Le développement du coronavirus chinois envoie un message de rappel à la vigilance. Et le marché de s’interroger sur le rythme de la croissance, sur le réglage de la politique monétaire et sur la conjoncture politique. La fin de la campagne pour le premier rendez-vous des primaires démocrates aux Etats-Unis (Iowa le 3 février) va en la matière être très suivie.
La communauté financière continue de s'interroger sur l'impact du coronavirus apparu en Chine dans la ville de Wuhan. Son comportement n’est pas différent de celui du reste du monde. Face au manque de réponses, l'inquiétude et l'attention sont de mise. Bien sûr, on peut avancer qu’à niveau d’information repéré aujourd'hui la mortalité apparaît inférieure à celle de l'épisode du SRAS qui a sévi de 2002 à 2004 : 3% contre 10%. Mais qui peut dire que ce taux ne va pas augmenter ? Dans tous les cas, il est significativement supérieur à celle des maladies « usuelles » (0,1% par exemple pour la grippe).
Dans ce contexte, l'ambiance est risk-off sur les marchés. Ce matin, les bourses asiatiques sont en baisse, tout comme les futures sur indices américains ou européens, tandis que les taux longs se replient. Il est possible que l'épisode en cours soit accentué par une double attitude des investisseurs. D'abord, après les belles performances des actifs risqués, enregistrées en 2019, il est possible de considérer que les niveaux de prix sont plutôt « riches ». D'où une sensibilité à toute mauvaise surprise, à même de « discuter » ces valorisations peut-être élevées. Et puis, le climat actuel favorise la vigilance par rapport aux risques éventuels déjà repérés. Rappelons-les rapidement : un rebond de la croissance économique mondiale qui ne viendrait pas, des réglages monétaires qui ne resteraient pas aussi accommodants qu’anticipé et un stress politique qui ne refluerait pas autant qu’attendu. Où en est-on sur chacun de ces sujets ?
En matière de tempo de l’activité économique, les premières livraisons des enquêtes PMI de janvier envoient un message plutôt rassurant ; à défaut d’être enthousiasmant.
En Zone Euro, l’indice composte se stabilise d’un mois à l’autre (à 50,9). Mais ce sont les services qui sont un peu à la peine, probablement à cause de la situation sociale en France. En revanche, le regard porté sur la dynamique manufacturière continue de s’améliorer, même si le « retour à la normale » n’est pas encore atteint. C’est assurément ce deuxième point qui est le plus important. L’amélioration manufacturière doit être tendancielle, tandis que la déception dans les services est davantage circonstancielle. Du côté du Royaume-Uni, le climat des affaires s’est sensiblement amélioré en début de mois, avec un indice PMI composite en progression de plus de trois points (à 53,1). Le résultat de l’élection générale de décembre dernier a mieux balisé le cadre politique au sein duquel la conjoncture économique se déroulera. Aux Etats-Unis, l’indice PMI composite poursuit sa remontée (53,2 ce mois-ci après 52,8 pour le précédent). Remarquons toutefois le petit repli de la composante manufacturière. Il s’agit de la deuxième baisse consécutive : 51,7 après 52,4 et 52,6 en novembre. Au final, l’idée que l’activité économique mondiale se renforce n’est pas remise en cause. Le rythme est peut-être un peu moins enlevé qu’espéré par certains observateurs.
Du côté des banques centrales, c’est la Fed américaine qui va retenir l’attention dans les jours qui viennent. Elle ne devrait rien changer au sortir de son comité de politique monétaire, mercredi dans la soirée (heure de Paris) ; ni le niveau de son taux directeur, ni le montant des achats de titres du Trésor à court terme, ni sa communication.
Il n’est pas utile de revoir ces différents paramètres, tant que le scénario central de la Fed n’est pas remis en cause. Pour le moment, celui-ci n’est pas remis en cause par l’apparition de la crise sanitaire liée au coronavirus chinois. Notons que la Fed pourrait décider un ajustement technique du niveau du taux servi aux réserves excédentaires des banques. Il pourrait être relevé de 5 centimes (de 1,55% à 1,60%) et ainsi se rapprocher du milieu de la fourchette d’évolution du taux des fonds fédéraux (de 1,50% à 1,75%). In fine, le marché ne devrait pas changer d’avis sur la politique monétaire américaine : le réglage est accommodant, la normalisation n’est pas pour de suite et, si un changement devait intervenir à brève échéance, il serait plus dans le sens de l’assouplissement que du durcissement.
Finissons par la politique. Les élections régionales en Emilie-Romagne éloignent, au moins pour un temps, le risque d'une crise politique en Italie. Le Parti démocrate conserverait la présidence de la région et le gouvernement, malgré le piètre score du Mouvement 5 Etoiles, reste en capacité de résister aux coups de butoir de la Ligue. Au Royaume-Uni, la sortie de l’UE est pour vendredi prochain. Celle-ci se fera en bon ordre, puisqu’un accord avait été trouvé entre le PM Johnson et la Commission de Bruxelles. Bien sûr, le cadre des relations futures entre l’Ile et le Continent reste à définir. Tout est pour le moment confus ; mais le marché sait qu’il doit faire preuve de patience. C’est lundi prochain que les sympathisants démocrates de l’Etat américain de l’Iowa vont se prononcer et ainsi lancer la campagne des primaires de leur parti en vue de la désignation de celui qui portera leurs couleurs dans la course à la présidentielle. Au vu des derniers sondages, Sanders est un peu devant Biden, tandis que Warren est en perte de vitesse. L’image peut déplaire aux marchés. Ceux-ci se rassureront peut-être avec les enquêtes d’opinion réalisées au niveau national. Biden fait la course en tête. Mais attention à la dynamique mise en place par les premiers résultats des primaires.