En matière de santé, le patient a-t-il vraiment son mot à dire ?

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Par Aurel Dalongeville Publié le 22 août 2020 à 6h04
Mortalite Deces Covid19
@shutter - © Economie Matin
3,3%Le taux de positivité des tests PCR en France augmente à 3,3%.

La crise de la Covid-19 est venue accentuer la défiance grandissante des Français à l'égard des institutions médicales. Face à une situation inédite, les discours du gouvernement et des experts médicaux qui se voulaient pourtant rassurants perdent en crédibilité à mesure que les jours passent, que les polémiques enflent et que la crise sanitaire s'aggrave. Perdus au milieu de prises de positions politiques, médiatiques et scientifiques contradictoires, les Français finissent par s'improviser juges des bonnes et mauvaises pratiques en matière de santé.

À l'heure où la vie « normale » reprend son cours, les laboratoires pharmaceutiques, dont certains ont cristallisé une partie de l'opinion contre eux, doivent sans attendre regagner la confiance des Français en accompagnant notamment leur envie de s'impliquer plus fortement dans leur santé.

D'une crise sanitaire à une crise de confiance

Début mars, malgré 40 000 millions de Chinois confinés et le classement de l'épidémie en « urgence de santé publique » par l'OMS, la France tarde à réagir. Et, alors que les citoyens, incrédules, se voient finalement contraints de rester chez eux, les beaux discours sur une France forte et bien préparée se fissurent. Toutes les conditions sont réunies pour une explosion des thèses complotistes. Sur les réseaux sociaux, on peut lire que Bill Gates a financé la crise, que le virus a été créé en laboratoire, que la 5G est responsable de la diffusion de la pandémie… Une lumière apparaît pourtant au bout du tunnel, en la personne d'un infectiologue de renom, aussi charismatique que clivant, le professeur Didier Raoult. Celui-ci affirme avoir trouvé un traitement efficace pour prévenir les formes graves de la maladie. Aussitôt fustigé par ses pairs, son look atypique et son franc parler lui attirent la sympathie du public, ainsi que de certains politiques. Le débat prend un virage passionnel. Et, lorsque ce même professeur accuse certains membres du conseil scientifique d'entretenir des liens avec des laboratoires pharmaceutiques concurrents, la défiance envers les institutions de santé atteint son paroxysme. C'est alors un débat sur ce que représente la parole du médecin qui s'ouvre sur les réseaux sociaux.

Tous médecins ?

Dans ce contexte inédit de défiance, reprendre le contrôle sur la situation consiste pour bon nombre de Français à devenir acteurs de leur santé. Livrés à eux-mêmes, ils adoptent des comportements pour se protéger ou se soigner, qui relèvent parfois d'une totale improvisation. Certains vont même jusqu'à exiger de leur médecin qu'il leur prescrive tel ou tel traitement dont ils ont entendu parler sur Internet. Et, parce que la Covid-19 a montré les limites du savoir scientifique, mais aussi rappelé à chacun son humanité et donc sa mortalité, une frange de la population se lance dans une course à l'immunité. Sport, nutrition, automédication et compléments alimentaires… Jamais le lien entre santé et habitudes de vie n'aura été aussi bien compris. Une reprise en main qui vise à lutter contre un virus que personne ne semble comprendre, mais aussi à se donner toutes les chances de résister à un prochain épisode pandémique. À l'heure où les Français retrouvent progressivement le chemin des cabinets médicaux, personne n'est capable d'affirmer que ces comportements perdureront.

Naissance d'un nouveau triptyque dans le secteur de la santé

Ce qui est certain en revanche, c'est que désormais les citoyens ne veulent plus être écartés des débats qui concernent leur santé. Un nouveau triptyque se dessine donc.
Alors que les laboratoires pharmaceutiques et les médecins constituaient jusqu'à présent les références absolues en matière de santé, la crise a fait entrer sur la scène un nouvel acteur : le citoyen. Reste que seule la parole scientifique est recevable et il est important que les acteurs du secteur donnent du sens à cette nouvelle triangulation en remettant le particulier à sa juste place. Il ne s'agit plus de dénigrer son avis comme c'était encore

trop souvent le cas avant la crise, mais au contraire de l'écouter, afin d'être en mesure de lui envoyer les bons messages de réassurance face à ses doutes et à ses croyances. Le débat doit impérativement être dépassionné pour redevenir audible. D'autant qu'il est primordial de rappeler qu'au-delà des polémiques, la solution à cette pandémie et à toutes celles qui pourraient survenir dans les prochaines années se trouve uniquement dans les laboratoires de recherche et en aucun cas sur les réseaux sociaux : regagner la confiance est donc clé !

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Senior consultant / Directeur d'études chez June Marketing

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