Peu répandue, l’assurance-vie à fonds dédiés fermés recèle bien des avantages. Au premier rang desquels la liberté quasi-totale de choisir les actifs que vous voulez y mettre…voire, dans sa version luxembourgeoise, d’y apporter des actifs que vous possédez déjà ! Au moment où les fonds en euros vacillent, il est temps de s’y intéresser, surtout dans leur variante luxembourgeoise.
A la fin du printemps dernier, la Haute juridiction a rendu un très intéressant arrêt (Cour de cassation, 19 mai 2016, n°15-13.606). Signe de l’importance accordée à cette jurisprudence, elle a été publiée au Bulletin de la Cour. Les juges ont clairement validé les contrats à fonds dédiés fermés y compris – et je dirais même surtout ! – dans leur modalité luxembourgeoise.
Cet arrêt concernait un épargnant qui avait souscrit un tel contrat mais l’avait bien malheureusement chargé de titres émis par cet ancien plombier du Queens, le désormais célébrissime Madoff. Fort logiquement, afin de s’en sortir sans trop de casse, il tentait de demander l’annulation du contrat. Saisissant cette occasion, la Cour de cassation a rendu un arrêt particulièrement riche et détaillé, au point de servir de guide pour tout projet identique de placement – titres Madoff en moins évidemment !
Placer à fonds dédiés fermés, pourquoi ?
Jusqu’à une époque pas si lointaine, l’épargnant qui versait une prime dans son contrat, et qui voulait gérer au mieux son risque, cochait simplement la case “100% fonds euros”. Il encaissait régulièrement des produits de 6% à 8% par an, et ma foi sans trop se poser de questions. Le circuit était bien rôdé : votre argent partait sur le fonds général de la compagnie d’assurance-vie qui souscrivait de la dette souveraine, souvent des obligations assimilables du Trésor (OAT) émise par l’Etat français. Bien sûr, c’était “le tonneau des Danaïdes” mais ça rapportait bien. Las, ce temps est révolu !
La dette souveraine n’est plus ce qu’elle était – certains Etats font défaut, style la Grèce, mais c’est surtout la baisse de rémunération qui inquiète et vous oblige à revoir toute la stratégie. Certes, votre bancassureur vous proposera des unités de compte (UC) présentant des profils plus ou moins dynamiques (je traduis : risqués) dont la contrepartie est constituée d’OPCVM (SICAV, FCP). Mais c’est littéralement un chèque en blanc que vous signez ! Pire encore, et je l’ai testé personnellement, vous aurez le plus grand mal à obtenir de certains réseaux la composition ligne par ligne du portefeuille de l’OPCVM !
Monétisation fiduciaire vs. réification : monnaie ou tangible, qui gagnera le match ?
Lorsque vous vendez un bien réel (ex. un immeuble), que vous le replacez en assurance-vie et que l’assureur souscrit notamment des bons du Trésor, il procède finalement pour votre compte à une “monétisation fiduciaire” sous la forme de l’agrégat M4. Pour vous, de la pierre devient une créance chez votre assureur. Mais si vous souscrivez un contrat d’assurance-vie à fonds dédiés fermés, la monnaie qui sert à payer la prime peut se voir réinvestie dans des actifs tangibles et bien réels. Ainsi la monétisation de vos actifs n’aura été que transitoire avant que n’intervienne à nouveau la “réification” de cette épargne mieux investie.
La question mérite d’être posée car investir en OAT via l’assurance-vie, c’est l’assurance d’un rendement quasi-nul et qui ne permet même plus de payer l’Impôt sur la fortune (ISF), en particulier pour les assujettis à la tranche la plus haute (1,50%). Et même si d’aventure les taux remontent, le fonds général de la compagnie sera englué pour longtemps avec des titres publics sous-rémunérateurs. Par opposition, quand on regarde la création de valeur opérée par des classes d’actifs reposant sur des biens réels tel un immeuble ou bien certaines actions aux performances séculaires, par exemple Air Liquide – +11,9% par an sur les 20 dernières années – ou encore Coca-Cola – +6,25% depuis 1919 – , cela balaye bien des certitudes que nous tenions pour acquises depuis des lustres.
Ainsi, la technique des fonds dédiés vous permet notamment de faire directement figurer dans votre contrat ce que l’on appelle des “titres vifs” – c’est-à-dire les titres cotés en bourse et non via des OPCVM. L’avantage est double : vous pouvez choisir les valeurs que vous voulez y mettre tout en bénéficiant des avantages fiscaux de l’assurance-vie (plus-values exonérées, peu ou pas de droits de mutation à titre gratuit) et civils, avec en particulier la marge de manoeuvre supplémentaire pour s’affranchir de la réserve héréditaire aux articles 912 et 913 du Code civil. Bref, l’assurance-vie à fonds dédiés fermés c’est, pour les valeurs mobilières, un PEA à la puissance 3 !
Vous ne trouverez pas ces contrats auprès de votre conseiller financier en agence bancaire. Les réseaux classiques de la bancassurance les réservent à une clientèle exigeante et disposée à investir au minimum 100 000 euros d’un coup via leur canal “banque privée” ; voire pour des raisons de souplesse juridique (et non de fraude fiscale !) via une filiale banque privée de droit luxembourgeois. Cette “haute couture sur mesure” est également disponible auprès de certains conseillers en gestion de patrimoine (CGP).
L’assurance-vie à fonds dédiés fermés à la française : un potentiel mais des limites…
En droit français, la première limitation se traduit par une obligation d’alimenter votre contrat uniquement par du numéraire et non des actifs en nature (article L.113-2 du Code des assurances). Est exclue toute possibilité d’apport de biens voire de dation en paiement. Il faut d’abord verser du liquide, puis l’assureur-vie délivre des UC représentatives du portefeuille de titres librement composé par vous.
Mais pour la composition même du portefeuille, vous avez l’embarras du choix. Sous réserve que l’investissement soit localisé dans un pays de l’OCDE, vous pouvez mettre des obligations de société commerciales, des titres de capital sur opération de titrisation, des titres participatifs, toutes valeurs mobilières (ex. actions de mines d’or, etc.) négociées sur un marché règlementé, des parts de fonds alternatifs, à risque. Côté immobilier, sont éligibles les parts sociales ou actions de société immobilière – y compris des sociétés civiles sous conditions que l’actif au bilan soit exclusivement composé d’immeubles (R.131-1 du Code des assurances combiné avec l’article R.332-2).
Au dénouement du contrat (ex. au décès pour votre bénéficiaire) ou bien lors d’un rachat par vous-même, la compagnie par principe vous versera du numéraire – cela revient à liquider le portefeuille, sauf rares exceptions.
Cap vers le Luxembourg, le pays où tout devient possible !
L’avantage d’un contrat luxembourgeois est très simple : toutes les rigidités françaises “sautent” comme un bouchon de champagne ! Vous pourrez même acquitter vos primes avec des actifs vous appartenant déjà. L’apport de titres est possible. L’éventail est encore plus large et surtout la sortie est aussi possible sous forme de titres qu’ils soient négociables ou non sur un marché règlementé ! En un mot : la liberté absolue.
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