Chamboulé par la crise économique actuelle, le marché de l’énergie est tourmenté. La consommation d’électricité en France a baissé d'environ 15 % en quelques jours. Le gaz, quant à lui, enregistre une baisse de consommation de 8 % sur les quatre premiers mois de l’année, par rapport à 2019. Le confinement avec la fermeture simultanée de la quasi-totalité des entreprises dans le pays a créé une situation inédite qui fait plonger les prix de marché de gros de l’énergie. Un coup de frein brutal qui fait craindre la fragilisation de certains fournisseurs d'électricité et de gaz en Europe.
Le Conseil d’Etat vient d’ailleurs de rejeter la demande de certains fournisseurs d’énergie visant à activer la clause de force majeure pour acheter de l’électricité à un prix en dessous des tarifs indiqués dans leurs contrats d’approvisionnement.
Ce coup de frein représente également une opportunité que les entreprises doivent être en mesure de considérer. On observe rarement une baisse aussi forte des prix sur une période aussi courte. Pour certains industriels s’inscrire dans cette opportunité en souscrivant à de nouveaux contrats peut permettre de gagner jusqu’à plusieurs centaines de milliers d’euros. Elles s’inscriraient ainsi dans la libéralisation du marché et anticiperaient la fin imminente des tarifs règlementés.
Le 26 mars dernier, la Commission de Régulation de l’Energie a publié son rapport trimestriel portant sur l’ouverture des marchés de l’énergie. Cette étude très attendue par les professionnels du secteur illustre l’état des lieux du marché au 31 décembre 2019.
Plus de 25% des Français ont choisi un fournisseur alternatif d’électricité
L’année 2019 a été marquée par une accélération forte de l’ouverture à la concurrence des marchés de l’énergie. Le taux de clients ayant changé de fournisseurs d’énergie en témoigne. Selon le rapport, 3,2% des particuliers ont ainsi changé de fournisseur d’électricité au quatrième trimestre de l’année pour atteindre un taux annuel proche des 12% en hausse de plus de 2% par rapport à 2018. Au 31 décembre, ils étaient plus de 8 millions (25,7%) à avoir quitté EDF pour rejoindre un fournisseur alternatif.
Avec plus de 40 fournisseurs alternatifs, l’offre se diversifie
L’intérêt récent des Français pour leur contrat d’énergie s’est accompagné par l’émergence de nombreux fournisseurs alternatifs. Selon le rapport de la CRE, ils étaient 41 dont une trentaine à proposer leurs services aux clients particuliers. L’offre proposée s’est enrichie afin de s’adapter aux attentes des consommateurs : du pure player digital aux ultras compétitifs, à l’acteur engagé misant sur une production renouvelable et locale. L’arrivée récente sur le marché d’acteurs institutionnels comme Total, ou Leclerc est une nouvelle illustration que le marché se dynamise.
L’ouverture des marchés du gaz naturel reste en avance de phase
Alors qu’elle a suivi un calendrier identique, le rapport de la CRE montre un nouvelle fois que l’ouverture à la concurrence pour la fourniture en gaz naturel a été beaucoup plus rapide. Au 31 décembre, près de 2/3 des Français avait ainsi quitté le tarif réglementé en optant pour une offre de marché. Preuve de cette dynamique, la disparition des tarifs est d’ores et déjà prévu pour 2023.
Covid-19, quel impact pour la fin des tarifs réglementés ?
Le calendrier réglementaire de 2020 sera marqué par la disparition du tarif règlementé pour les entreprises plus de 10 salariés ou avec un CA de plus de 2M€.
Pres de 900 000 sociétés vont devoir rapidement trouver une solution parmi les offres du marché. Un nouveau pas important dans le processus de libéralisation des marchés qui a pourtant été mis au ralenti par la crise du Covid-19.
Malgré une baisse importante des prix du marché de l’énergie, les consommateurs professionnels majoritairement à l’arrêt ont d’autres sujets en tête.
Les fournisseurs alternatifs de leur côté subissent une recrudescence des impayés et sont peu enclins à investir sur un marché des professionnels mis à mal par la crise.
Dans ce contexte exceptionnel, l’accélération de la libéralisation des marchés de l’énergie est donc remise en question.