Le ministère de l’Intérieur a lancé ces dernières semaines deux initiatives dignes d’intérêt : le déploiement d’une « police de sécurité du quotidien » et un axe stratégique, le « continuum de sécurité intérieure ».
Enfin une bonne articulation des fonctions policières ?
La police de sécurité du quotidien est une police de proximité qui peine encore à s’assumer. Flexibilité de la doctrine, rapprochement avec les élus territoriaux, approche globale de la sécurité plus réseau-centrée que pyramidale, prise en compte de tous les acteurs de la sécurité, qu’ils soient en uniforme ou pas, on y retrouve tous les ingrédients de la police de proximité telle qu’elle est pratiquée dans l’écrasante majorité des pays européens.
Si la marque « police de proximité » est devenue clivante en France, peu importe au fond, l’essentiel est que la France (re)découvre les vertus d’une bonne articulation des fonctions policières : les fonctions de renseignement, d’investigation judiciaire et d’intervention ne sont pas des fins en soi mais doivent œuvrer en synergie, en support et en prolongement de l’action de la colonne vertébrale de la fonction policière qu’est la sécurité publique. Cela est valable tant pour la police nationale, que pour la gendarmerie pour qui les termes de « sécurité » et de « police » renvoient à des missions et non pas à une organisation.
La sécurité privée, un produit des carences de l’État
Puisqu’une grande concertation vient d’être lancée par le ministre de l’Intérieur, on peut supposer que les contours de cette police de sécurité du quotidien doivent encore être précisés. La sécurité privée doit être consultée. Comme naguère les polices municipales, la sécurité privée a subi, et subit encore, le chemin de croix des organisations nées des carences de l’État, ou à tout le moins de leur ressenti. Suspicions, divisions, freins au développement, environnement réglementaire défavorable par rapport à la concurrence étrangère sont encore largement le lot des sociétés de sécurité privée. Constat paradoxal alors que l’autre pan – inséparable – de la sécurité privée, la fonction sécurité-sûreté dans l’entreprise, a parcouru un chemin considérable vers la reconnaissance et l’accès aux sphères de décision des Chief Security Officers.
La véritable revue fonctionnelle des missions et de l’organisation de la sécurité publique (encore une fois dans une acception générique de l’expression) qui va découler de la mise en place de la police de sécurité du quotidien est donc l’occasion de reconnaître pleinement la place de la sécurité privée dans le paysage sécuritaire en France. C’est essentiellement la sécurité privée qui garde l’infrastructure en France, qu’elle soit d’importance vitale ou pas. Des pans stratégiques entiers de l’activité économique du pays en dépendent : l’industrie du luxe, le tourisme, l’énergie…. La nuit dans les entreprises appartient aux services de sécurité incendie privés. Les transports de fonds sont assurés par le privé. Les missions de garde du corps, très consommatrices en ressources humaines, sont en majorité le fait de la sécurité privée.
Réforme de la sécurité publique : la sécurité privée doit être consultée
Parce que par nature le ministère de l’Intérieur est aussi celui du développement des territoires et de la gestion des crises, il ne pourra pas faire l’impasse sur le rôle et la place de la sécurité privée dans la police de sécurité du quotidien. Sa consultation devrait donc logiquement inclure les organisations professionnelles patronales, comme le SNES, et les acteurs de terrain de ce secteur socio-professionnel maintenant incontournable. Une orientation probable est sans doute contenue dans le concept de continuum de sécurité intérieure, qui fera l’objet d’un prochain article.