Comment les Chinois voient les Européens

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Par Dominique Desjeux Publié le 1 avril 2017 à 5h01
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73 %73 % des Chinois estiment que les relations économiques avec l'Europe sont importantes.

En 2005, il y a un peu plus de 10 ans, la Chine n’était encore qu’à la sixième place dans le classement des économies mondiales, juste derrière la France. Aujourd’hui, la Chine se retrouve en première ligne face aux États-Unis. Les Chinois pensent que l’Europe peut jouer un rôle de balance entre les États-Unis et la Chine. Mais comment les Chinois voient-ils les Européens ?

L’Europe, un vieux continent puissant, mais arrogant

Il y a une quinzaine d’années, nous avons réalisé une première enquête qualitative, sur les représentations que les Chinois se faisaient des Européens, suivie depuis par de nombreuses autres enquêtes sur la vie quotidienne des Chinois. À cette époque, nous n’avions pas prévu que pour de nombreux Chinois « tous les Européens avaient les yeux verts » et se ressemblaient, même si, au niveau des stéréotypes, les Allemands se différenciaient par une grande taille, les Anglais par leur côté « aristocratique » et les Français par leur caractère « romantique ». Ce terme renvoie à la fois à tout ce qui touche à l’amour, mais aussi au fait que les Français ne sont pas très travailleurs, d’après les Chinois. C’est une sorte d’art de vivre.

L’Europe, aux yeux des Chinois, était d’abord un vieux continent fait de monuments historiques et de beaux paysages. Bien que la Chine ait une histoire encore plus ancienne que celle de l’Europe, qui, même si beaucoup d’Européens l’ont oublié, n’émerge vraiment sur le plan mondial qu’entre le 16e et le 18e siècle, possède un avantage sur la Chine : elle est à l’origine de la civilisation moderne. Cela lui a permis de dominer le monde. Les Chinois admirent l’Europe parce qu’elle est forte. La Russie, moins puissante dans les années 2000, est moins bien considérée par les Chinois à cette époque. En même temps, ils trouvent les Européens arrogants. Au final, les Chinois de notre enquête sont surtout sensibles à la puissance et aux rapports de force qui fondent l’estime ou le mépris.

Une vision des relations internationales basée sur la réalpolitik

15 ans plus tard, la Chine est redevenue la grande puissance qu’elle était jusqu’en 1820. Elle est en train de reconstruire les deux anciennes routes de la soie, celle du Nord vers l’Europe par la Russie et celle du Sud par la mer via le port du Pirée en Grèce jusqu’à l’Allemagne. La Chine se voit maintenant comme une grande puissance. D’après une enquête de 2010 auprès des Chinois, pour connaître leur opinion sur les relations internationales, 73 % pensent que les relations économiques avec l’Europe sont importantes, contre 54 % avec la Russie, 33 % avec le Japon, mais 86 % avec les États-Unis. Cela veut dire que pour les Chinois la priorité n’est pas de signer des accords politiques multilatéraux, mais de signer des accords bilatéraux sur des bases purement économiques en tenant des intérêts bien compris de chaque pays.

Conclusion

Avant d’être perçue comme une puissance politique, l’Europe est perçue par les Chinois comme un marché économique. Chaque pays a ses spécialités. L’Allemagne vend des voitures de luxe et des machines de qualité. La France est connue pour ses parfums, sa cuisine, son cognac et ses vins. En un mot, les Chinois préfèrent l’art de vivre des Français à leurs machines-outils, même s’ils sont prêts à leur acheter leurs usines nucléaires.

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Dominique Desjeux est anthropologue, professeur émérite à l’université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité et consultant international sur les innovations et la consommation (Chine, Afrique, Brésil, USA, France). Il est l'auteur, entre autres, de Le consommateur malin face à la crise (avec Fabrice Clochard, Éditions L’Harmattan, en 2 tomes, 2013) et de Comment les Chinois voient les Européens (avec Li-Hua Zheng et Anne-Sophie Boisar, Éditions Le Manuscrit, 2013).

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