La remise en cause évoquée à deux ou trois reprises par notre nouveau ministre de l'économie, a fait resurgir du bois les défenseurs des 35 heures.
La durée légale du travail est passée de 39 à 35 heures après les lois Aubry de 1998 et 2000. Le sujet a récemment refait polémique, quand le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron a plaidé pour plus de souplesse.
En premier, c'est Cécile Duflot sur RTL qui a démarré les attaques et selon ses termes :
Ces gens, Emmanuel Macron et les économistes, ne comprennent pas ce qui se passe. Il y a une erreur d'analyse. Il faut travailler à un autre système. Il faut inventer un nouveau modèle qui permet de créer des emplois à bas coût".
"Assouplir les 35 heures, ça ne permet pas de faire baisser le chômage (...)."
"Le chômage a augmenté sous tout le quinquennat précédent. On se précipite sur des solutions à court terme".
C'est au tour de Thierry Le Paon, impliqué depuis dans des affaires personnelles immobilières, qui a réagit sur la même question sur France info :
Je suis opposé à toute remise en cause des 35 heures et du Code du travail et j'entends rappeler au nouveau ministre de l'Économie Emmanuel Macron, mon refus d'"une feuille de route" écrite par le Medef. "On est en train de remettre sur la table une vieille idée de la part du patronat pour ne plus payer des heures supplémentaires et enlever des jours de RTT".
Le secrétaire général de la CGT prévient également que la remise en cause "systématique" du Code du travail aura des conséquences "dans les semaines et mois à venir"
Interrogé sur Europe 1, Laurent Berger, le Secrétaire général de la CFDT s'est dit contre "les entreprises qui dérogent aux 35 heures" et dit "non" à la remise en cause de cet acquis social.
Mais c'est la numéro 2 de la CFDT, Véronique Descaq qui a été la plus catégorique en sortant ses griffes pour protéger certaines avancées sociales en déclarant :
La CFDT est contre la remise en cause globale. Les trente-cinq heures n'ont pas détruit d'emplois, au contraire, elles en ont créés. J'ai négocié à l'époque l'accord des Banques populaires où je travaillais. Un accord triplement gagnant : les patrons ont obtenu davantage de flexibilité, les salariés travaillent moins et des emplois ont été créés.
Autre réponse faite à Emmanuel Macron, par le Syndicat UNSA représenté par son Secrétaire général ; Luc Bérille qui annonce : L'horaire légal à 35 heures est une référence qu'il est hors de question de remettre en cause. « Des sujets aussi importants et sensibles que le temps de travail ou les rémunérations valent autre chose que des propos à l'emporte-pièce »
Mais c'est certainement la députée PS Barbara Romagnan qui a été de loin, en étant la plus prolixe et conservatrice sur ce sujet, en narrant les conclusions du groupe socialiste, ayant travaillé sur le rapport de la commission d'enquête sur l'impact social, sociétal, économique et financier de la réduction du temps de travail formé à l'initiative du groupe UDI.
Selon ses termes:
Le passage aux 35 heures a été "la politique la plus efficace et la moins coûteuse qui ait été conduite depuis les années 1970". Elles ont "permis qu'entre 1998 et 2001 l'économie française crée plus d'emplois que jamais auparavant dans son histoire, et plus d'emplois par point de croissance annuelle que dans les périodes précédentes et suivantes", insiste la députée. Je plaide pour de nouvelles mesures de réduction du temps de travail.
"Les lois Aubry ont créé 350 000 emplois et ainsi contribué à réduire le chômage", selon le rapport, qui cite une évaluation de l'Insee. Elles ont "permis qu'entre 1998 et 2001 l'économie française crée plus d'emplois que jamais auparavant dans son histoire, et plus d'emplois par point de croissance annuelle que dans les périodes précédentes et suivantes", insiste la députée.
Par ailleurs, les lois Aubry "ont coûté, par an, 2 milliards d'euros aux entreprises et 2,5 milliards d'euros aux administrations publiques, soit un peu plus de 12 800 euros par emploi créé", évalue le rapport. Les 35 heures apparaissent ainsi, pour Madame Romagnan, "moins coûteuses pour les finances publiques" que "d'autres politiques publiques mises en œuvre pour stimuler l'emploi" et "notamment celles qui reposent sur des baisses de cotisations sociales sans condition".
Elle a rajouté par ailleurs que la réduction du temps de travail reste "une solution" face à la crise actuelle. "Il faut envisager la poursuite de la tendance historique de réduction du temps de travail", écrit-elle. Mais, selon elle, il ne faut plus penser ce type de mesures sur une base quotidienne ou hebdomadaire, comme pour les lois Aubry. Plutôt que les 32 heures, la députée défend "une espèce de compte épargne temps dans lequel on puisse mettre des jours pour les utiliser à d'autres moments de sa vie".
Le rapport établit aussi d'autres éléments apportant de l'eau au moulin favorables aux 35 heures tels que :
- En France, la durée moyenne hebdomadaire pour l'ensemble du salariat à temps complet est de 39,5 heures
- Pour les cadres, l'horaire hebdomadaire est passé de 42,6 h en 2003 à 44,1 h en 2011.
- En faisant sauter la durée légale du temps de travail, on baisse les salaires.
- En supprimant la référence aux 35h, le patronat veut obtenir la suppression des obligations de majoration pour les heures supplémentaires.
- La baisse du temps de travail s'est accompagnée d'une hausse de la productivité.
- Si le patronat souhaite faire travailler plus les salariés, qu'il s'attaque aux temps partiels...
Les réactions contre la modification des 35 heures ne sont pas arrêtées à celles citées. Mais devant cette avalanche d'annonces vantant toutes les avantages de cet horaire, permettez-moi de donner un point de vue divergent, découlant de ma position de recruteur et d'une analyse de plus de dix années.
En premier, puisque cet horaire est si mirifique pour notre nation, pourquoi les déficits, la dette, le chômage n'ont pas arrêté d'augmenter ? Pourquoi les autres pays d'Europe n'ont pas suivi notre exemple si merveilleux ? Aucun n'est à 35 heures, aucun n'a opté pour une retraite à 60 ans (hommes), en France depuis 1982 !
En 2000, notre PIB était déjà trop bas de 17% avec 39h/Semaine pour que la France soit en équilibre. Le PIB étant proportionnel aux heures travaillées, il nous manquait donc déjà 17% d'heures travaillées. Avec 35 heures nous sommes passés à moins 20%.
Dans le recrutement, nous avons eu 35% de moins d'embauches en 2001, moins 20% en 2002, moins 15% en 2003 et encore moins 10% en 2004.
Pour essayer de remonter leur marge, pendant les 5 ans qui ont suivi, les entreprises n'ont pas plus augmenté les salaires que pendant la seule année 2000.
Il faut noter aussi que les emplois créés pour la mise en place des 35 heures, l'ont été au prix d'une débauche financière sans précédent. C'est 22 milliards d'euros d'exonérations de charges sociales accordées chaque année aux entreprises pour «compenser» le passage de 39 heures à 35 heures sans perte de salaire. C'est le véritable boulet des 35 heures! Il représente, grosso modo, l'équivalent du budget annuel de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. On peut aussi y ajouter le forfait financier incitatif d'environs 600 euros par emploi créé. Pour exemple, la seule société EDF a reçu une aide à l'embauche de 91 millions d'euros (600 millions de francs de l'époque) pour 15.000 emplois supplémentaires, des jeunes travaillant 32 heures semaine.
Démonstration de l'échec de la diminution du travail à 35 heures semaine :
Disons qu'avec 39 heures, il y avait 1000 heures travaillées et 10% de chômeurs.
Avec 35h, il devrait avoir 1000h travaillées en incorporant les 10% de chômeurs (partage du travail). Mais en réalité il n'y a eu que 1% d'embauchés. C'est à dire que le nombre d'heures travaillées a diminué de 9%. D'où un prix de l'heure fortement majoré pour les entreprises et une autre augmentation de celui-ci par le prix d'investissement plus haut de 3 à 13% suivant que les entreprises travaillent en journée, 3x8 ou feux continus.
Un seul gain : la productivité horaire. Nous étions dans les tous premiers en 2008, mais 23ème sur une année (pas assez d'heures travaillées) Ce n'est pas suffisant d'être performant sur une heure si nous travaillons moins que les autres.
1 heure à 100%, contre 1 heure à 90%
35 heures x 100 = 3500
contre
40 heures à 90 = 3600
La moyenne conventionnelle de l'Europe est à 38,6 heures semaine, contre nos 35 heures.
Mais si nous nous comparons sur le mois, l'année et surtout la durée de vie, nous sommes complètement dépassés.
Sur l'année la moyenne travaillée au sein de l'OCDE est de 1776 heures, l'Europe à 1712, la France est à 1573 heures.
Sur la durée de vie, c'est encore pire puisque c'est en France que l'on travaille le moins de tous les pays, en grande partie à cause de nos départs à 60 ans (nous sommes les seuls à avoir eu une retraite à 60 ans, vers 62 ans en 2017).
Autre chiffre souvent annoncé pour vanter le fait que malgré que nous soyons à 35 heures, l'horaire réel travaillé serait de 39,5 heures semaine. Cela ne semble pas du tout correspondre à la réalité.
Si nous prenons toutes les heures supplémentaires payées sur environs 9 à 10 millions de salariés, nous arrivons à une moyenne travaillée/payée de 36,2 heures semaine. Alors qu'au niveau des comptes financiers, c'est bien les heures payées, les seules qui génèrent des prélèvements, des impôts, de la consommation, etc...
C'est comme tous les cadres et assimilés qui sont donnés à 44,1 heures semaine. Une étude plus réaliste les donnent à 52,5 heures semaine (estimées, car très difficile à évaluer). Ils ont certainement dû en partie, rattraper la baisse des horaires salariés base 35 heures.
Par rapport aux 40 heures (le meilleur horaire programmable), les 35 heures nous ont fait perdre par année :
- 60 Milliards de salaires
- 35 Mds de charges
- 6 Milliards d'impôts
- 11 Milliards de TVA
Pour les entreprises, une perte de 3 à 13% de marge.
Pour les banques, plus de 10% d'encours bancaires.
Alors les 35 heures, les 32 heures annoncées génératrices d'emplois ? Cela se saurait comme il est dit dans les chaumières !
Travailler + pour gagner +, (en 2002) Travailler + pour dépenser mieux, (en 2010) contre Travailler Moins pour plus de farniente, de dettes, de déficit, de chômage...CHOISISSONS !