Faut-il obliger chaque foyer à financer la presse et l’audiovisuel public ?

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Par Nicolas Perrin Publié le 16 février 2017 à 5h00
Medias France Financement Contribuables Aides
@shutter - © Economie Matin
13 millions ?Le quotidien Le Monde a coûté 14 millions d'euros au contribuable en 2014.

Les subventions aux grands medias ne parviennent pas à enrayer leurs naufrages. L'Etat se disperse et gaspille l'argent des contribuables.

A en croire Mathieu Gallet, président de Radio France depuis février 2014, la France vit des heures très sombres. « Beaucoup de foyers n’achètent plus de téléviseur », s’alarmait-il dans une interview donnée au Monde le 6 février, ce qui entraîne une diminution des subventions qui alimentent le budget de la société qu’il dirige.

La situation est d’autant plus grave que monsieur Gallet se demande ce que la France deviendrait sans des « médias publics forts avec des financements pérennes »… La solution prônée par ce valeureux chevalier de la culture officielle ? François Hollande a déjà augmenté à plusieurs reprises le montant annuel de la redevance audiovisuelle et, à 137 euros en métropole en 2016, ça commence à piquer. Monsieur Gallet se prononce plutôt en faveur de la généralisation de la taxation à chaque foyer, peu importe donc qu’ils utilisent un téléviseur ou non. Cela permettrait de ne pas augmenter le coût par tête…en tout cas pas pour le moment.

Au vu de la diminution mondiale de la consommation de télévision et de la désaffection des jeunes générations, on comprend que Mathieu Gallet s’inquiète pour l’avenir de son fromage.

Comme le relève l’ancien président de l’INA, à l’heure des Facebook, YouTube et autres Vimeo, nous vivons dans un « monde de plates-formes », ce qui n’annonce rien de bon pour les bénéficiaires de la redevance télé que sont France Télévisions, Radio France, Arte, l’INA et consorts. Certains commentateurs, comme Laurent Alexandre, se demandent même si presque tous les médias n’auraient pas déjà accepté « leur vassalisation » auxdites plates-formes. ?

Quelques hommes politiques utilisent d’ailleurs à merveille ces « nouveaux » canaux médiatiques. On pense évidemment à Donald Trump qui recourt allègrement à Twitter pour court-circuiter les médias et les journalistes traditionnels. Plus proche de nous, Jean-Luc Mélenchon fait un carton sur sa chaîne YouTube. Comme l’audiovisuel est en passe de « s’arrêter de bouger », il est donc tout à fait naturel que l’Etat continue de « le subventionner », pour rester dans la parfaite mais absurde logique interventionniste dont se moquait Ronald Reagan. (« Si ça bouge, taxez-le. Si ça continue à bouger, régulez-le. Si ça s’arrête de bouger, subventionnez-le. »)

Ceci est d’autant plus regrettable qu’avec 3,6 Mds€ récoltés en 2016 au titre de la redevance télé, le coût de France Télévisions (qui absorbe les deux tiers de la taxe) et des autres bénéficiaires représentait environ la moitié du budget de la Justice (6,3 Mds€ en 2016). En ce qui me concerne, je préférerais un Etat « fort » (pour reprendre le terme de monsieur Gallet) sur le plan de ses compétences régaliennes, plutôt que dans des domaines où la légitimité de son intervention est particulièrement discutable, comme c’est le cas de la Culture.

On pourrait d’ailleurs étendre cette remarque à la presse qui bénéficie des largesses de nos élus. Vu la chute de la confiance que les Français octroient aux informations qu’ils lisent ou qu’ils entendent (-3 points à la radio à 52% de confiance, -7 points aux journaux à 44%, -9 points à la télévision à 41% — enquête annuelle de La Croix), pourquoi distribuer plus d’argent public à une presse déjà lourdement subventionnée ?

En 2014, ce sont 226 M€ qu’ont perçu Le Figaro, Aujourd’hui en France (Le Parisien), Le Monde et les 197 autres organes de presse les plus subventionnés. Les montants précis perçus par chaque organe de presse en 2015 ne sont plus connus puisque l’Etat a décidé de retirer le montant de l’aide postale (130 M€) du tableau des aides individuelles.

Comme cela ne suffisait pas pour Audrey Azoulay (notre ministre de la Culture), celle-ci a annoncé fin décembre que « dès 2017, l’Etat investira 10 M€ supplémentaires par an pour stabiliser le secteur de la presse ». On avait déjà appris en décembre que le montant de la réduction d’impôt des particuliers souscrivant au capital d’entreprises de presse allait être multiplié par cinq, dans le cadre de la « loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias » (interdit de rire).

Le Web n’est pas en reste avec seulement 26% de confiance (-5 points sur un an). Mais sur internet, on a accès à une offre d’informations et d’opinions quasi illimitée. N’importe qui peut disposer d’un canal d’expression gratuit en ouvrant un blog, un compte twitter ou encore une chaîne YouTube. On se situe donc à l’extrême opposé du plateau de C dans l’air où se relaient inlassablement les mêmes invités. Sur internet, rien ne vous oblige à continuer de lire ou de regarder chaque jour le même bonimenteur « inamovible, irréfutable, irrémédiable, soudé à sa chaîne comme un débouche-évier sur un sanitaire », aurait dit Desproges. Au vu de la diversité de l’offre, vous avez potentiellement accès à des sources d’informations fiables et à des opinions divergentes ; il suffit de se donner la peine de chercher.

Mais si la paresse prend le dessus et que vous rechignez à assumer votre propre sélection de vos sources d’information, surtout ne paniquez pas. Le Monde, dont la parution a coûté plus de 13 M€ aux contribuables en 2014, a publié Decodex, une extension pour navigateur qui vous dira si vous êtes en train de consulter un site « bidon » comme Contrepoints (aucune aide) ou un site « en principe plutôt fiable », comme l’ancien organe central du Parti communiste français de 1920 à 1994, L’Humanité (6 M€ de subventions en 2014).

Le Decodex est encore un outil qui prouve que certains medias n’ont pas pris la mesure du fossé qui les sépare du public. Dommage qu’en plus, cet outil soit financé avec nos impôts.

Pour plus d’informations et de conseils de ce genre, c’est ici et c’est gratuit

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Diplômé de l’IEP de Strasbourg, du Collège d’Europe et titulaire d’un Master 2 en Gestion de Patrimoine, Nicolas Perrin a débuté sa carrière en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Auteur de l’ouvrage de référence « Investir sur le Marché de l’Or : Comprendre pour Agir », il est désormais rédacteur indépendant. Il s’intéresse au libéralisme, à l’économie et aux marchés financiers, en particulier aux métaux précieux et aux crypto-actifs, sans oublier la gestion de patrimoine. Son Twitter : @Nikookaburra.

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