Julien Dray, Premier Secrétaire du Parti socialiste, a dans un entretien accordé au Parisien le lundi 12 août, souligné que "la réforme des retraites n'est pas urgente". A quelques mois des élections municipales, la politique de l'autruche semble reprendre ses droits.
Cette position s'inscrit dans le prolongement du projet du PS sur les retraites qui repose sur l'idée que le déficit de l'assurance-vieillesse est purement conjoncturel. Le retour de la croissance est censé résoudre le problème. En soi, ce n'est pas complètement faux. Il est certain que si la croissance était de 3 % et le taux de chômage ramené à 4,5 %, l'assurance-vieillesse dégagerait rapidement des excédents. De même, nous n'aurions plus de déficit pour l'assurance-maladie ou pour l'assurance-chômage. Le budget de l'Etat serait à l'équilibre et nous pourrions travailler à la réduction de la dette publique. Mais, nous ne vivons pas chez Alice aux pays des merveilles.
Nous sommes confrontés à un amoindrissement décennie après décennie de notre taux de croissance et à un chômage qui, en vingt-cinq ans, n'a jamais réussi à passer sous la barre des 7,5 %.
Nos déficits et nos dettes entravent la croissance de notre économie
Nul ne peut ignorer que notre régime vieillesse accumule depuis plusieurs années des déficits de près de 8 milliards d'euros. Nul ne peut contester qu'à défaut de plein emploi, d'ici 2020, le déficit des régimes de retraite atteindra 20 milliards d'euros. Les investisseurs qui permettent à la France de vivre à crédit n'attendront pas indéfiniment.
Evidemment que Julien Dray a raison d'indiquer que la croissance résoudrait une grande partie de nos problèmes mais il oublie de mentionner qu'elle ne se décrète pas. La croissance se mérite, se construit ; elle s'organise. Il nous faut améliorer notre compétitivité, développer de nouveaux secteurs d'activité, investir dans la recherche, dans l'innovation... Nous ne pouvons pas nous contenter d'espérer que le retour de la croissance dans le sud de l'Europe ou le plan de relance de la consommation en Allemagne suffiront à nous sortir de nos ornières.
Le Gouvernement semble décider de contourner la question de la réforme des retraites
L'allongement de la durée de cotisation n'est prévu qu'après 2020, le report de l'âge légal, solution choisie par nos partenaires est persona non grata sous nos latitudes. Comme la réforme systémique avec l'instauration d'un régime unique par points est une arlésienne, il ne reste comme voies que l'augmentation des prélèvements. Or, que ce soit le relèvement de la CSG, la majoration des cotisations ou la suppression de la déduction de 10 % sur les pensions des retraités, le pouvoir d'achat des Français sera amputé et la compétitivité des entreprises une fois de plus dégradée. De telles mesures ne favorisent pas la croissance tant espérée par Julien Dray.
De même, il faut souligner que l'absence de fonds de pension français pénalise les entreprises françaises dans leurs quêtes de fonds propres. Elles sont contraintes de rechercher l'appui de fonds étrangers pour les plus grandes d'entre elles. La création d'un véritable étage d'épargne retraite permettrait d'irriguer notre économie en capitaux.
Le Gouvernement a opté pour la grève du zèle en matière de réforme des retraites. Une fois de plus, la France risque de manquer son rendez-vous. En effet, à partir de 2014, la succession des élections privera d'audace réformatrice les gouvernements. La création du régime unique des retraites restera donc un vœu pieux au moins jusqu'en 2017 voire jusqu'en 2020.