Attentats de Paris : pactes avec impacts nuisibles

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Par Simone Wapler Publié le 23 novembre 2015 à 5h00
Attentats Paris Terrorisme Morts France
@shutter - © Economie Matin
130130 personnes sont mortes vendredi dernier, dans les attentats à Paris.

Les impacts des balles des kalachnikovs nous valent un nouveau pacte. Nous avions déjà eu droit au pacte de stabilité, au pacte de compétitivité, voici maintenant le pacte de sécurité. Impact et pacte : deux mots mis à toutes les sauces par les communicants de nos jours.

Malheureusement, aucun « pacte » ne remplace la clairvoyance, le courage, la détermination de chacun. A ce stade, je vous entends vous offusquer cher lecteur « mais quel horrible cynisme, mettre sur le même plan trois choses aussi différentes que le budget national (pacte de stabilité) le mercantilisme économique (pacte de compétitivité) et la défense de notre civilisation, de notre art de vivre, de nos ‘valeurs’ (pacte de sécurité) ». Certes, je comprends, mais notez bien que ce n’est pas moi qui use d’un vocabulaire pauvre. Recourir aux mêmes mots pour prétendre qualifier les remèdes à trois situations aussi différentes révèle bien l’indigence de nos gouvernants.

Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement
Et les mots pour le dire viennent aisément disait Boileau.

L’inverse est vrai, des idées confuses se camouflent avec du charabia et du jargon, des expressions galvaudées et toutes faites. J’imagine que « pacte » plaît aux communicants car le mot est dérivé de paix et la paix, c’est vendeur. De même « impact » fait net, précis, marques de balles ou d’obus, déterminé, guerrier. C’est aussi vendeur auprès d’un autre public. Vous combinez les deux, et magie, vous devenez tout public. L’émotion et la pensée se combinent mal. Les gens sont encore traumatisés. Un chien d’assaut du Raid a été abattu par les terroristes en ce mercredi 18 novembre malgré son gilet pare-balle fourni par les contribuables.

Ceci m’a rappelé ce qu’écrivait Bill Bonner, à froid, cinq ans après les attentats de septembre 2001.

Et pourquoi la Guerre contre la Terreur se poursuit-elle ? Cinq ans se sont écoulés depuis qu’une petite bande de fanatiques a fait s’écrouler les tours du World Trade Center. Depuis, on a dépensé des centaines de milliards de dollars pour protéger la mère-patrie… mais contre quoi, nous demandons-nous ? Depuis 2001, les terroristes ont causé moins de morts sur le sol américain que les réactions allergiques aux cacahuètes. Nous attendons la Guerre contre les Arachides… Mais les dépenses… les recherches… les brutalités… le commerce de la peur continuent. Pourquoi ? Parce que cela convient aux parasites.

Depuis le 11 septembre 2001, selon le journal londonien The Observer, "une industrie très lucrative" est née aux Etats-Unis — protéger la mère-patrie contre les terroristes. On n’avait pas vu un tel racket à la protection depuis le maffieux Lucky Luciano dans le New York des années 1920. Dans tous les états de l’Union, il n’y a peut-être pas assez de terroristes pour remplir une petite prison de campagne, mais cela ne signifie pas qu’il n’y a pas d’argent à faire dans le domaine de la sécurité nationale. En fait, depuis l’aube du XXIème siècle, quasiment la moitié de tous les nouveaux emplois américains sont venus, directement ou indirectement, de deux secteurs en plein essor — l’immobilier et la sécurité. Le premier est une illusion, le second une escroquerie. "Il y a sept ans de cela, on trouvait neuf entreprises ayant des contrats concernant la sécurité nationale [américaine]", rapporte The Observer. "A présent, il y en a 33 890. Depuis 2000, 130 Mds$ de contrats gouvernementaux ont été accordés."

The Observer se demande si tout cet argent a été correctement dépensé. Le journal mentionne un contrat visant à fournir des gilets pare-balles aux chiens dans l’Ohio. Est-ce une dépense qui en valait la peine ? Nous n’en savons rien. Mais nous allons faire une supposition audacieuse : entre aujourd’hui et le jour où il gèlera en Enfer, pas un seul Américain pur jus ne sera sauvé des terroristes par un chien de l’Ohio portant un gilet pare-balles.

Notre chienne française équipée de gilet pare-balle et morte au combat a-t-elle sauvé une vie humaine ? A mon tour de faire une supposition audacieuse, cinq ans plus tard, nous ne saurons probablement rien de l’efficacité notre « pacte de sécurité ». Comment spéculer sur ce qui ne s’est pas produit. En revanche ce pacte nous conduit sûrement vers la faillite. La dette nationale est insupportable par les contribuables. Elle ne sera jamais remboursée, inutile de la creuser encore plus.

Malgré toutes les actions sécuritaires vantées auprès des citoyens par des gouvernements empressés, le terrorisme se porte bien cette année, fait remarquer mon collègue américain de Baltimore, Chris Campbell.

2 000 Nigérians brutalement assassinés en janvier durant deux jours
91 Camerounais tués en un jour en février
137 Yéménites tués dans une seule journée de mars
147 étudiants Keynians sauvagement assassinés en un seul jour en avril
146 Syriens assassinés en une seule journée de juin
162 Irakiens tués en un seul jour en juillet
126 Irakiens tués en trois jours en août
145 Nigérians assassinés en septembre en un seul jour
219 Russes et 102 Turcs assassinés en octobre
43 Beyrouthiens tués la veille de l’attaque parisienne en novembre
132 Parisiens tués en novembre

Et si nous arrêtions de faire ce que nous avons fait durant ces 14 dernières années s’interroge Chris Campbell ? Cela n’a pas marché et rien ne permet de suggérer que cela fonctionnera. Simplement arrêter de faire ce que nous avons fait jusque là : promouvoir militairement des gouvernements à l’étranger; dans notre pays, sacrifier nos libertés sous des prétextes fallacieux, céder au communautarisme et renoncer à appliquer la stricte égalité de droits.

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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