Les chiffres d'aujourd'hui montrent qu'il y a eu un lourd tribut à payer pour le confinement imposé à l'économie française, qui s'est plus contractée que ses homologues américaine et allemande au deuxième trimestre de l'année. Sur une note plus positive, les chiffres suggèrent également que l'économie française a connu un rattrapage rapide au deuxième trimestre de cette année, passant de 65% de son niveau d'activité normal à près de 90%.
Le confinement à la française a fait payer un lourd tribu à l’économie
Les chiffres du PIB donnent une mesure à la profondeur des abysses où les mesures de confinement ont entraîné l’économie française. Avec une contraction (révisée à la hausse) de 5,7 % au premier trimestre et de 13,8 % au deuxième trimestre, le PIB s'est contracté de près d'un cinquième (19 %) au cours du premier semestre de l'année. Ce résultat est bien pire que les chiffres qui viennent d'être publiés aux États-Unis (-11% au 1er semestre) et en Allemagne (-12% au 1er semestre), où le confinement a été moins sévères.
Toutes les composantes du PIB sont touchées
En dehors des stocks, toutes les composantes ont contribué à la baisse historique au deuxième trimestre, mais la contribution nette des exportations est particulièrement négative (-2,3 points de pourcentage), les exportations ayant chuté de 25,5 % en raison d'un commerce intra-zone euro presque paralysé. Les investissements des entreprises ont mieux résisté à la crise que les autres composantes de l'investissement : ils ont baissé de 16 % au second trimestre après 10,6 % au premier. La consommation des ménages a été le facteur le contributeur le plus négatif de la croissance, avec une baisse de 11 % du QoQ au deuxième trimestre de l'année. Cette baisse est différenciée en fonction des types d’achats : entre la lourde chute des achats de carburants et des services de transports ou d’hébergement-restaurantion (-57%) et le léger recul des dépenses alimentaires (-0,5%), tous les secteurs ont été impactés différamment.
Un rattrapage rapide
Les chiffres d'aujourd'hui suggèrent que l'économie française tournait à 80 % de ses capacités en moyenne au cours du deuxième trimestre de l'année, après avoir atteint un creux de 65 % pendant la période de confinement (des chiffres avérés à la fin du 1er trimestre). Comme les premières semaines du trimestre ont encore été affectées par de sévères mesures de confinement, cela signifie que l'économie française a rebondi plus que prévu en juin et est probablement plus proche de 90 % de son niveau d’activité normal en juillet. Si cela se maintient, une reprise en forme de V est à prévoir pour le troisième trimestre.
Toutefois, il sera probablement plus difficile de regagner les derniers 10 % après l'été, surtout si la distanciation sociale reste la norme et si des confinements locaux sont nécessaires. En effet, des doutes demeurent sur le comportement des consommateurs qui vont faire face à une hausse du chômage dans les prochains mois et semblent tenté d’épargner à en croire les enquêtes de confiance. De même, contrairement à la reprise de 2010, le commerce mondial pourrait ne pas être un moteur de reprise majeur cette fois-ci : entre les difficultés de la Chine, le climat de guerre commerciale et le Brexit, les temps vont rester durs pour les exportateurs. A ce stade nous pensons (Graphique 2) qu’à la mi-2021, l’économie sera encore en-deçà des 96% de son niveau d’activité normal, soit l’équivalent du pire moment de la crise de 2008. Le V est donc un V en trompe-l’œil.
Il faudra des années pour que le rattrapage soit complet. Le plan de relance de 100 milliards d'euros récemment annoncé (financé en partie par le plan de relance Next Gen de l'UE) devrait donner un coup de pouce au PIB au cours des deux prochaines années. C'est pourquoi nous nous en tenons à notre scénario actuel, qui prévoit une contraction du PIB de 9,5 % en 2020, suivie d'un fort rebondissement de 6 % en 2021.