Actuellement en liquidation judiciaire, la centrale d’achats Audiocentrale SA des Compagnons de l’Audition traverse une zone de turbulences, tout en souhaitant sauvegarder au mieux ce qui a fait le succès depuis 2007 : éthique, qualité et indépendance d’un réseau d’audioprothésistes dont le label qualité « compagnons de l’audition » a été reconnu et certifié par Bureau Veritas il y a moins d’un an.
Le dossier est aujourd’hui entre les mains de l’administrateur judiciaire Jérôme Cabooter, mais ce ne sera pas forcément le plus complexe devant passer sous les fourches caudines des tribunaux de commerce. Pour autant, l’affaire est d’importance pour les audioprothésistes du réseau, avec une brèche possible dans l’un des piliers des Compagnons : l’indépendance. Le réseau des Compagnons de l’audition et leur centrale d’achats coopérative ne manquent en effet pas de qualités largement reconnues, susceptibles d’aiguiser les appétits sur un marché en pleine évolution.
Un label reconnu
Très réputés parmi leurs pairs au sein du secteur de l‘audioprothèse, les audioprothésistes Compagnons ont aussi été récemment adoubés par des tiers comme Bureau Veritas Certification. Ce dernier a en effet récemment certifié la démarche qualité des Compagnons de l’audition : Bureau Veritas a créé à cette fin un référentiel reprenant celui du label des compagnons de l’audition. Instauré en 2015, ce label est la conséquence d’une stratégie orientée qualité, décidée en 2013. Pour Marc Froger, directeur du comité scientifique des Compagnons de l’Audition, « la certification vise en premier lieu à améliorer la prise en charge des patients en fournissant une meilleure qualité de soins. » Les Compagnons ajoutent par ailleurs que la pratique de leur label « donnera encore plus de sécurité aux patients pour leur santé auditive ». Dans la pratique, la tête de réseau, puis 45 laboratoires d’audioprothèses appartenant au réseau, ont préalablement été audités. La totalité du réseau est prévue pour être certifiée début 2018. Cette certification sera désormais non seulement une condition sine qua non de l’intégration au sein du réseau, mais elle sera de plus à renouveler tous les trois ans.
Une charte orientée « patient »
Ce label n’est pourtant que la dernière brique d’un édifice patiemment construit depuis la création de la coopérative des Compagnons de l’Audition. Comme le rappelle Michel Wiplier, président et fondateur de la coopérative, « La philosophie des Compagnons de l’Audition tend à ne pas faire des audioprothésistes de simples vendeurs d’appareils. Ils s’engagent sur un service : la réhabilitation audioprothétique du patient, qui s’étend de l’appareillage à la fin de vie du patient. C’est pour cette raison et pour faire respecter le professionnalisme indispensable à la bonne pratique du métier d’audioprothésiste que nous avons décidé de mettre en place ce label ». Michel Wiplier défend cette philosophie depuis les débuts : c’est notamment lui qui est à l’origine de la création du concept d’éthique des Compagnons et de la charte afférente.
Depuis 2008 et la mise en place de cette charte éthique, les audioprothésistes du réseau ont aussi mis en avant une autre spécificité pour faire la différence sur le marché : leur totale indépendance vis-à-vis de l’ensemble des acteurs du marché. Les Compagnons ne sont en effet pour l’instant non seulement affiliés à aucune enseigne, mais leur centrale d’achat Audiocentrale leur a permis de plus de rester indépendants des fabricants et fournisseurs. C’est cette centrale d’achats, pierre angulaire et clé de voûte logistique des Compagnons, qui traverse actuellement des difficultés. Et sa situation inquiète au sein du réseau : sa vulnérabilité actuelle l’expose financièrement sur un marché qui connait depuis des années des restructurations massives et des bouleversements nombreux, notamment du côté des mutuelles et des réseaux des soins. Les acquisitions et les absorptions sont nombreuses depuis quelques années. Mais, comme expliqué sur leur site, l’idée reste de « confier son audition à un professionnel indépendant et libre de ses choix ». Or cette indépendance et cette liberté de choix reposent pour l’essentiel sur l’indépendance de la centrale d’achat vis-à-vis de l’ensemble des protagonistes du marché : fabricants, fournisseurs, mutuelles ou réseaux de soins.
La suite de l’aventure des Compagnons n’est pas encore écrite, mais nul doute que le sort réservé à leur centrale d’achats sera déterminant pour la pérennité d’un réseau qui a pourtant fait la preuve de son professionnalisme et de son attachement à une certaine idée du soin audioprothétique.