La gauche relance l’Etat-Providence pour avoir la paix sociale

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Par Eric Verhaeghe Publié le 19 avril 2016 à 10h10
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@shutter - © Economie Matin
524,68 EUROSLe RSA socle est de 524,68 euros pour une personne seule sans enfants.

L’Etat-Providence demeure l’arme préférée de la gauche de gouvernement pour acheter et préserver la paix sociale (surtout à l’approche d’une année électorale cruciale). Ce week-end vient d’en donner une nouvelle preuve.

L’Etat-Providence pour calmer la jeunesse

Les médias subventionnés adorent répéter en boucle toutes les vertus de la Nuit Debout. Pour le gouvernement, ce mouvement pourrait constituer une menace dans la mesure où il est partiellement nourri par la contestation contre la loi El-Khomri. Il n’en fallait pas plus pour que le gouvernement relance l’expansion de l’Etat-Providence.

Ainsi, le rapport Sirugue (du député par ailleurs rapporteur de la loi El-Khomri) propose d’ouvrir la perception des minima sociaux aux jeunes dès 18 ans. Face à la contestation, l’allocation!

Je propose tout d’abord de supprimer la barrière d’âge pour les jeunes. Que toute personne puisse, dès ses 18 ans, bénéficier de ces allocations sans attendre ses 25 ans.

Comme d’habitude, l’Etat préfère éviter les examens de conscience, par exemple sur l’incapacité de l’Université à préparer les jeunes au marché du travail. Au lieu d’améliorer la performance des politiques publiques, il vaut mieux piocher dans la caisse et pratiquer cette forme obsolète d’helicopter money qu’on appelle Etat-Providence.

J’en profite pour glisser combien cette grosse ficelle n’a rien à voir avec le revenu universel qu’évoque Libération. La solution proposée par Christophe Sirugue, en service commandé manifeste, ne bénéficiera qu’à un segment de population concerné par une problématique particulière, alors que le revenu universel bénéficie à tous (selon un principe limpide de solidarité).

L’Etat-Providence pour calmer les intermittents du spectacle

Pendant que le député Sirugue servait à Manuel Valls la soupe que l’UNEF réclame, la ministre de la Culture Azoulay intervenait sur un autre front: celui des intermittents du spectacle.

Dans le cadre de la renégociation de la convention d’assurance-chômage, les partenaires sociaux doivent en effet présenter un document de cadrage sur le financement du régime. Sans véritable surprise, le MEDEF a proposé d’importantes économies pour cette catégorie d’allocataires qui représente 3% des effectifs, mais 25% du déficit de l’UNEDIC.

Dans une interview à Libération, qui confirme peu à peu son rôle d’agence de presse du gouvernement, Audrey Azoulay, qui prend une pause grotesque pour la photo (publiée en une de ce papier), explique tout le mal qu’elle pense de la « démocratie sociale » ainsi que de la libre négociation entre partenaires sociaux, et entreprend de corriger les torts.

Le soutien au spectacle vivant est au cœur de la politique artistique. Nous avons la chance d’avoir en France un modèle de soutien aux artistes envié à l’étranger, grâce au dynamisme de nos lieux de création et de diffusion. Cela passe par le maintien d’un régime spécifique d’assurance chômage, qui correspond à l’activité intermittente de ces professions aujourd’hui inquiètes pour les négociations sur l’avenir de l’Unédic. (…)

Le cadrage adressé au monde du spectacle est une provocation, et il est clairement un appel explicite à ce que ce soit le gouvernement qui finance une bonne part des économies. Tout le monde reconnaît qu’une économie se situant autour de 100 millions, après ceux de la précédente convention constituera déjà un effort très important pour la profession. Le Premier ministre l’a dit, l’Etat ne laissera pas tomber les intermittents, il ne permettra pas que ce régime soit dans l’impasse. Mais la demande des professionnels du secteur est bien de préserver dans la durée un régime d’indemnisation du chômage dans le cadre de la solidarité professionnelle.

Rappelons évidemment ici que ce que la ministre appelle la « solidarité professionnelle » s’appelle en réalité la « solidarité interprofessionnelle ». Elle consiste à demander aux petits patrons au bord de la faillite de financer la précarité imposée par les magnats de l’industrie culturelle qui peuvent faire ou défaire une campagne électorale par leur poids médiatique.

On l’aura noté, donc, la politique culturelle de l’Etat en faveur du spectacle vivant (c’est-à-dire de ces innombrables pièces de théâtre sans spectateur où des comédiens incertains raillent les petits bourgeois obscurantistes qui ne viennent pas assister à leur délire fumeux) doit être financée par les cotisations des employeurs. Et la ministre n’a aucune gêne a expliqué que l’Etat pèsera de tout son poids pour continuer cette perversion qui consiste à forcer des entreprises à cotiser pour des politiques qui relèvent de la décadence régalienne.

L’Etat-Providence et les élections

On le voit, tout ceci respire la campagne électorale pour les présidentielles. Comme l’avait annoncé François Hollande, le temps de la redistribution est venu. Ceux qui pensaient en profiter seront déçus: la redistribution ne profite qu’à l’électorat attendu par le Président de la République.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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