Europacity : les commerçants ont-ils raison de s’inquiéter ?

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Par Rédacteur Modifié le 27 septembre 2018 à 16h10
Europacity
© Ceetrus
10 00010 000 personnes devraient être employées au sein d'Europacity.

Le gigantesque chantier d’Europacity, qui doit émerger dans le Val-d’Oise d’ici 2024, inquiète les associations de commerçants des départements voisins, notamment en Seine–Saint-Denis. Beaucoup craignent la concurrence que ce projet pourrait leur faire subir. Mais leurs craintes sont-elles fondées ?

Dans les départements du nord de Paris, la fronde anti-Europacity s’organise, hétérogène. Derrière le traditionnel cortège des associations écologistes et altermondialistes qui dénoncent un projet coûteux et inutile, les associations de commerçants se mobilisent.

Ce 27 septembre, le collectif « Europas du tout » organise son premier rassemblement à Aulnay-sous-Bois. Des discours, des animations et des distributions de tracts sont prévus pour interpeller et convaincre les habitants de la ville de s’opposer au projet. Plusieurs intervenants sont attendus, comme Francis Palombi, président de la Confédération des commerçants de France, Jean-Pierre Lehmann, président de la Fédération nationale des centres-villes ou encore Monique Rubin, présidente de la Fédération nationale des syndicats des Marchés de France. Et en « guest star », le maire d’Aulnay-sous-Bois, Bruno Beschizza, prendra la parole. Depuis plusieurs mois, l’élu des Républicains est devenu le porte-parole de la lutte qui s’organise contre ce colossal projet d’aménagement du territoire : plusieurs dizaines d’hectares transformés d’ici 2027 en hôtels, galeries marchandes, fermes urbaines, centres culturels, musées, restaurants, espaces verts…

Europacity, une chance ou une menace pour les petits commerces ?

En 2016, La Chambre de commerce d’Ile-de-France (CCI) publiait une étude sur la perception des commerçants du Val-d’Oise et de la Seine–Saint-Denis à propos d’Europacity. Et effectivement, c’est plutôt la crainte qui l’emporte parmi les 441 professionnels interrogés : 51 % d’entre eux estimaient que le projet allait « impacter négativement » le commerce à proximité. Une inquiétude plus forte dans le Val-d’Oise (60 %), qu’en Seine–Saint-Denis (41 %). Certains sondés redoutent même un impact « très négatif », 31 % dans le Val-d’Oise et 24 % en Seine–Saint-Denis.

Mais ces craintes sont-elles fondées ?

D’un point de vue micro-économique, il est vrai que les commerces de proximité sont à la peine dans les villes de Seine–Saint-Denis et du Val d’Oise, et ce depuis de très nombreuses années. Une difficulté qui rappelle celles auxquelles sont confrontés les centres-villes de bon nombre de communes en province. Le taux de vacance commerciale, c’est-à-dire la part des magasins qui sont sans activité, vient d’atteindre un niveau inégalé de 11,7 % sur le territoire national. En 2012, la proportion n’était que de 7,2 %. « La dévitalisation du commerce urbain se répand à bas bruit, mais de façon implacable » écrivait le Journal Le Monde dans son éditorial du 8 décembre dernier.

Mais les difficultés de la « France périphérique » décrites par le Géographe Christophe Guilluy sont bien différentes de celles rencontrées par la banlieue du nord de la capitale. Alors que la première se dépeuple et manque de jeunes actifs, la seconde est une bombe démographique : le Val d’Oise a gagné 44 000 habitants en 5 ans, la Seine–Saint-Denis, 70 000.

Une densité de la population qui ne compense pas les faibles revenus et le fort taux de chômage. Résultat, un pouvoir d’achat réduit, des classes moyennes quasiment absentes et des marges de plus en plus faibles pour les commerçants de Gonesse, d’Aulnay-sous-Bois…

Les villes limitrophes d’Europacity pourraient donc bien profiter du gigantesque projet. La « ville nouvelle », qui doit être bâtie d’ici 2024, représentera la création de près de 10 000 emplois et les retombées sur la zone pourraient bien être colossales : 900 millions d’euros annuels supplémentaires sont attendus dans le PIB des 22 communes les plus proches. Une croissance et la création de milliers d’emplois qui augmenteront le pouvoir d’achat moyen des ménages de toute la région. Et, mécaniquement, devraient doper le chiffre d’affaires des commerces alentour.

Europacity ne risque pas d’asphyxier économiquement les zones urbaines qui jouxtent le triangle de Gonesse, mais au contraire, sera probablement le réceptacle d’un flux de richesses qui débordera sur les villes limitrophes. Les différents projets d’aménagement du territoire autour de la capitale ont systématiquement conduit à une élévation du niveau de vie de toutes les communes avoisinantes, comme le quartier de la Défense à l’ouest de Paris, ou Disneyland à l’est. Le projet Europacity pourrait bien être une rampe de lancement pour le développement économique des départements du nord de l’île de France.

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