Marchés boursiers : quelles actions sont plus sûres ?

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Par Chris Mayer Publié le 6 juillet 2015 à 5h00
Bourse Investissements Actions Sures
@shutter - © Economie Matin
5 000Le CAC 40 est passé sous la barre symbolique des 5 000 points.

Autant les gens aiment bien fustiger les actions, autant ils ont un faible pour les actions d’entreprises qui possèdent beaucoup d’actifs corporels — comme les minières aurifères et les pétrolières. La croyance populaire est que ces actions protègent lorsque le dollar perd de sa valeur.

Ce n’est pas tout à fait vrai. Je pense toujours à l’exemple pris par Warren Buffett dans sa lettre de 1983, alors que l’inflation était encore au coeur des inquiétudes. Dans cet exemple, Buffett compare See’s Candies et une entreprise possédant beaucoup d’actifs corporels — appelons-la Gold-Oil Co. Ces deux entreprises génèrent chacune un bénéfice de deux millions de dollars. See’s possède peu d’actifs corporels — pour environ quatre millions de dollars. La valeur de l’action correspond à une valorisation de 25 millions de dollars. En revanche, Gold-Oil Co. possède 18 millions de dollars en actifs corporels nets pour soutenir ses opérations.

Puisqu’elle génère un rendement plus faible sur la base de ses actifs, son action donne une valorisation de 18 millions de dollars. (Grosso modo, la valeur de ses actifs corporels nets.) Admettons à présent que l’inflation fait doubler les prix. Les deux entreprises doivent doubler leurs bénéfices rien que pour rester en phase avec l’inflation. Comme l’écrit Buffett, “cela ne semble pas être bien compliqué : il suffit de vendre le même nombre d’unités au double du prix et, en supposant que les marges bénéficiaires restent inchangées, les bénéfices doivent également doubler”.

Mais voilà le problème : les deux entreprises devront également doubler leur investissement en actifs corporels. Comme l’écrit Buffett : “Les deux entreprises devront probablement doubler leur investissement nominal dans les actifs corporels nets puisque c’est là le genre d’exigence économique que l’inflation impose généralement aux entreprises, qu’elles soient bonnes ou mauvaises… Tout cet investissement qu’exige l’inflation ne produira aucune hausse du taux de rendement. La motivation pour cet investissement est la survie de l’entreprise et non la prospérité de celui qui la possède”.

Pour See’s, cela se traduit par un investissement supplémentaire de 4 millions de dollars. Pour Gold-Oil Co., cela signifie un investissement supplémentaire de 18 millions de dollars. Buffett a payé 25 millions de dollars pour acquérir See’s. Après cette période d’inflation, See’s “pourrait valoir 50 millions de dollars si elle est valorisée (comme il serait logique de le faire) sur la même base qu’à l’époque de notre achat”.

Tout est affaire de “moins mauvais”

Par conséquent, See’s aurait dû gagner 25 millions de dollars en valeur nominale sur les huit millions de dollars d’investissement supplémentaire. Cela représente plus du triple. Quant à Gold-Oil Co., elle vaut encore la valeur de ses actifs corporels nets, soit à présent 36 millions de dollars. Cela représente une augmentation de valeur de 18 millions de dollars en investissement supplémentaire. Elle est restée au même niveau.

Remarquez que l’inflation a été mauvaise pour les deux entreprises. Mais elle a été moins mauvaise pour See’s, qui possédait peu d’actifs corporels. Cette idée est difficile à comprendre pour beaucoup de gens, comme le reconnaît Buffett : “Pendant des années, la sagesse traditionnelle voulait que la meilleure protection contre l’inflation était les entreprises riches en ressources naturelles, usines, machines ou autres actifs corporels (‘In Goods We Trust’). Cela ne marche pas ainsi. Les entreprises qui possèdent beaucoup d’actifs corporels affichent généralement de faibles taux de rendement — des taux qui souvent fournissent à peine assez de capital pour financer les besoins inflationnistes de l’entreprise existante, et plus rien pour la croissance réelle, pour les dividendes des actionnaires ou pour l’acquisition de nouvelles entreprises”.

Cette citation est essentielle. Si vous ne la comprenez pas, relisez l’exemple. Travaillez-le sur le papier par vous-même. Changez les chiffres si vous le souhaitez. Il est important d’en comprendre la dynamique. Dans un environnement de dépréciation monétaire, c’est l’entreprise qui ne possède pas beaucoup d’actifs corporels qui s’en tire. Ou, autrement dit, la dépréciation monétaire favorise les entreprises légères en actifs corporels. L’ironie est que les gens, même s’ils ont tendance à éviter les actions, lorsqu’ils en achètent, leur choix se porte sur les pires.

Pour citer un autre grand investisseur, John Maynard Keynes : “la difficulté n’est pas de comprendre les idées nouvelles mais d’échapper aux idées anciennes”. En période d’inflation, l’entreprise idéale est celle qui a) peut augmenter ses prix facilement et b) ne nécessite pas d’investissement dans beaucoup d’actifs. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas gagner de l’argent dans les actifs. Je donne ici humblement mon avis, dans un esprit amical de débat et pour alimenter la réflexion.

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Chris Mayer s'occupe de la lettre d'information Capital & Crisis, ainsi que du système de trading Crisis Point Trader édités par Agora Inc. Ses analyses pertinentes et précises des problématiques financières ont été reprises souvent dans de nombreuses publications, et notamment dans le très réputé Grant's Interest Rate Observer.

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