Continuité dans la politique de la FED : pas de taux négatifs mais des taux zéro jusqu'en 2022 et un QE qui ne ralentit plus. Les déficits européens explosent, et devraient rester conséquents l'année prochaine, la BCE va devoir continuer à monétiser la dette. Le déficit américain augmente lui aussi mais il existe une bizarrerie : la dette a progressé beaucoup plus vite que le déficit car l'état fédéral a augmenté ses liquidités de manière massive et inhabituelle.
Point de marché : la Fed confirme sa trajectoire
Le temps des annonces tonitruantes est fini et la Fed a essentiellement confirmé que sa politique monétaire extrêmement laxiste serait maintenue pour longtemps.
Il y a néanmoins plusieurs points à souligner :
D'une part le « dot chart » montre que les Fed Funds seront maintenus à leur niveau actuel jusqu'en 2022. Les banques centrales ont dans leur immense majorité assoupli énormément leurs conditions monétaires mais aussi musclé les « forward guidance ». La Fed est donc totalement dans l'air du temps. Il est aussi à noter qu'aucun de ces dots n'est négatif : dit autrement, il n'y a pas un seul membre qui anticipe des taux négatifs. Là aussi ce n'est pas une surprise, mais cela vaut la peine d'être souligné. Les anticipations de marché sur les Fed Funds ne sont plus négatives mais restent microscopiques avec des Fed Funds à 0,015 point de base (0,00015%) à la fin de l'année prochaine.
Deuxième point le QE, les achats hebdomadaires ont considérablement ralenti, elle a mis en place la maxime Greenspanienne « go early, go big ». Toutefois la Fed s'est engagée à augmenter son bilan « à la vitesse actuelle » soit 80 milliards de Treasury par mois et 40 milliards d'ABS.
Dernier point, pas de contrôle des taux, le « yield curve control », en vue. Les perspectives économiques restent très détériorées, l'analyse sur le sujet n'a quasiment pas changé depuis le dernier FOMC, mais en revanche la Fed note une amélioration des conditions financières. Nous l'avions aussi illustré par le passé avec le graphique ci-dessous.
Déficits publics en hausse en Europe
Bien sûr les déficits publics vont progresser très fortement cette année.
Plusieurs points méritent toutefois d'être mentionnés.
Pour l'Italie, le déficit mensuel de mai, publié il y a quelques jours, montrait une détérioration très forte par rapport à l'année dernière alors que le déficit avait tendance à se réduire en début d'année. A ce rythme, le déficit dépasserait les 200 milliards cette année, proche de 10% du PIB.
Pour la France, un troisième projet de loi de Finances rectificative a été publié hier, avec des besoins de financement de 360 milliards d'euros cette année et un déficit de budgétaire de 222 milliards d'euros, contre 185,5 milliards lors de la révision précédente il y a deux mois. Il faut toutefois souligner que les taux d'emprunts français restent impressionnants. Ce matin le taux moyen constaté sur les 68 OAT cotées (pondéré de la taille de chaque souche) était de -0,20% ! Notons que le coupon moyen qui est effectivement payé est de 2,02%. Le chiffre de -0,23% représente donc le cout théorique de la dette si elle devait être réémise aujourd'hui. Les besoins de financement colossaux de l'état français, devraient donc être financés à un taux négatif, ou très proche de zéro puisque les émissions sont plus longues que la dette existante. L'Etat français est payé pour emprunter.
Enfin, en regardant un peu plus loin, il faut souligner que Klass Knot, le très orthodoxe président de la Banque Centrale des Pays Bas, a déclaré « Il ne serait pas sage de précipiter la consolidation des finances publiques après la crise ». Si même Klass le dit ! Les déficits ne disparaitront bien évidement pas d'un coup de baguette magique avec le dé-confinement, cela explique aussi pourquoi la BCE a étendu son PEPP jusqu'à mi-2021, la monétisation de la dette devra se poursuivre l'année prochaine.
Déficits publics en hausse (aussi) aux Etats-Unis
Le déficit mensuel de l'état fédéral américain était de 398,8 milliards en mai, ce qui porte le déficit total depuis le début de l'année à 1 523,8 milliards.
Pas de problème toutefois pour le financement, la Fed a acheté sur la même période 1 805,5 milliards de Treasuries, soit beaucoup plus que le montant du déficit.
Toutefois, il faut souligner une bizarrerie : la dette de l'état a progressé sur la même période de 2 670 milliards, soit beaucoup plus que le déficit ne le suggère. Où est passée la différence ? Si l'état a beaucoup plus emprunté qu'il n'a dépensé, il doit avoir des liquidités. On retrouve effectivement cela dans le compte de dépôt du Trésor à la Fed qui a littéralement explosé. Dit autrement, une partie très conséquente du déficit futur a été préfinancée.