Le dimanche 06 Juillet 2015, restera dans les annales européennes : Un pays de l’Union Européenne a osé voter non contre le plan de restructuration proposé par Bruxelles. Avec comme sous-entendu possible, la sortie de l’Euro.
Quelles pourraient être les conséquences pour la Grèce, l’Europe ? Il faut tout de même rappeler que la Grèce a été le 10ème état à rentrer le 01 janvier 1981 dans L’Europe et le 15 novembre 2001 dans l’Euro.
Dans un monde super connecté, les analyses diverses vont bon train. Dans le pays le plus concerné : La Grèce, pour une majorité, la situation nouvelle (Le Non) paraît très positive. Pour le premier Ministre Alexis Tsipras, c’est une victoire contre Bruxelles et la finance, c’est aussi une nouvelle consécration nationale qui lui permet de poursuivre son mandat. Vu de Bruxelles et surtout Berlin, c’est une autre affaire. Ils ont l’impression de s’être fait piégés, mis devant le fait accompli, un deal très difficile à concilier.
Chaque partie a interprété ce Non en fonction des ses intérêts. Le remplacement du bouillonnant ministre des finances Yanis Varouflakis relativement « grillé », par Euclide Tsakalotos plus modéré, permettra certainement aux nouvelles négociations de s’établir avec moins d’hostilité. Alexis Tsipras semble lui, très confiant en ne cessant de répéter qu’il a l’intention de revenir à la table des négociations et trouver un accord sous 24 heures. Ce qu’il a fait, sans pour autant rien avancé, dévoilé. A t-il seulement prévu quelque chose ? Avec ce Non, il affirme que c’est un nouvel « outil » qui lui servira à rouvrir plus facilement le chemin des négociations, avec une voix plus coopérative et un terrain d’entente plus favorable. Il est persuadé que cette fois, il pourra négocier d’une manière plus positive avec la Commission Européenne et la Banque Centrale Européenne.
Il a même affirmé le soir de l’élection que : "Le mandat que vous m'avez donné n'appelle pas une rupture avec l'Europe, mais me donne plutôt un plus fort pouvoir de négociation." Ce référendum a permis à Alexis Tsipras de se sortir d’un mauvais pas et de se faire à nouveau accepter par son peuple avec encore plus de conviction. Il ne demande plus toutefois l’annulation de la dette.
L’Europe se trouve divisée, plusieurs pays dont ; la France, l’Italie, l’Espagne ont appelé à une reprise des négociations le plus vite possible. La nouvelle réunion du mardi 08 juillet n’a rien apporté, sauf l’accord qu’Alexis Tsipras reviendrait avec de véritables propositions examinées le dimanche 12 juillet: "Demain, nous allons soumettre des propositions concrètes pour un accord juste, des propositions de réforme fiables", a-t-il déclaré. Georges Osborne, le ministre des finances britanniques, demande d’être réaliste en annonçant que «les chances d'une résolution heureuse de cette crise s'amenuisent tristement".
L’italien Paolo Gentiloni, ministre des Affaires étrangères quant à lui, a affirmé "Désormais il est juste de recommencer à chercher un accord. Mais on ne sort pas du labyrinthe grec avec une Europe faible et sans croissance". De leur coté l’Allemagne et Jeroen Dijsselbloem, Président de l’Eurogroupe, n’ont pas caché leur déception face au Non grec et la venue du 1er ministre grec « les mains dans les poches ». La France de part sa situation économique très difficile, a respecté le choix démocratique des grecs, tout en étant un peu embarrassée pour la suite à donner, même si elle est toujours très ouverte à de nouvelles négociations. Il est vrai que les grecs ressentent comme un camouflet, le fait qu’un club de pays européen tous endettés, à très endettés, puissent faire la moral aux plus faibles d’entre eux, en lui imposant des réformes qui auraient fait tomber presque tous les gouvernements successifs de n’importe quel pays.
Cette situation exceptionnelle ne serait certainement pas survenue ou avec peu de conséquences, si tous les pays européens ne s’étaient pas laissés « embarqués » par de profonds déficits. Supposons que la moyenne européenne au lieu d’un déficit de moins 3% (2,9% exactement en 2014) se situe avec un excédent de plus 3%, que se passerait-il ? Même si sa gestion est très loin d’être exemplaire, la dette grecque ne serait certainement pas aussi importante, puisque soutenue par un environnement très porteur. Les prêteurs seraient moins exigeants puisqu’ils auraient des rendements permettant de larges opportunités de manœuvre et de résultats.
Comment l’Europe en est arrivée à ce niveau financier calamiteux ? Mais l’Europe, c’est bien des états indépendants qui la composent. Presque tout le monde critique l’Europe, en particulier les 97 mouvements divers dit : Eurosceptiques, europhobes, europhiles, eurocritiques, souverainistes, nationalistes, conservateurs, dont 48 dits « durs », 45 modérés et 4 autres. Avec les difficultés qu’à connu l’Europe, accentuées par la crise de 2009, les partis se sont multipliés, mais les opinions publiques se sont radicalisées de plus en plus contre l’Europe. Beaucoup de politiques, devant les difficultés que rencontrait leur pays se sont mis à faire porter à l’Europe toutes leurs incompétences à régler leurs problèmes nationaux.
Tous les pays, à des degrés différents, se sont trouvés à un moment donné devant des difficultés à gérer positivement les comptes de leur état. A part quelques uns qui ont cumulé un problème particulier, tous les déficits ont une base commune peu ou pas suffisamment prise en compte : Les coûts liés à l’augmentation de la durée de vie, et surtout une inadéquation avec les temps de travail et d’activité qui ont constamment régressé. Sans cette prise en compte, les dépenses des états n’ont pas arrêté d’augmenter plus vite que leur PIB. Ce qui a eu pour conséquence l’augmentation et la création de prélèvements supplémentaires. Résultats, moins de pouvoir d’achat, moins de commandes, priorité au low cost, marge des entreprises qui se réduisent. Pour certaines c’est la fermeture, les licenciements, le chômage qui augmente, pour d’autres pour survivre, c’est l’installation à l’étranger ; les fameuses délocalisations tant décriées. Et pourtant malgré des productivités horaires qui se sont fortement améliorées, les situations n’ont fait qu’empirer.
Certains pays ayant pris rapidement des mesures d’augmentation de durée d’activité par rapport à la durée de vie, s’en sortent mieux que d’autres, c’est le cas notamment des pays nordiques, de l’Allemagne. La France avec ses 35 heures et 60/62 ans est à la traîne. Elle a énormément du mal à refaire surface, écrasée par ses nouveaux prélèvements alors que tous les autres pays sont repartis de l’avant. Même la Grèce a un déficit plus faible que celui de la France ! - 3,5¨%, France - 4%. En 2013, elle avait même un excédent primaire de + 2,1%. C’est son énorme dette, de 317 milliards d’euros soit 177,1% du PIB qui impacte de très loin ses résultats. Une proposition pourrait certainement relancer la croissance beaucoup plus vite que l’allongement des retraites à 67 ans, ce serait d’augmenter de suite la durée de base du travail d’une heure par semaine, puis deux.
Les grecs ressentent comme un camouflet le fait qu’un groupement de pays européens tous endettés à très endettés, puissent faire la moral aux plus faible d’entre eux, en lui imposant des réformes qui auraient fait tomber presque tous les gouvernements successifs de n’importe quel pays.
Quelles répercussions auraient pour l’Europe, la France…, une sortie de la Grèce hors de la zone Euro
(19 pays en font partie, 9 pays de l’U.E sont encore hors de l’euro, dont le Royaume-Uni, la Suède, le Danemark, la Pologne…) Si c’est à l’initiative de la Grèce, il faut toutefois qu’une majorité des membres qualifiés soit acquise après approbation du Parlement européen. Une autre modalité plus rapide serait la sortie au préalable de l’Union européenne. Il resterait à savoir si elle est temporaire ou définitive. Si c’est l’union européenne qui décide de se séparer de la Grèce, elle aura des moyens de pression suffisamment efficaces pour arriver à ses fins. Le premier, serait de stopper de verser les aides. En deuxième, la BCE pourrait aussi arrêter les prêts aux banques grecques. En troisième, elle pourrait ne plus accepter des bons grecs en collatéral. La Grèce serait prise de suite à la gorge avec un manque de liquidité et ferait défaut sur sa dette, sans avoir le moyen de respecter le paiement de ses services publiques : fonctionnaires, retraites, etc…Elle serait obligée d’imprimer une nouvelle monnaie, le Drachme, ce qui la sortirait pratiquement de la zone euro.
Et les autres pays, comment s’en sortiraient-ils. Quelles conséquences pour eux ? Il est très difficile de connaître la réaction des marchés, mais la sortie pourrait enclenchée une nouvelle crise financière en Europe. Les actifs grecs détenus en grande partie par les européens subiraient une forte baisse, compte tenu du passage de l’Euro au Drachme, qui serait la nouvelle monnaie de référence. La dévaluation pourrait être forte à très forte, selon certains experts de 30 voire jusqu’à l’extrême 80% ! L’Amérique latine pourrait-être une référence avec une crise un peu similaire, ayant entraînée une hausse spectaculaire de la pauvreté, ainsi que d'importants mouvements sociaux et de rapides changements politiques, y compris une inflation spectaculaire. Même si la baisse des prix pourrait permettre de retrouver de la compétitivité, le passage sera très difficile à gérer surtout si les prêts financiers sont coupés ou insuffisants pour établir la jonction.
Il y a eu aussi un autre précédent il y 2 ans, il est vrai différent, concernant uniquement les Etats-Unis. Le Président Obama a dû se démener comme « un diable » pour que le Congrès (Surtout la Chambre des représentants à majorité républicaine) accepte après des mois de négociations, de discussions et de tractations compliquées, d’augmenter le plafond de la dette. Il a ainsi évité, à la toute dernière minute, un défaut de paiement de celle-ci de la part des Etats-Unis. La grosse difficulté, c’est que presque tous les pays d’Europe, notamment l’Allemagne et la France, vont se retrouver avec un déficit supplémentaire qui va restreindre fortement leurs résultats.
Suite à cela, c’est que la grande probabilité voit survenir un renchérissement des taux et surtout pour ceux qui ont les plus mauvaises gestions ; un déficit supérieur à -3%, entre autres par ordre décroissant : Le Royaume-Uni, l’Espagne, le Portugal, l’Irlande, la France, l’Italie,… Mario Draghi et la BCE risquent de se trouver ainsi sous pression, déjà gênés « aux entournures » depuis qu’ils ont accepté les titres « pourris » émis par les banques grecques poussées par la pression de la rue et du pays tout entier. ? Si l’on analyse l’évolution économique depuis 2001, on peut s’apercevoir que l’euro n’a pas convenu à la Grèce. Sa faible capacité d’exécution, liée à de nombreux blocages administratifs et dogmatiques : récolte des impôts, cadastre, rentes…, n’ont pas permis de pouvoir alléger les dépenses et développer suffisamment de croissance.
Les coûts possibles d’un Grexit :
Sans précédent, il n’existe pas de scenario, ni d’estimations précises. Pourtant en 2012 (c’est loin, on n’y pense déjà plus) lors d’une situation relativement similaire, des chiffres avaient déjà été avancés par le FMI et quelques instituts économiques. Une somme située entre 500 et 1000 milliards d’euros totalisant tous les prêts bilatéraux, aux banques grecques et les autres, ceux aux entreprises non financières, les engagements de la BCE, le financement via le FESF, l’impact sur les marchés, les dégâts pour l’économie et les effets de contagion. Sans tenir compte des titres grecs détenus par les assurances, les banques, ni du coût d’intervention du FMI. A rajouter, les possibles pertes sur bilan des prêteurs : BCE, FMI, U.E.) Cette sortie pourrait coûter 10.000 euros par habitant la première année et environs 3.500 les années suivantes. En fonction du niveau d’inflation, la dette grecque pourrait monter jusqu’à 330% du PIB (177,1% actuellement).
Dans cette période très compliquée, chahutée, sortir un pays de la zone euro, on ne sait pas faire, l’union monétaire n’a jamais été confrontée à une telle situation. Toutefois la BCE, pourrait dépasser son plafond de 60 milliards mensuels pour enrayer toute montée excessive des taux d’intérêts dans la zone euro. Du côté des banques, pour les allemandes, la banque publique de développement KfW est la plus exposée, avec des prêts d’un montant total de 15 milliards. Les autres le seraient également à hauteur de 23,5 milliards d’euros à la Grèce, mais il y a un risque de contagion, car les banques commerciales : Deutsche Bank et Commerzbank ont peu de créances. Par contre en Europe, ce serait le Crédit Agricole banque de détail, qui serait la plus exposée avec à priori, 3,5 milliards de créances. En ce qui concerne le plan européen d’assistance financière propre à la France, le montant estimé s’élève à 40 milliards d’euros. Ce montant ne tient pas compte de celle de l’Eurosystème ; la BCE et les banques centrales européennes dont la Banque de France ; nommé Target2. Une recapitalisation par les états membres pourrait obliger la France à trouver 25 milliards d’euros. ?
Mais tous ces scénarios catastrophes ne devraient certainement pas se produire, la Grèce, sauf forte exception, n’effectuera pas sa Grexit. Alexis Tsipras, le peuple grec et une majorité de pays européens ont la ferme volonté que la Grèce reste dans l’Euro et l’Europe. Les conséquences seraient dramatiques à la fois pour la Grèce et pour l’Europe. Pendant ce temps, le bitcoin, monnaie de substitution, a connu une progression phénoménale. Les échanges ont crû de plus de 300% depuis début juin. Les grecs tremblent pour leur économie, irrités, désemparés par cinq années de crise financière. Un pouvoir d’achat en forte baisse, une méfiance vis-à-vis des banques, les poussent vers cette monnaie virtuelle non contrôlée par les états. L’ancien ministre Yanis Varofakis avait même milité contre cette monnaie non contrôlée par l’état. Il a même affirmé que cette monnaie pourrait être réutilisée par les pays membres de la zone euro pour en premier, limiter l’inflation. Il est toutefois encore loin d’être une valeur refuge, puisqu’il ne serait accessible que par 67% des grecs, notamment ceux qui ont internet. Ce placement reste par ailleurs un choix risqué : il est surtout utilisé par certains financiers comme un outil de spéculation. Le bitcoin valait 800 € en janvier 2014 et environs 280€ actuellement. ?
Autre répercussion pour la France : Il n’y a pas que les milieux financiers qui s’inquiètent. La filière bovine française est suspendue aux négociations en cours et à l’évolution de la situation grecque. "La Grèce est le deuxième marché à l’export pour la viande bovine française, après l’Italie", Pesant 36 % des importations grecques en viande bovine, la France est le premier fournisseur du pays, devant l’Irlande, l’Allemagne et l’Italie. La demande pourrait s'effondrer. "La sortie de la Grèce de la zone euro entrainerait un renchérissement important du prix de la viande bovine française pour les Grecs et un effondrement de la demande", craint le président français d’Interbev, Dominique Langlois.
Dimanche 12 juillet dernier round ?
Avec un scenario le plus favorable, ce dimanche à la toute dernière minute, chacun devrait remballer ses divergences, faire un maximum de concessions pour enfin trouver un terrain d’entente et mettre fin à des mois d’errance et de tergiversation. Mais si nous arrivions à l’éventualité d’un Grexit, quelle que soit l’issue de la situation grecque à venir, les entreprises françaises peuvent être rassurées quant à la visibilité des taux d’ici à septembre 2016, date de fin du programme QE. Le pare-feu de la Banque Centrale Européenne jouera. Ceux-ci pourraient toutefois monter aux environs de + 1,5%. Avant de se rencontrer à nouveau ce dimanche, Angela Merkel avait déclaré : "Les conditions préalables aux nouvelles négociations ne sont pas encore réunies. On attend les propositions précises du premier ministre grec, Alexis, Tspiras. Nous devons trouver une situation de sortie. Nous avons déjà fait preuve de beaucoup de solidarité. Il faut que chaque pays assume sa responsabilité et fasse preuve de cohérence. Nous sommes 19 à avoir la même monnaie.
En attendant, la BCE a répété dans son communiqué, qu'elle "continue de surveiller attentivement la situation sur les marchés et les implications possibles pour le rythme de la politique monétaire, et pour l'équilibre des risques sur la stabilité des prix dans la zone euro", se disant "déterminée à utiliser tous les instruments disponibles dans le cadre de son mandat". Dans l’éventualité où personne ne saurait éviter la sortie de la Grèce de la zone euro, elle devra de toute manière rembourser officiellement au minimum 20 milliards en 2015. Il faut encore rappeler qu’au cours des 6 années passées, en termes de compétitivité, la Grèce est passée de la 67ème place à la 81ème. D’un autre côté, les investissements ont chuté de plus de 60% avec une population de 30% qui vit en dessous du seuil de pauvreté. Aux dernières nouvelles, Alexis Tsipras a accepté ce qu’il avait refusé auparavant : la retraite à 67 ans, la TVA à 23%, de relancer les privatisations…, en contradiction avec la base du référendum du 05 juillet dernier. Il reste encore l’acceptation de ces nouvelles mesures par le parlement grec.
Mais entendons dimanche soir après la réunion des 28 pays de l’union européenne, pour épiloguer plus justement. De toute façon, le problème grec devrait nous poursuivre au minimum encore tout au long de l’année 2015, si ce n’est plus…Nous allons encore devoir payer, payer…