Un réflexe abusif : c’est toujours de la faute du passé !

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Par Jacques Martineau Publié le 18 octobre 2018 à 6h07
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1 000 MILLIARDS D'EUROSEn 2018, les dépenses publiques vont représenter 45,3% du PIB, dépassant les 1 000 milliards d?euros.

Pour comprendre et expliquer les raisons d’une « crise » sociale, économique et/ou financière, l’exercice est très délicat. Une partie des raisons est aussi liée au contexte international. Suivant les spécificités, les enjeux n’ont pas la même dimension. Face à une « crise chronique », le facteur temps change d’échelle. Les réflexes et les annonces se multiplient, parfois dénudés de tout sens. Les décisions, difficiles à prendre et à mettre en place, doivent surmonter des séries d’obstacles. Les résultats ne souvent pas à la hauteur de ceux espérés.

Les raisons objectives de s’inquiéter

La dette est toujours là. Elle continue à s’accroître, atteignant les 100% du PIB. Quant au déficit, il a du mal à se tenir dans la limite des 3% de l’Union européenne. Les promesses et les bonnes intentions ne suffisent pas pour entamer un réel reflux. En 2018, les dépenses publiques vont représenter 45,3% du PIB, dépassant les 1 000 milliards d’euros ! Il va de soi que les impôts et taxes ne peuvent qu’augmenter pour pallier ces dépenses en 2019 ! C’est pourquoi, faute d’un taux de croissance spectaculaire, supérieur à 2,5%, pendant plusieurs années, les principaux indicateurs économiques resteront dans le rouge (chômage, commerce extérieur, etc.) Sans réduction massive des dépenses de l’Etat, associée à une conjoncture internationale plus favorable, toute amélioration en matière de déficit est exclue.

Convaincre l’opinion de la gravité du problème…

Devant cette situation sociale et économique, il faut montrer à l’opinion par tous les moyens la gravité du problème. Cette cause d’inquiétude est présentée comme le résultat cumulatif de dizaines d’années de dépenses excessives, de vie à crédit au-dessus de ses moyens et/ou d’assistanat permanent. Les politiques au pouvoir, soutenus par leurs experts, vont même jusqu’à remettre en cause le modèle social du pays. La crise, permanente en Europe et dans le monde, illustrée par quelques courbes et quelques chiffres, suffit à conforter leur point de vue, tout en masquant habilement, le cas échéant, de récents dépassements injustifiés qui peuvent être gênants. Le but recherché est simple. Il s’agit d’amener l’opinion publique à prendre conscience de la gravité de la situation. La classe moyenne est visée, cadres et retraités. Perturbés et inquiets, les citoyens dans leur ensemble vont devoir accepter des mesures de rigueur et d’austérité. L’opinion s’inquiète. Elle prend peur, s’interroge et finit par se culpabiliser. Le message passe…

C’est toujours de la faute du passé

Devant l’incapacité de résoudre le problème, la solution de facilité est d’une banalité courante. Elle consiste à rappeler que c’est de la faute du passé. Ce réflexe abusif permet de présenter la situation comme le résultat de l’inconscience des politiques précédentes depuis plusieurs dizaines d’années, trop attentives à satisfaire les besoins sociaux excessifs d’une population passive. La référence à la faute du passé est présente dans tous les discours officiels. Elle devient un slogan, repris en cœur. Les éditorialistes et les médias emboîtent le pas pour accentuer la pression à chaque occasion. Les dirigeants se fondent eux dans un rôle de protecteur et de sauveur de la nation. Ils affirment qu’ils ne sont pas responsables du cumul de ces erreurs. Pour eux, le contexte n’est qu’un simple révélateur de cet ensemble de manquements.

Grâce à cette seule raison, partagée par une majorité de citoyens et reprise par la presse, le pouvoir a les mains libres pour annoncer des réductions de dépenses publiques, pour proposer des augmentations de taxes et d’impôts, pour renforcer ses ressources et pallier ses manques. L’État cherche à se désengager. Tous les artifices comme les vieilles recettes d’augmentation des taxes, sans augmenter les impôts, sont de sortie pour impressionner le citoyen. Le contenu des annonces et le style de communication sont fondamentaux. Il faut persuader que le fait de se serrer la ceinture et d’avaler la pilule devient un acte citoyen méritant. Cette méthode est efficace dans un premier temps. Les dirigeants sont là pour expliquer avec un brin de solennité et pour convaincre en faisant peur et en laissant un goût de culpabilité aux citoyens.

Et pourtant…

Bien entendu, le passé a son importance et on ne peut et on ne doit pas l’ignorer. Il sert de référence, d’expérience au travers des réussites et des échecs. C’est une base de données déterminante qu’il convient de replacer dans le contexte environnant du moment (au sens propre comme au sens figuré).

La crise actuelle de la dette ne peut pas que trouver ses origines dans le passé, le point de vue inverse montre qu’elle est, d’abord et avant tout, due à une politique permanente défaillante.

Nul n’est là pour nier la simple règle : si « les mêmes causes produisent les mêmes effets », il ne faut pas oublier avant d’en tirer les conclusions que « les raisons des causes ne sont pas les mêmes ».

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Après un long parcours scientifique, en France et outre-Atlantique, Jacques Martineau occupe de multiples responsabilités opérationnelles au CEA/DAM. Il devient DRH dans un grand groupe informatique pendant 3 ans, avant de prendre ensuite la tête d'un organisme important de rapprochement recherche-entreprise en liaison avec le CNRS, le CEA et des grands groupes du secteur privé. Fondateur du Club Espace 21, il s'est intéressé aux problèmes de l'emploi avec différents entrepreneurs, industriels, syndicalistes et hommes politiques au plus haut niveau sur la libération de l'accès à l'activité pour tous. Il reçoit les insignes de chevalier de l'Ordre National du Mérite et pour l'ensemble de sa carrière, le ministère de la recherche le fera chevalier de la Légion d'Honneur.

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