Les complémentaires santé sont-elles trop chères? Certains candidats à la présidentielle l’avaient prétendu. Une étude montre le contraire aujourd’hui: la concurrence qu’elle se livre permet d’importants gains de pouvoir d’achat pour les salariés.
Quatre ans après l’adoption de la loi du 14 juin 2013 généralisant les complémentaires santé d’entreprise, un premier bilan peut être dressé de cette innovation législative. Il montre que les conditions de mise en oeuvre de la loi ont permis d’importants gains de pouvoir d’achat pour les salariés, par la mise en concurrence des organismes complémentaires.
100 branches rebelles
D’un point de vue strictement réglementaire, on notera que seules 200 des 300 branches nationales ont respecté leurs obligations légales en négociant un accord santé. 100 branches se sont abstenues.
Il s’agit essentiellement de branches « marginales ». En dehors du commerce de gros, ces branches comportent très peu d’effectifs. En l’état, 14 des 16 millions de salariés sont couverts par un accord de branche en santé. Ils étaient environ 6 millions en 2013.
La généralisation de la complémentaire santé a donc produit une véritable dynamique de négociation collective.
Une protection réelle qui demeure incertaine
Il serait toutefois naïf de croire que les salariés concernés ne disposaient pas d’une couverture, collective ou individuelle, en santé avant la généralisation. Les taux de couverture en complémentaire santé demeurent stables depuis au moins cinq ans, au-dessus de 94% de population couverte. La part des couvertures collectives d’entreprise est passée de 46 à 50% du marché depuis 2013.
Autrement dit, 6% de Français ont probablement bénéficié d’une dynamique liée à la loi, soit environ 4 millions de personnes, dont certaines sont des ayant-droit des salariés. L’impact réel de la généralisation reste donc assez limité sur la couverture effective des salariés que la loi avait l’ambition de mieux protéger. 20% seulement des salariés ont vu leur couverture santé individuelle modifiée en collective.
Dans la pratique, la portée réelle de cette nouvelle « protection » demeure donc limitée.
Une baisse globale des tarifs
La réussite majeure de la généralisation de la complémentaire santé tient probablement beaucoup plus à l’amélioration globale des garanties et à la baisse des tarifs proposés par les assureurs complémentaires.
La généralisation par mise en concurrence systématique des assureurs a déclenché une véritable dynamique vertueuse. Grâce au libre choix de l’assureur par l’entreprise, les tarifs ont baissé de plus de 6% en moyenne depuis 2013, pour des garanties globalement plus élevées.
La prohibition des monopoles assurantiels de branche (instaurés en leur temps au nom de la solidarité), prononcée par le Conseil Constitutionnel en 2013, a donc profité aux salariés.
750 millions € de pouvoir d’achat en plus chaque année
Il est évidemment complexe d’évaluer précisément les gains de pouvoir d’achat permis par la généralisation de la complémentaire santé. Il faut toutefois noter que ces baisses de tarifs sont intervenues dans un contexte de croissance continue des dépenses de santé.
Par rapport à l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (ONDAM), les tarifs des complémentaires santé ont surperformé à hauteur d’environ 500 millions €. La baisse nominale des tarifs correspond à une économie annuelle de 1,1 milliard€.
Une cotte mal taillée permet donc d’estimer le gain moyen de pouvoir d’achat à 750 millions€ annuels. Cette somme équivaut aux économies tarifaires apportées aux salariés par la mise en concurrence des assureurs.
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog