? Rappelons que la politique de Quantitative Easing avait comme ambition de réduire la prime de terme. Et donc de mieux contrôler la partie longue de la courbe. A contrario, le processus de réduction de la taille du bilan créait les conditions d’une prime de terme plus importante et donc, toutes choses égales par ailleurs, d’une courbe plus pentue. Il est possible que l’ampleur du mécanisme doive être revue à la baisse. Le point est à suivre.