La loi sur Hong Kong ratifiée par le Président Trump est un « caillou dans la chaussure » des relations sino-américaines ; mais probablement pas une raison de rupture. La Fed paraît avancer dans la revue de ses pratiques de politique monétaire. Le message est important pour les marchés et aussi… pour la BCE !
Les marchés financiers internationaux s’interrogent sur l’impact de l’initiative américaine concernant Hong Kong. Cela va-t-il entraver (remettre en cause ?) le processus devant mener à l’accord commercial avec la Chine ?
Le Président Trump a donc promulgué la loi qui impose au département d’Etat (le ministère américain des Affaires Etrangères) une revue annuelle des relations entre Hong Kong et la République Populaire de Chine. Celles-ci restent-elles fidèles au principe « un pays, deux systèmes », qui garantit à la Région Administrative Spéciale un système juridique indépendant et les libertés publiques ?
Mettons en avant trois éléments de contexte, avant de tenter de répondre à la question du « sort » réservé aux négociations en cours. Premièrement, la Maison Blanche n’avait guère de choix. La proposition de loi avait été voté quasiment à l’unanimité par les deux Chambres du Congrès. Tout véto du Président aurait été contrecarré par les parlementaires. « Jouer la montre » n’est pas apparu comme une option actionnable. Sans doute pour ne pas être critiqué par l’opinion publique et peut-être aussi pour maintenir une nécessaire proximité avec les élus du Parti républicain.
Deuxièmement, il faut se souvenir que tout au long des années 90, les Etats-Unis vérifiaient sur une base annuelle la conformité de la politique chinoise avec les règles de la « nation la plus favorisée » ; et ceci suite au massacre de la place Tiananmen. Cela n’a pas empêché la Chine de rejoindre l’Organisation Mondiale du Commerce au début de la décennie suivante.
Troisièmement, cette loi sur Hong Kong n’est pas le premier « affront américain » subi par la Chine au cours de la période récente. On peut rappeler l’arrestation, à la demande de Washington, de la directrice financière de Huawei par la police canadienne, ou plus récemment la mise au ban des relations d’affaires avec les Etats-Unis d’une vingtaine de sociétés chinoises, au titre de mauvais comportements en matière de droits de l’homme. Bien sûr, il y a une question de degré entre la première « affaire » et les deux autres.
L’hypothèse à privilégier est probablement que les officiels chinois vont faire la part des choses entre la diplomatie économique et la diplomatie politique. Sur ce premier front et dans le but de protéger le rythme de sa croissance économique, Pékin a besoin de « calmer » le jeu avec les Washington. Ainsi, à qui va-t-on acheter le porc dont le pays a besoin, si ce n’est d’abord aux Etats-Unis ? Sur le second, il sera aisé de trouver les motifs pour donner quelques « coups de canif » qui seront davantage des marques de mauvaise humeur que l’expression d’une volonté de dramatiser la relation.
Restons sur les sujets politiques et passons à l’Europe. C’est ce week-end qu’on saura quelle orientation politique le SPD allemand se donne : une direction plutôt de centre-gauche et donc le maintien dans la coalition de gouvernement avec la CDU/CSU ou un leadership plus à gauche et la décision de quitter le Cabinet ? Le premier tour des élections par les militants sociaux-démocrates s’était conclu par un résultat serré, mais un peu en faveur des premiers. Disons qu’à l’heure actuelle prendre le risque de déclencher, directement ou indirectement, des élections générales n’apparait pas une bonne idée. Le SPD, comme d’ailleurs la Démocratie Chrétienne, serait sanctionné par l’électorat.
Au Royaume-Uni, à moins de deux semaines des élections générales, la perspective est à une victoire des Conservateurs, qui disposeraient d’une majorité aux Communes. Le pays serait alors en situation de quitter l’UE au 31 janvier 2020. La question deviendra alors celle des relations demain entre les deux. Le point de départ est la déclaration politique, revisitée le 17 octobre dernier. L’ambition est de créer une zone de libre échange pour les marchandises (pas de droits de douane et de quotas). En ce qui concerne les services, la référence, qui serait un minimum, est les récents accords signés par l’UE avec le Canada ou le Japon. L’ambition de Boris Johnson est que tout soit réglé à la fin de 2020. Mais comment aller aussi vite, si la volonté de Londres est de s’éloigner des règles de l’UE ? Et quid du « chiffon rouge » de la fin de la libre circulation des citoyens de l’Union au RU ? En fait, si le Premier ministre Johnson veut aller vite, il doit accepter de ne pas modifier de trop le cadre des relations avec le Continent. A lui de savoir hiérarchiser ses priorités !
Parlons politique monétaire. On sait que la BCE vient de lancer une revue stratégique de ses pratiques. On se souvient peut-être que la Fed américaine s’était lancée dans un exercice similaire il-y-a déjà quelques mois de cela. Lael Brainard, l’un des gouverneurs du Board à Washington, a fait état de là où en étaient les réflexions, au moins de son point de vue. Mettons en avant les points suivants :
- l’objectif d’inflation (2% ; il ne serait donc pas revu) doit être atteint en moyenne sur le cycle ou sur plusieurs années ;
- quand le taux directeur a atteint sa limite inférieure effective (il faut sans doute comprendre le niveau de 0), alors un plafond doit être introduit sur la courbe des taux. On imagine que les outils utilisés seraient la communication et les achats d’actifs (titres d’Etat de différentes maturités) ;
- Le réglage resterait en place jusqu’à un certain temps après l’atteinte du double objectif de plein emploi et d’inflation de 2% (plus d’un an ?). La forward guidance (guidage prospectif) serait donc explicite.
Deux commentaires sont sans doute à faire. D’abord, l’élément nouveau est le plafond sur la courbe des taux ; un peu à la japonaise. Ensuite, la Fed s’inscrirait dans une logique de temps long. Il faut sans doute comprendre que les taux d’intérêt resteraient bas… pour longtemps.