12,5 millions de points perdus et plus de 300 000 stagiaires ont été référencés par la Délégation à la Sécurité et la Circulation Routière en 2014. Le stage de récupération de points apparaît comme un dispositif aux intentions louables mais qui se traduisent pourtant mal dans la réalité.
Face aux nombreux manquements des établissements organisant ces stages, le délégué interministériel a décidé de multiplier par cinq les contrôles afin de lutter contre les dérives.
Sur le papier, les stages de récupération de points ont pour principale vocation de réduire les risques d’accidents et les mauvais comportements des automobilistes en les sensibilisant aux problématiques de sécurité routière. Cibler tous ceux qui craignent de perdre leur permis pour procéder à une piqûre de rappel des règles de prudence sur la route est a priori une méthode gagnante. L’objectif est de gérer le problème à la source : en s’adressant directement aux usagers de la route qui ont commis des infractions, il s’agit de miser sur la contrainte du stage (coût, se rendre disponible) ainsi que son contenu pour les inciter à ne pas récidiver. Mais dans les faits, qu’en est-il vraiment ?
Des stages décrédibilisés
Outil important dans la lutte contre l’insécurité routière, les stages de récupérations de points et la manière dont ils sont encadrés devraient être irréprochables. Pourtant, ce dispositif n’est pas exempt de critiques.
Premier écueil, les disparités tarifaires constatées pour des stages dont le contenu est a priori identique. Une simple recherche sur le net permet en effet de s’apercevoir que le coût de ces stages varie fortement selon l’établissement et la date choisie (de 280 à…135 euros pour les moins chers). Un grand écart de prix qui donne un sentiment désagréable de consumérisme nuisant à l’image de ces stages. Comment prendre au sérieux un dispositif dont on peut, d’une certaine manière, négocier le prix ? C’est un peu comme si, dans une moindre mesure, on pouvait contester le montant d’une contravention… Impensable.
Deuxième frein : bon nombre d’établissements, pourtant habilités à mener ces stages, les abordent eux-mêmes avec légèreté : enseignements tronqués ou durée de stage réduite ne sont pas rares, de nombreux témoignages abondent dans ce sens. De quoi malheureusement conforter ce ressenti de stages bradés, sans réelle efficacité en termes de prévention routière.
Une simple formalité ?
Autre aspect qui renforce cette impression, l’absence d’évolution des contenus : un usager qui ferait un stage chaque année comme le permet la loi recevra toujours le même enseignement. L’utilisateur peut donc racheter ses points pour se racheter une conduite, chaque année, sans que le précédent stage n’ait porté ses fruits pour autant. Le stage de récupération de points se transforme alors en simple formalité, dont le conducteur s’affranchit sans pour autant remettre en cause son comportement sur la route.
Enfin, tout cela est sans oublier l’absence totale de ciblage de ces stages et le bilan affiché est plus que mitigé. Il faudrait, par exemple, adapter le contenu des stages en fonction des principales infractions qui ont entraîné la perte de points, pour plus d’efficacité. Cela n’empêcherait pas, par ailleurs, de conserver un tronc commun de formation puisque les stages de récupérations de points durent deux jours.
Les pistes d’amélioration
Les annonces gouvernementales sur le renforcement du contrôle des stages de récupération de points vont résolument dans le bon sens. Imposer un tarif unique serait également un bon moyen de redonner du crédit au dispositif. Ensuite, il conviendrait de repenser les enseignements dispensés pour éviter de passer à côté de la principale mission de ces stages : corriger les comportements ayant entraîné la perte de points de sorte à ce qu’il n’y ait plus de récidive. Il faut rappeler que l’enjeu n’est pas tant de récupérer des points que de faire diminuer la mortalité sur nos routes. Un objectif aujourd’hui galvaudé quand la seule obligation pour celles et ceux qui se rendent à ces stages est d’être à l’heure et de faire acte de présence.
Aussi, pourquoi ne pas envisager par exemple un volet pratique avec passage sur simulateur de conduite afin de contrebalancer l’aspect très théorique du dispositif ? Pourquoi ne pas faire évoluer le contenu du stage pour les mauvais élèves, habitués du dispositif ? Enfin, pourquoi ne pas instaurer un contrôle afin de s’assurer que les différents messages de prévention ont été compris et assimilés ? Pour l’heure, rien ne permet de mesurer l’efficacité des stages de récupération de points en matière de sécurité routière. Il faut que cela change et vite au vu des derniers chiffres sur la mortalité sur les routes.