L’Irlande doit encore accomplir de sérieux progrès dans la mise en œuvre de recommandations cruciales formulées à trois reprises depuis mars 2007 par le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption. Les recommandations exhortent le pays d'améliorer les dispositions de son droit pénal applicables aux actes de corruption commis par des personnes physiques ou morales irlandaises dans le cadre de transactions commerciales internationales auxquelles elles étaient parties.
En tant que signataire de laConvention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, l’Irlande fait l’objet d’un suivi systématique par le Groupe de travail de la qualité de sa mise en application des dispositions de la Convention. Le Groupe de travail est constitué des 41 parties à la Convention.
En décembre 2013, le Groupe de travail a demandé instamment à l’Irlande de modifier sans retard son droit pénal en plusieurs points afin de combler trois profondes lacunes dans le mode de traitement de la corruption transnationale. Faute d’avoir donné suite à cette demande, l’Irlande est soumise par le Groupe de travail à un suivi renforcé.
Premièrement, l’Irlande n’a pas tenu compte des recommandations en faveur d’une intégration et d’une harmonisation de ses deux définitions de l’infraction de corruption d’agent public étranger. La première définition, qui figure dans la version modifiée de la Loi de 2001 sur la prévention de la corruption (Prevention of Corruption Act 2001), et la seconde, établie dans la Loi de 2001 sur les infractions (vol et fraude) relevant de la justice pénale [Criminal Justice (Theft and Fraud) Offences Act 2001], sont potentiellement contradictoires et prévoient des peines de prison maximales sensiblement différentes, à savoir 10 ans et 5 ans respectivement.
Deuxièmement, l’Irlande n’a pas donné suite aux recommandations en faveur d’une révision de sa loi sur la responsabilité pénale des personnes morales, l’objectif étant que le pays modernise et codifie cette loi afin qu’elle puisse être concrètement appliquée dans les affaires où un cadre supérieur d’une entreprise se sert d’un subordonné pour commettre un acte de corruption. L’Irlande continue d’invoquer le principe d’« identification » propre à la common law, que le Groupe de travail juge inadapté aux fins du traitement d’un grand nombre de formes de corruption parmi les plus courantes.
Troisièmement, l’Irlande n’a pas tenu compte de la recommandation du Groupe de travail visant à faire en sorte que l’infraction de blanchiment de capitaux définie dans la Loi irlandaise de 2010 sur la justice pénale (blanchiment de capitaux et financement du terrorisme) [Criminal Justice (Money Laundering and Terrorist Financing) Act 2010] s’applique aux personnes morales et physiques irlandaises qui blanchissent le produit de la corruption d’un agent public étranger, même si le droit du pays dans lequel est commis l’acte de corruption ne prévoit pas d’infraction de corruption d’agent public étranger, comme c’est souvent le cas pour les pays qui ne sont pas parties à la Convention.
Il est urgent de mettre en oeuvre les recommandations du Groupe de travail, étant donné en particulier que, depuis la ratification de la Convention par l’Irlande en 2003, pas la moindre affaire de corruption transnationale n’a donné lieu à des poursuites dans le pays. Le 3 octobre 2016, la Ministre de la justice et de l’égalité et Vice-Premier Ministre de l’Irlande a répondu aux lettres qui avaient été envoyées par le Groupe de travail à cette dernière, ainsi qu’à la Directrice du parquet et à la Commissaire de l’An Garda Síochána (la Police nationale irlandaise), au sujet des recommandations de longue date non appliquées. Le Groupe de travail se félicite que le Vice?Premier Ministre l’ait assuré de l’engagement sans réserve de l’Irlande à l’égard de la Convention, et constate que la réforme de la législation progresse. Il demande instamment à l’Irlande de veiller à ce que les recommandations visées soient pleinement mises en œuvre par transposition dans la loi.