Gaz de schiste : de l’importance du débat démocratique sur le sujet

Par Bertrand de Kermel Modifié le 7 février 2014 à 3h36

Une majorité de Français est actuellement opposée à l’exploitation du gaz de schiste. A ce jour, j’en fais partie pour une raison simple : à ma connaissance aucun partisan de l’exploitation du gaz de schiste n’est disposé à acheter une maison de campagne dans les pays où ont été forés les puits de recherche et d’extraction de gaz de schiste.

Economie matin vient de nous apprendre qu’interrogée jeudi dernier par Le Parisien, l'ancienne navigatrice Maud Fontenoy a déclaré que l'exploitation du gaz de schiste était un véritable atout écologique.

Pour justifier sa position, elle souligne notamment que si la fracturation hydraulique nécessite l'utilisation de produits chimiques et induit un gros gaspillage d'eau, de nouvelles technologies propres sont apparues. Elle prend l’exemple de la fracturation au propane, qui règle le problème de l’eau, sachant également qu’on peut recycler le propane pratiquement à 100 %.

Les peurs des Français ne seraient donc plus fondées ? Parfait, encore faut-il le leur démontrer. Si cette démonstration est faite, ils évolueront dans leur position, car ils ne sont ni bornés ni doctrinaires.

C’est donc une belle occasion qui s’offre au gouvernement pour faire d’une pierre deux coups : autoriser l’extraction de gaz de schiste, si vraiment il est prouvé qu’il n’y a plus de problème écologique. Profiter de l’occasion pour revivifier la démocratie qui ne fonctionne plus. Comment ? Très simple. Organiser partout en France des colloques sur le sujet.

Mais attention : sur le fond et sur la forme, ces colloques devront être de très haut niveau, sur le modèle par exemple de l’émission "C dans l’air". Plus personne ne veut entendre les politicards qui, conseillés par de minables communicants, se coupent la parole, polluent les débats et énervent tout le monde. "C dans l’air" nous a démontré que les problèmes les plus complexes peuvent être expliqués de façon très pédagogique à tous les français. Retenons la leçon, et élargissons-là.

Quelques suggestions. Pour éviter que le débat s’enflamme, seules les personnes de la Tribune, choisies dans la transparence en fonction de leur connaissance du dossier, et de leurs qualités d’écoute, d’expression et de pédagogie devraient pouvoir s’exprimer. Evidemment, les places à la Tribune ne devrait pas être trustées par les lobbies. Les partisans et les opposants devraient disposer du même temps de parole. Ce point est crucial. On devrait notamment entendre des témoignages, accompagnés de preuves irréfutables, d’américains ayant souffert dans leur région de ce type d’exploitation. Des témoignages opposés, s’il en existe, devraient aussi être présentés, également accompagnés de preuves irréfutables.

Ces témoignages introduiraient le chapitre sur les nouvelles formes d’exploitation évoquées par Maud Fontenoy. Et s’il existe des experts critiques sur ces nouvelles formes d’exploitation, ils devraient également pourvoir exprimer leurs réserves, le tout dans le calme et le respect, comme il sied à des scientifiques.

A l’entrée de ces colloques, un dossier devrait être remis à chaque participant, présentant les enjeux, et les différents arguments qui seront avancés pendant le colloque. Cela serait utile aux participants, pour reparler de ce sujet ensuite avec leurs amis.

Pour compenser l’absence de discussion générale avec la salle, il faudrait enfin que dès le lendemain, la presse locale ouvre ses colonnes plusieurs jours de suite (courriers des lecteurs, tribunes etc) aux participants du colloque, pour leur permettre de s’exprimer, et de livrer leurs impressions à froid.

Certes, la décision appartient et devra toujours appartenir au gouvernement. Mais sur un tel sujet, qui touche à l’eau et au sous-sol, donc au bien commun des Hommes présents et futurs, il faut absolument prendre le temps d’expliquer les choix aux citoyens. Si de tels colloques avaient eu lieu au XIXème siècle, il est probable que certaines villes n’auraient pas refusé la construction d’une gare.

Sur un plan plus général, une telle façon de travailler sur des sujets majeurs serait une façon de revivifier la démocratie qui ne fonctionne plus dans sa forme actuelle. Ce serait une façon de réconcilier les français avec leurs politiques, qui ne sont pas tous des pourris, loin s’en faut, dont l’immense majorité travaille avec une grande rigueur, mais qui sont aujourd’hui fortement contestés.

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Ancien directeur général d'un syndicat patronal du secteur agroalimentaire, Bertrand de Kermel est aujourd'hui Président du comité Pauvreté et politique, dont l'objet statutaire est de formuler toutes propositions pour une "politique juste et efficace, mise délibérément au service de l'Homme, à commencer par le plus démuni ". Il est l'auteur de deux livres sur la mondialisation (2000 et 2012)

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