Les riches ne sont pas tous des pourris

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Par Bill Bonner Publié le 21 novembre 2019 à 6h46
Ultra Riches Augmentation Argent Fortune
@shutter - © Economie Matin
100 MILLIARDS $La fortune de l'homme le plus riche du monde dépasse les 100 milliards de dollars.

Le système est perverti, et certains en ont plus profité que d’autres… mais est-ce vraiment de leur faute ?

La question sur la table aujourd’hui : comment les riches sont-ils devenus aussi riches ? Par des moyens honnêtes… ou sournois ?

Ont-ils reçu en donnant d’abord, comme Henry Ford, dont les chaînes de montage ont contribué à rendre les automobiles accessibles pour les gens ordinaires ? Ou bien en prenant, comme Hunter Biden, qui a utilisé son carnet d’adresses politiques pour toucher 50 000 $ par mois de la part d’une compagnie énergétique ukrainienne ? Gagnant-gagnant ? Ou gagnant-perdant ?

Ou… ni l’un ni l’autre ?

Science et chance

Car à présent, les charlatans s’en mêlent. Dans le magazine Scientific American, Bruce Boghosian, professeur de mathématiques à l’université Tufts, affirme avoir élaboré un modèle simple de l’économie, basé sur des exercices similaires en physique et en science des matériaux.

Son modèle montre que les flux de capitaux tendent à s’accumuler (les riches deviennent plus riches) de manière purement chaotique et aléatoire. En d’autres termes, cela n’a rien à voir avec ce que les riches font ou pensent ; c’est de la chance pure et simple.

Selon Boghosian, l’intelligence, le travail, l’auto-discipline ou la fourberie ne représentent que 0,3% des résultats. Le reste se produit simplement… comme la collision des particules ou les éclaboussures de peinture.

« La chance joue un rôle bien plus important qu’on le reconnaît habituellement », écrit-il, « de sorte que la vertu communément attribuée à la richesse dans la société moderne – et, de la même manière, le stigmate dont est chargée la pauvreté – est entièrement injustifiée ».

Il a également une solution pour ce qu’il considère comme l’injustice inhérente à une économie de libre-échange : il affirme que seul un mécanisme consciemment établi pour redistribuer la richesse peut compenser cette « tendance naturelle de la richesse à s’écouler des pauvres vers les riches dans une économie de marché ».

Un acte divin ?

Evidemment, si la distribution de richesse était vraiment un acte divin, l’idée d’« injustice » ne serait pas franchement appropriée. L’hydrogène et l’oxygène se combinent pour former de l’eau ; l’hélium doit-il se sentir rejeté ? L’Amazone reçoit plus de pluie que le Sahara ; le désert doit-il exiger une redistribution ?

Mais s’il était vrai que les riches deviennent toujours plus riches, les vieilles fortunes deviendraient simplement de plus en plus vieilles.

Au lieu de cela, les costumes Saville Row des vieilles fortunes s’éliment de plus en plus… tandis que les nouveaux venus portent des jeans et des t-shirts signés de grands couturiers. La destruction créative du capitalisme détruit les vieilles fortunes et en créée de nouvelles.

Et s’il était vrai que ce que vous faites ou pensez n’importe pas (puisque la richesse est distribuée aléatoirement), vos enfants n’auraient pas besoin d’aller à l’école… et vous n’auriez pas besoin de travailler.

Un sou ne serait pas un sou… ce serait un truc tombé du ciel dans votre poche. L’avenir n’appartiendrait pas à ceux qui se lèvent tôt… ce serait donc grasse matinée pour tout le monde.

Un terrifiant accès de bon sens

« Ils gagnent de l’argent en dormant » : c’est ainsi que François Mitterrand décrivait les capitalistes. Il n’avait pas tout à fait tort. Mais pendant qu’ils dorment, leur argent travaille pour eux. Et parfois, ils ont de l’aide.

Les gens qui ont acheté des actions il y a sept ans, par exemple, n’avaient aucun moyen de savoir si elles allaient grimper ou baisser. Il s’avère que leur valeur a plus ou moins doublé. Leur argent travaillait dur, n’est-ce pas ?

Pas exactement. C’est l’argent de la Réserve fédérale qui a fait le plus gros. Le QE – quantitative easing, assouplissement quantitatif – a injecté près de 4 000 Mds$ supplémentaires dans les marchés. Tout cette liquidité ne pouvait que faire grimper les prix des actions et des obligations.

Ensuite, cinq ans plus tard, les gouverneurs de la Fed ont été victimes d’un soudain et terrifiant accès de bon sens. Ils ont décidé qu’ils feraient mieux de revenir à des taux et une politique monétaire « normaux ». Ils ont donc commencé à laisser mûrir et expirer les obligations acquises lors du QE – une opération appelée QT, quantitative tightening, resserrement quantitatif.

Telle est la politique dont Donald Trump continue de se plaindre. Au lieu d’augmenter la masse monétaire, ils la réduisaient. Cela signifiait qu’au lieu de faire grimper les marches actions et obligataires, ils laissaient les liquidités s’évacuer.

Un camion de bière

Nous en avons subi les effets l’an dernier à la même époque. Les marchés ont chuté… et un « pivot » paniqué s’est produit en décembre 2018. A partir de là, la Fed a abandonné toute idée d’en revenir à des politiques « normales ».

Depuis, elle s’est remise à réduire les taux plutôt que les augmenter – et à remplir les verres des ivrognes au bar plutôt que les vider. L’économiste Richard Duncan nous en dit plus :

« Entre le 28 août et le 6 novembre [de cette année], la Fed a créé 280 Mds$ et les a injectés dans les marchés financiers grâce à une combinaison d’accords de rachats [repo] et d’assouplissement quantitatif. Par ailleurs, la Fed a annoncé qu’elle continuerait à créer 60 Mds$ par mois au moins jusqu’au deuxième trimestre de l’année prochaine. »

Ainsi, en quelques mois seulement, la Fed est passée de la destruction de 50 Mds$ par mois grâce au resserrement quantitatif à la création de 60 Mds$ par mois grâce à un nouveau round d’assouplissement quantitatif, le QE4.

Cela a bien entendu fait grimper les marchés boursiers… et rendu les riches encore plus riches. C’est comme si vous vendiez le contenu de votre maison… et qu’un employé gouvernemental venait faire monter les enchères. Vous pourriez obtenir le double de ce que vous attendiez. De la chance ? Oui. Un accident ? Pas exactement.

Tout de même, pourquoi en vouloir aux riches ? Le système est corrompu… mais ce n’est pas forcément le cas de ses bénéficiaires. Ils étaient principalement innocents… comme des badauds tombant sur un camion de bière renversé, plutôt que comme le bandit ayant braqué le camionneur.

Enfin, quelques-uns parmi eux découvrent comment remettre le camion de bière sur la route : ce sont eux, s’ils ont de la chance, qui deviennent les plus riches de tous.

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Fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information financières pour les investisseurs particuliers.

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