2019 aura été une année exceptionnelle, avec le franchissement de la barre du million de transactions réalisées dans l’immobilier ancien. La confiance des Français dans la pierre semble bel et bien retrouvée, accentuée par l’effet d’aubaine que représentent des taux d’intérêt extrêmement bas. Alors que le gouvernement semble vouloir remettre un peu d’ordre dans les conditions d’octroi des crédits par les banques, cette situation est-elle amenée à durer en 2020 ?
Une remontée des taux d’intérêt très improbable
Il y a fort à parier que les taux d’intérêt, qu’ils soient directeurs ou commerciaux, ne connaîtront pas de remontée significative dans les prochains mois. L’embellie est telle que certains établissements bancaires ont même décidé de se passer de réseaux de distribution intermédiaires, tels que les courtiers, s’obligeant à être plus agressifs pour conquérir de nouveaux clients.
Enfin, les taux d’intérêt qui concernent les crédits immobiliers sont largement inspirés des taux directeurs de la BCE et, dans une moindre mesure, de ceux des OAT (Obligations Assimilables du Trésor). Or, les uns comme les autres restent contraints par des décisions politiques qui visent à éviter une flambée des taux pour limiter le préjudice sur le poids des dettes souveraines. Tout ceci laisse donc penser que les banques seront bien présentes sur le marché du crédit en 2020, à moins que les pouvoirs publics ne s’en mêlent…
Les banques, désormais sous surveillance
Coup sur coup, la Banque de France et le HCSF (Haut Comité à la Stabilité Financière) se sont inquiétés cette année de l’allongement de la durée des crédits, de la baisse des apports dans les dossiers de financement, de l’emballement de la dette du secteur privé et de la fragilisation des bilans bancaires liés à des encours de crédits à taux fixe très bas. Avouons que, posés ainsi, les sujets sont importants et les inquiétudes recevables. Et ce jusqu’à préconiser un durcissement strict du taux d’endettement à 33% des revenus, et une limitation des durées à 25 ans… Sauf qu’à y regarder de plus près, les choses ne sont pas aussi simplistes.
Tout d’abord, l’allongement de la durée initiale des prêts est avant tout une réponse à un contexte, celui de la hausse des prix de l’immobilier. Il ne s’agit donc pas d’une manœuvre des banques pour resolvabiliser des ménages exclus du marché. D’ailleurs, la durée moyenne de détention n’a en réalité que varier dernièrement (22 mois en plus au cours des 2 dernières années) tout en restant largement inférieure à celle observée dans d’autres pays européens.
De la même façon, s’il est vrai que le marché constate une baisse importante du taux d’apport personnel sur les dossiers éligibles, cette situation reflète avant tout les tensions qui s’exercent sur la solvabilité des ménages.
Des apports réduits sans graves conséquences
Cette tension tient à 3 facteurs principaux. Le premier est inhérent aux banques elles-mêmes et à l’attitude plutôt saine des ménages vis-à-vis de leur épargne. Le taux actuel des emprunts, parfois inférieur à celui des placements réalisés, encourage les emprunteurs à augmenter le montant de leur crédit plutôt qu’à aller piocher dans leurs réserves. Sur les profils à faibles risques, les conseillers bancaires n’hésitent d’ailleurs pas à les inciter à suivre cette voie.
Le second facteur réside dans l’accélération des comportements sociaux des ménages. Les familles monoparentales, tout comme celles dites « recomposées », sont en augmentation. La tension actuelle sur les loyers, la faiblesse des offres locatives, le niveau des taux d’intérêt très bas entrainent ces ménages à privilégier un retour rapide à l’accession.
Enfin, dernier facteur impactant : la disparition ou le contingentement réduit des aides dans le montage des dossiers d’accession à la propriété, qui étaient jusqu’alors assimilés à de l’apport personnel.
Des conditions d’octroi de crédit amenées à se durcir
Alors, faut-il craindre un ralentissement dans l’attribution des crédits ? Avant de répondre à cette question, il est important de rappeler que nous venons de vivre plusieurs années exceptionnelles sur le plan de l’immobilier. Si 2020 s’annonce d’ores et déjà comme un excellent millésime, une baisse sensible des transactions est à prévoir, l’année 2019 ayant battu tous les records. Cette baisse, même relative, pourrait déclencher un sentiment d’inquiétude. C’est pourquoi les pouvoirs publics et les banques devront mener une communication adaptée, afin de ne pas faire basculer l’intérêt des ménages pour l’immobilier dans une anxiété paralysante, conjuguée à une période d’élections locales jamais propice à des décisions ambitieuses.
Il y a cependant fort à parier que les banques durciront leurs critères d’attribution en 2020, pour revenir à davantage de variabilité dans les conditions d’octroi de crédits. Elles feront également plus attention aux risques liés à la valeur réelle des biens, notamment en cas d’accalmie sur les transactions. 2020 devrait donc rester un bon millésime en matière de crédits immobiliers, mais la préparation des projets sera sans doute plus importante et s’accompagnera du retour probable des intermédiaires, tels que les courtiers.