Jusqu’ici tout va bien. La demande d’immobilier, du moins dans les grandes villes, ne faiblit pas. Les notaires publient des statistiques liées aux signatures des promesses de vente, démontrant que la tendance, déjà très positive, va continuer sur sa lancée. Tous les professionnels vous disent (comme toujours) que « cette fois-ci, c’est vraiment le moment ! ».
Ceux qui ont acheté il y a longtemps sont confortés dans l’idée qu’ils ont fait une bonne affaire et les acquéreurs récents sont soulagés, sans réaliser, lorsqu’ils sont jeunes, qu’ils auront besoin de s’agrandir un jour et que les m2 supplémentaires coûteront encore plus cher. Mais demain est un autre jour…
Les raisons de la hausse ne manquent pas
L’offre de biens, surtout dans les grandes villes et ses quartiers encore relativement préservés, est inférieure à la demande, la construction ne suivant pas. Des taux d’intérêt sont au plus bas historique, menaçant de remonter, et il faut donc vite se dépêcher d’acheter avant que le crédit ne coûte beaucoup plus cher (sans envisager là aussi que ce qui est économisé sur le prêt immobilier est payé en surcoût dans le prix d’achat).
Des rumeurs anxiogènes sur l’avenir de notre système de retraite encouragent à l’investissement locatif, afin de s’assurer des revenus complémentaires plus tard. Et puis on ne sait jamais, en cas de nouvelle crise de l’euro (« tout le monde en parle »)… Cette fois ce serait vraiment grave, compte tenu des épées de Damoclès accumulées depuis 2011 lorsque la sortie de piste a été évitée de justesse. Sans parler de l’inquiétant creusement du déficit commercial français de mois en mois (et ça, personne n’en parle). Autant acheter des actifs réels.
Le marché immobilier peut-il tenir en cas d’élection d’Emmanuel Macron et de mise en oeuvre de son programme ?
L’ISF est un impôt imbécile, et, contrairement aux apparences, injuste. Il taxe l’épargne accumulée, pourtant constituée à partir de revenus déjà taxés. En fait, il punit la réussite. Un comble lorsque l’on veut encourager l’esprit d’entreprise et la création de richesses et son corolaire, l’emploi. Si l’ISF rapporte environ 5 Mds€ par an en collecte, ce qui n’est pas négligeable, il empêche l’Etat de percevoir de l’ordre de 20 Mds€ de recettes fiscales qui auraient été générées par le maintien en France des quelques 350 Mds€ qui se sont « évaporés » depuis sa mise en place. D’où son surnom révélateur « d’Incitation à Sortir de France ».
Petit problème : cet impôt est populaire, 70% des électeurs considèrent qu’il est juste et qu’il n’est pas question de le supprimer. Il s’agit sans doute d’une des conséquences pratiques du niveau modeste de l’école secondaire française, en économie à l’évidence mais aussi et surtout en mathématique, dans les classements internationaux. Les électeurs préfèrent conserver 5 Mds€ de recettes fiscales, quitte à se priver de 20 autres milliards. Perte nette : 15 Mds€. Comprenne qui pourra. Juste une nouvelle version de l’histoire de Gribouille, qui plongeait dans la rivière pour se protéger de la pluie…
Malgré cette popularité, de façon quasi-suicidaire, un candidat – François Fillon – soutient qu’il faut supprimer cet impôt. Certes à partir d’un raisonnement solide : retenir en France les créateurs de richesse, en attirer de nouveaux, donc contribuer à relancer la création d’emplois, améliorer les recettes fiscales à terme et aussi réduire les dépenses de solidarité, car plus de gens auront un emploi et auront moins besoin d’aides, bref le cercle vertueux expérimenté par nos voisins. Mais nous venons de le voir, c’est inaudible pour l’écrasante majorité des électeurs. Etre élu avec un tel projet fiscal sera de toute façon très difficile. Un autre candidat, Emmanuel Macron, qui au demeurant malgré son jeune âge promène déjà lui aussi un certain nombre de casseroles, a adopté une approche plus subtile, de nature à satisfaire davantage d’électeurs.
Limiter l’assiette de l’ISF aux actifs immobiliers
C’est très intelligent électoralement. L’ISF est maintenu, mais il ne s’applique plus qu’aux actifs non délocalisables. Plus de risque de fuite à l’étranger des entrepreneurs dynamiques et autres créateurs de richesses… chez les autres ! Le nouvel impôt pèsera surtout sur les patrimoines modestes et moyens, en France constitués majoritairement d’immobilier, et exonèrera les très grosses fortunes, essentiellement composées d’actifs financiers. Curieuse approche pour quelqu’un qui dit « venir de la gauche » (ce que la majorité de ses soutiens déclarés confirme d’ailleurs), mais passons… La base électorale de François Fillon, composée de retraités aisés et provinciaux, au patrimoine immobilier pour l’essentiel, appréciera. De toute façon, ce sont des vieux, désormais sans utilité économique, plutôt favorisés financièrement, bénéficiant de rentes, à la sensibilité conservatrice. De surcroît – horreur! – ils sont de culture si ce n’est de pratique catholique, faciles à caricaturer et à ridiculiser, on peut donc allègrement ignorer leurs intérêts et leurs préoccupations, en mettant de son côté les rieurs. Peu importe que leur patrimoine aujourd’hui soit aussi la conséquence d’une vie de labeur, et souvent de sacrifices.
A l’inverse, une partie de la base électorale d’Emmanuel Macron, plutôt jeune, urbaine, et à revenus confortables, mais pas encore fortunée au point d’avoir déjà constitué l’apport initial pour un achat, enrage de ne pouvoir se lancer dans des projets immobiliers du fait des niveaux de prix atteints en France, tout particulièrement dans les grandes villes. Et les nouveaux députés qui seraient élus sous la bannière « En Marche », souvent néophytes en politique, seront à l’image de cette base électorale, jeunes, venant du monde de l’entreprise, sans mandats territoriaux, à rebours de la sociologie traditionnelle de nos parlementaires classiques (fonctionnaires surtout, également élus locaux, donc culturellement attachés à la terre, mais aussi médecins, avocats, grands clients traditionnels de la pierre…).
Ces nouveaux députés, en cas de victoire d’EM, même s’ils ne suffiront peut-être pas à constituer une majorité absolue, formeront en revanche le coeur de cette nouvelle majorité. Ils devraient alors pouvoir imposer leur tempo, au moins pour les principales réformes destinées à baisser le niveau de la dépenses publique en France, victime de trois dérives principales : le coût des retraites (ce n’est pas – pas encore – leur problème), le poids excessif de notre millefeuille territorial (ils ne perdront pas d’indemnités d’élus en cas de simplification), et les politiques du logement, qui poussent les prix à la hausse, à leur grand désespoir. Donc un terrain favorable au vote de mesures déflationnistes pour la pierre…
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