Deux énormes surprises ! Personne, ou presque n’avait prévu la victoire de Donald Trump ou le score de François Fillon au premier tour de la primaire de droite.
Comment comprendre qu’alors que les outils statistiques et la masse de données disponibles pour les sondeurs n’ont jamais été aussi sophistiqués et importants, l’immense majorité des observateurs d’opinion se soient trompés ?
A cette question, sans doute pour conserver un peu de crédibilité, les instituts français répondent en invoquant la complexité du système électoral américain et vantent leurs propres méthodes : les Américains, sans que l’on sache vraiment pourquoi, utiliseraient des échantillons larges de populations, mais établis au hasard, confiant la pertinence de leurs analyses à la loi des grands nombres alors que les sondeurs français établiraient des panels plus restreints, mais « représentatifs » de la population. Pour expliquer leur relatif échec sur le score de François Fillon, ils expliquent qu’ils avaient anticipé le mouvement en faveur de Fillon mais pas son ampleur car l’électorat d’une primaire est très volatile et se détermine dans les toutes dernières semaines.
Même si leurs prédictions s’avèrent la plupart du temps assez justes, du moins dans les grandes tendances, ils sont pourtant régulièrement dans l’erreur et portent toujours comme une croix leur incapacité à avoir anticiper un certain 21 avril. A ce jeu, le résultat de la primaire de droite est éloquent.
Dans cette foule de sondeurs déconfits, un seul tire son épingle du jeu. Le système prédictif MogIA, développé par la start-up indienne Genic, a vu juste et annoncé la victoire du tonitruant Trump.
MogIA ne s’embarrasse pas de panels comme ses concurrents, il a basé ses analyses sur l’étude de plus de vingt millions de conversations sur les réseaux sociaux. Son intelligence artificielle n’a sans doute pas la finesse nécessaire pour discerner les tweets ironiques des posts laudateurs, mais, comme pour les trois précédentes élections et les résultats des primaires, le système a vu juste, là où les techniques classiques se sont lamentablement trompées.
Le nom du système, MogIA, est une référence au personnage principal du Livre de la jungle, Mowgli, petit homme perdu dans un monde hostile et complexe contraint d’apprendre par lui-même.
La véritable performance du système, selon son créateur, tiendrait dans cette capacité, son intelligence artificielle est capable d’apprendre sans apriori : « alors que la plupart des algorithmes bâtis par des humains sont limités par les biais d’appréciation de leurs auteurs, MogIA apprend de son environnement, développe ses propres règles et son expertise sans écarter aucune donnée. » Cette « objectivité » désincarnée serait donc plus fiable que le savoir-faire des instituts classiques.
Toujours selon le créateur du système, Sanjiv Rai, cité par CNBC, « ces résultats ne donnent pas seulement des outils pour générer des études d’opinion, mais aussi une méthode pour étudier comment ce que les gens disent (sur les réseaux) reflète leurs intentions de vote. »
Car c’est un biais bien connu des sondeurs qui s’évertuent à élaborer des « facteurs correctifs » concernant les votes « extrêmes » ou à contre-courant : les sondés répugnent souvent à dévoiler leurs véritables intentions et leurs déclarations sont souvent éloignées de leur point de vue réel. Les études classiques devraient donc préciser dans la définition de leurs panels « échantillon représentatif de la population, sans garantie de la bonne volonté des sondés à dire ce qu’ils pensent vraiment. » Pourquoi dire la vérité à un sondeur ?
Cette barrière à une étude fiable de l’opinion est en train de tomber : MogIA ne prend pas la peine de vous poser une question que vous pourriez contourner, il analyse ce que vous dites sur les réseaux et cela lui suffit pour lire dans votre esprit. Face à l’intelligence artificielle, même le mensonge est vain.
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