Le 25 mars 2020, plusieurs ordonnances ont été publiées, dont l’une concerne le secteur de l’immobilier. Ces mesures déjà effectives pourraient avoir des conséquences importantes sur les transactions dans les mois à venir, notamment en ce qui concerne le droit de préemption des mairies et les délais de rétractation des avant-contrats.
Les mairies ont davantage de temps pour préempter un bien immobilier
Lorsqu’une personne vend son logement, la mairie bénéficie d’un droit de préemption urbain (DPU), qui lui accorde la priorité pour l’acquérir si elle le souhaite. Cela signifie qu’en cas de vente d'un logement, si la mairie se manifeste pour l'acquérir, le vendeur ne peut pas refuser car la mairie a la priorité par rapport à tout autre acquéreur potentiel. Ce droit de préemption est accordé à la mairie sous réserve que celle-ci se manifeste dans un délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration d’intention d’aliéner (DIA). Ce document est adressé par le notaire en charge de la vente à la mairie pour connaître s’il y a un droit de préemption pour le logement concerné.
Mais l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 précise que désormais, compte tenu de la crise du Covid-19, les délais d’instruction, qui ne sont pas arrivés à échéance avant le 12 mars 2020, sont suspendus jusqu’à la levée de l’état d’urgence sanitaire pour l’instant fixée au 24 mai 2020 . Deux cas de figure se distinguent alors :
- Si une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) a été déposée avant le 12 mars 2020, le délai de préemption est alors suspendu mais il ne repart pas à zéro. Ce délai reprendra alors là où il en était au 12 mars à partir de la levée de l’état d’urgence sanitaire, pour l’instant fixée au 24 mai 2020. Il reprendra pour le temps qui restait à courir à compter du 12 mars.
- Si une déclaration d’intention d’aliéner a été déposée après le 12 mars 2020, le délai de 2 mois accordé aux mairies pour exprimer leur droit de préemption est alors purement et simplement remis à zéro et commencera à courir à partir du 25 mai 2020. Par conséquent, la vente de ce bien ne pourra pas être finalisée avant le 25 juillet. Ainsi, une déclaration d'intention d'aliéner déposée le 13 mars par exemple, se trouve pénalisée de 45 jours de retard suite à cette ordonnance.
Les mairies n’assurent désormais plus de service minimum, il ne faut donc pas s’attendre à une réponse administrative concernant l’exercice ou non du droit de préemption pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire.
Les délais de rétractation des compromis et promesses de vente sont rallongés pour l'achat d'un logement
La signature d’un compromis ou d’une promesse de vente entraîne l’ouverture d’un délai de rétractation de 10 jours au bénéficie de l’acquéreur. Mais l’ordonnance du 25 mars 2020 est venue modifier le délai accordé aux acquéreurs pour se rétracter, puisqu’il va être suspendu ou interrompu pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, au même titre que le droit de préemption :
- Si le droit de rétractation devait expirer avant le 12 mars 2020, le processus de vente se poursuit comme en temps normal et aucune prolongation du délai de rétractation n’est prévue.
- Si le droit de rétractation doit prendre fin entre le 12 mars 2020 et un mois après l’arrêt de l’état d’urgence sanitaire (soit le 24 juin 2020), ce délai est prolongé : il ne commencera à courir qu’à compter du 24 juin 2020 pour prendre fin le 3 juillet. Cela signifie que pour tous les avant-contrats dont le délai de rétractation arrive à terme entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020, ce délai est repoussé.
Quelles conséquences pour le marché immobilier ?
« L’ordonnance du 25 mars 2020 a peut-être été prise sans mesurer toutes les conséquences. Ses dispositions, qui touchent à la purge des délais légaux, me semblent excessives car au-delà de l’impact qu’elle ne manquera pas d’avoir sur la trésorerie des métiers de la transaction immobilière, la prolongation des délais légaux risque aussi de mettre les propriétaires vendeurs en difficulté en venant créer un contexte d'incertitude et d'allongement des délais. Pour que les Français puissent se préparer au « jour d’après », il est important que les mesures prises par le gouvernement, pour préserver la sécurité de chacun, soient équitables et raisonnables. Dans le cas présent, ces mesures semblent disproportionnées ». Bertrand Gsalder, Président du Groupe SeLoger.