Les résultats des stress-tests concernant les banques grecques sont tombés et ils ne sont pas rassurants… quant à l’honnêteté de cette évaluation.
Les derniers rendez-vous européens n’ont débouché que sur de maigres avancées dans l’optique d’une union bancaire au sein de la Zone euro.
Revenons plus en détails sur le secteur bancaire européen, dont nous avons vu l’inquiétant niveau des prêts non performants par pays — et débutons par la Grèce.
La dette souveraine grecque, « soutenable » à 180% du PIB ?
Le pays a quitté la tutelle de ses créanciers le 20 août, après que les 19 Etats membres de la Zone euro ont accepté courant juin de rééchelonner le remboursement de la dette colossale d’Athènes. Le pari européen est de rendre la dette hellénique soutenable, alors qu’elle se monte à rien de moins que 180% du PIB.
J’ignore si Pierre Moscovici a un compte courant dans une banque grecque mais, si l’on veut bien croire ce qu’il raconte sur Twitter, nous aurions assisté à un nouveau « moment historique » (oui, encore un !). Il n’y aurait donc plus de raison de s’en faire pour Athènes ni – par répercussion – pour nos placements bancaires en Europe.
La farce des stress tests continue
Début mai, la BCE a débuté un nouveau cycle de stress tests dédié cette fois-ci aux seules banques grecques, en anticipation de la fin du plan de sauvetage du pays intervenue fin août.
Si vous avez lu la presse française, vous avez pu constater que les résultats de ces stress tests semblent plutôt positifs.
En effet, « les quatre principales banques grecques ont dit samedi ne pas avoir besoin de fonds propres supplémentaires après le résultat des tests de résistance européens montrant qu’elles perdraient environ 15,5 milliards d’euros d’ici 2020 dans un scénario économique du pire », selon le site Zone Bourse.
Là où le bât blesse, c’est que ce stress test a quelque peu fait figure d’Ecole des Fans appliquée à la vie économique et financière.
La BCE l’a elle-même reconnu dans son communiqué en soulignant la chose suivante :
« Ce test de stress n’est pas un examen que l’on réussit ou auquel on échoue. Ses résultats, ainsi que d’autres informations de surveillance pertinentes, servent à établir une évaluation globale de la situation des banques. »
On comprend mieux où veut en venir la BCE : nous sommes comme dans l’émission de Jacques Martin. Aucun niveau de performance (en termes de fonds propres) n’a été déterminé pour pouvoir qualifier un résultat de succès ou d’échec.
Avec les critères de stress de 2015, trois des plus grosses banques grecques auraient échoué
Un site comme Zero Hedge, vous permet de prendre connaissance de l’avis des grands établissements bancaires au sujet de ce genre de simulations.
Voici donc ce qu’en pense Goldman Sachs :
« […] comme l’a admis Goldman, tout était une farce dès le départ ou plutôt plus une farce que d’habitude. Tout d’abord, le test était beaucoup moins sévère que le scénario modélisé par la BCE dans le test de résistance du système bancaire grec mené en 2015, lequel supposait que l’économie avait ralenti de 6,8% au cours d’une seule année. Cette fois-ci, la pire baisse de PIB envisagée a été de -2,1% en 2019. Par ailleurs, trois des quatre banques auraient échoué au dernier stress test si les règles de 2015, beaucoup plus draconiennes, avaient été retenues […]. »
En somme, la BCE aimerait nous faire avaler que la Banque du Pirée, la Banque nationale grecque, Eurobank et Alpha Bank se portent plutôt bien.
En réalité, les banques grecques ont dû être recapitalisées à trois reprises depuis 2010, et leurs créances douteuses représentent encore autour de 100 Mds€ (elles se sont engagées à faire diminuer ce montant de 30 Mds€ d’ici 2019), ce qui fait tout simplement de ce système bancaire le plus vérolé d’Europe.
En tous cas, les actionnaires ne sont pas convaincus, eux. L’action Eurobank Ergasias cote 0,5125 € alors que cette penny stock cotait encore 1,05 € en avril. Le cours de l’action d’Alpha Bank a également été divisé par presque deux (2,20 € en mai et 1,194 aujourd’hui).
Sans la BCE, plus de banques grecques
Dit autrement, avec un ratio total d’exposition non-performante compris entre 44% et 56% du total des prêts, « toutes les banques grecques restent totalement insolvables si les protections monétaires de la BCE devaient être retirées », comme le résume Zero Hedge.
Contrairement à ce qu’avance Pierre Moscovici, nous sommes plutôt invités à avaler un festin de couleuvres à la moussaka.
Zone euro : des prêts non-performants en baisse, mais à des niveaux toujours alarmants
La Grèce explose donc tous les compteurs, en particulier en comparaison de la moyenne européenne des prêts non-performants qui se montait mi-mai à un peu plus de 6% du total des prêts, selon Natixis.
Comme l’a déclaré Mario Draghi le 18 septembre, « au cours des trois dernières années, le stock de NPL [« non-performing loans », c’est-à-dire « prêts non-performants »] des banques importantes a diminué d’un tiers ».
Cependant, « les ratios de créances douteuses des banques de la Zone euro sont encore supérieurs à ceux des banques américaines. Des efforts supplémentaires sont nécessaires de la part des banques, des superviseurs et des régulateurs pour réduire le stock restant de NPL, surtout dans les pays où ces ratios restent élevés », a-t-il ajouté.
Que voilà une façon très policée de dire qu’il est urgent de se débarrasser des 779 Mds€ de prêts non-performants encore détenus par les banques de la Zone euro (et 910 Mds€ au sein des banques de l’UE) au premier trimestre 2018.
La Tribune rappelle également que « le ratio de NPL aux États-Unis était très faible en 2017, à seulement 1,1% (il dépassait 4,5% en 2010), et la moyenne mondiale à 3,7% ».
Espérons que les résultats des stress tests des autres banques de la Zone euro que la BCE annoncera au mois de novembre prochain nous permettront de nous faire une idée honnête de la résistance du système bancaire européen.
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