Négociations commerciales entre la Chine et les Etats-Unis, crise sociale française, report du vote du Parlement britannique sur le Brexit... Les marchés sont dans l'expectative...
Que faire ?
C’est sans doute la question que se posent beaucoup de dirigeants politiques autour du globe à l’heure actuelle. Les policymakers américains et chinois savent que la négociation commerciale entre les deux pays doit avoir progressé suffisamment pour que les conditions d’une poursuite au-delà de la fin du mois de février prochain soient remplies. C’est sans doute pour cela qu’on a fait savoir que Lighthizer et Mnuchin, côté américain, et Liu He, côté chinois, se sont parlés mardi 11 décembre au matin. Ce sont assurément des « poids lourds » de part et d’autre. Avec, et c’est intéressant de le noter, le choix de la Maison Blanche de mettre en face du négociateur pour le gouvernement de Pékin deux personnalités aux vues assez différentes. Lighthizer veut rendre les deux économies moins interdépendantes et Mnuchin veut réussir à ouvrir davantage l’économie chinoise aux produits et services américains. On le sait, les discussions seront longues et compliquées et il y aura des moments de tensions au cours des prochains trimestres. Il n’empêche que le message envoyé aujourd’hui paraît bien être le suivant : malgré l’affaire Huawei, les pourparlers doivent aller de l’avant. Il est peut-être faible aux yeux du marché. Il n’en est pas moins important.
Le Président Macron a présenté lundi 10 décembre au soir une série de propositions pour tenter de mettre fin à la crise sociale qui dure depuis plus de quatre semaines. Le cumul des annonces de baisse de charges, d’augmentation de dépenses ou d’annulation de nouvelles taxes doit atteindre autour de 10 milliards d’euros, soit 0,4 point de PIB. Par ailleurs, la croissance française pâtit des blocages et manifestations en cours. Ainsi la Banque de France vient de revoir son estimation d’avance du PIB pour le quatrième trimestre de 0,4% (T sur T) à 0,2%. Quid de la suite ? On ne sait pas bien, mais mettre le tout en perspective fait conclure à une impasse des comptes publics en 2019 plus importante que prévue. Le chiffre consensuel jusqu’alors de 2,8 points de PIB (dont, rappelons-le, près d’1 point au titre de la conversion du CICE – crédit d’impôt compétitivité emploi - en baisse de charge pour les entreprises) devrait être revu, toutes choses égales par ailleurs, à sans doute 3,5 points. Cela sera-t-il le cas ? En fait et à l’heure actuelle, on n’en sait rien. Le gouvernement devrait décider d’actionner d’autres curseurs (annulation ou report d’autres dépenses, ou baisses d’impôt, voire nouvelles recettes) pour compenser en partie ce dérapage annoncé des comptes publics.
Il n’empêche que la stratégie du Président français est malmenée. Rappelons-la brièvement.
1. Profiter d’une conjoncture économique mondiale favorable (celle du second semestre 2017) pour enclencher des réformes de structure ;
2. Un double objectif était poursuivi au travers de la mise en place de celles-ci : relever le potentiel de croissance de l’économie française et accélérer la consolidation des comptes publics ;
3. Fort de ces fondamentaux économiques et financiers renforcés, le temps de la redistribution pouvait être enclenché.
En termes de calendrier et avec un séquençage un peu sommaire, la première partie du quinquennat devait être consacrée à l’économie et la seconde davantage au social, mais sans remettre en cause la compétitivité retrouvée des secteurs marchands et non-marchands.
Comment ne pas voir qu’on n’en est plus là ? L’économie mondiale est moins dynamique et les moments 2 et 3 de l’approche s’entrechoquent. Je ne crois pas qu’il y ait beaucoup d’exemples historiques, si tant est qu’il y en est, où, dans un contexte économique affaibli, un gouvernement arrive « en même temps » à réformer et à redistribuer.
Décidemment il se passe toujours quelque chose chez nos voisins britanniques ! Et voilà que la Première ministre May reporte le vote du Parlement sur l’accord de séparation d’avec le Confinent sur lequel elle s’était entendue avec les institutions de Bruxelles. Pourquoi cela ? Assurément parce que la défaite annoncée aurait été si forte que la question de sa survie politique, en tant que Chef du gouvernement, aurait été posée. Ou alors, et probablement plus grave encore car cela aurait conduit à de nouvelles élections générales, parce que le gouvernement risquait de tomber sous le coup d’une motion de censure.
Que va-t-il se passer maintenant ? Il est probable que la stratégie de Theresa May reste la même. C’est la tactique qu’elle fait évoluer. La capacité à trouver une majorité parlementaire pour voter le texte passe par à la fois un refus du No-Deal Brexit et par la prise de conscience que la contrainte de calendrier n’offre qu’une seule alternative : se ranger à la proposition de la Première ministre. Elle pensait réussir la manœuvre en deux temps : acte 1 voué à l’échec aujourd’hui et acte 2 début janvier avec une victoire à la clé. Si elle persiste dans l’approche, elle n’a plus de droit à l’erreur. Il va y avoir du suspens ; n’est-ce pas le message envoyé par la baisse de la livre ?