Le lien entre communication et action

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Par Hervé Goulletquer Publié le 2 mars 2020 à 13h57
Covid 19 Coronavirus
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1000 MILLIARDS ?Le coronavirus aurait fait perdre 1.000 milliards d'euros à l'industrie du tourisme européenne.

Le marché attendait un signe de la part des banques centrales. C’est la banque centrale américaine qui « s’y est collée ». Le message est court et prend davantage la forme de l’affirmation d’une position de principe (l’économie sera soutenue si nécessaire) que celle d’un plan d’action un tant soit peu détaillé.

Insistons sur les deux points qui seront clé pour les marchés au cours des prochains jours/prochaines semaines : le rythme de reprise de l’activé en Chine et à la fois l’intensité de la propagation de la maladie dans le reste du monde et le moment du ralentissement du nombre de cas. Les réponses de politique économique, avec le rôle des banques centrales, en dépend.

Sur les marchés d’actions, la séance américaine s’était terminée honorablement aux Etats-Unis vendredi soir (heure de Paris), avec un indice S&P500 clôturant près de 3,5% au-dessus du point bas de la journée. Ce matin en Asie, le rebond est fort en Chine (+3,65% à 07h30 pour l’indice CSI 300) et marqué à Hong Kong et Tokyo (de +0,8% à +0,9%). Pour ce qui est de l’Europe, les marchés des futures pointent en direction d’une ouverture à la hausse.

La raison à cela ? Un mélange d’espoir et d’anticipation d’une initiative des banques centrales, pour enrayer la dynamique délétère qui menaçait les marchés de capitaux. L’attente, qui avait grandi les jours précédents, avait pris encore plus de force avec la sinistre clôture de Wall Street jeudi soir. N’avait-on pas vu l’indice S&P 500 perdre 2% au cours de la dernière heure de cotation ?

C’est la banque centrale américaine qui « s’y est collée ». A 18h30 (heure de Paris) vendredi dernier, un communiqué signé du Président du Board, Jerome Powell, envoie le message attendu : la Fed est prête à agir. En sait-on beaucoup plus ? Non ; le message est court et prend davantage la forme de l’affirmation d’une position de principe (l’économie sera soutenue si nécessaire) que celle d’un plan d’action un tant soit peu détaillé. Voici le texte : « Les fondamentaux de l'économie américaine restent solides. Cependant, le coronavirus présente des risques évolutifs pour l'activité économique. La Réserve fédérale suit de près l'évolution de la situation et ses implications pour les perspectives économiques. Nous utiliserons nos outils et agirons comme il convient pour soutenir l'économie ».

La réaction immédiate du marché fût sans surprise : la Fed va baisser son taux directeur très rapidement. Une baisse du taux directeur de 25 centimes, peut-être davantage, est attendue dès le comité de politique monétaire du 18 mars prochain.

Bien sûr « dans la vraie vie », le lien entre communication et action n’est pas toujours direct. Face à la sombre psychologie des marchés, il était important de montrer que les banques centrales se tenaient prêtes à agir. C’est ce que la Fed a fait et c’est bien. Maintenant, le passage à l’acte va dépendre des évolutions sur le double front de l’épidémie et de la croissance et sa déclinaison devrait prendre la forme d’une utilisation large des leviers de politique économique disponibles (nous en avons déjà parlé). En sachant de plus que les réponses d’un pays à l’autre pourront être différentes, en fonction des dynamiques en cours et des outils à disposition.

Disons deux mots sur l’évolution de la maladie. On le sait ; la vague des nouveaux cas perd en puissance en Chine, mais gagne en intensité ailleurs. C’est cette montée qu’on va suivre au cours des prochains jours, en essayant aussi de repérer quand le point d’inflexion vers la baisse du nombre de nouveaux cas pourrait être atteint.

Concernant l’activité économique, la publication des enquêtes PMI de février en Chine était très attendue. N’est-ce pas la première indication qui se veut exhaustive de l’ampleur du choc reçu ? Celui-ci est très fort ; plus qu’attendu par le consensus des économistes. L’indice composite (secteurs manufacturier et non-manufacturier pris ensemble) de près de 25 points à 28,9. Il y a sans doute deux conclusions à tirer du constat. D’abord, il est probable que le PIB de la Chine reculera d’un trimestre à l’autre en T1. Ensuite, et c’est le plus important, il faut suivre le rythme de retour à la normale de l’activité économique, dans le sillage d’une « meilleure maîtrise » de l’épidémie. Des informations éparses suggéraient un niveau d’activité au cours de la première moitié du mois de février entre 30% et 50% de la normale. Il se murmurait la semaine dernière que celui-ci remontait vers 60 à 70%. Cela paraît plutôt cohérent avec ce qu’on comprend de l’évolution de la maladie.

Concluons en insistant sur les deux points qui seront clé pour les marchés au cours des prochains jours/prochaines semaines : le rythme de reprise de l’activé en Chine et à la fois l’intensité de la propagation de la maladie dans le reste du monde et le moment du ralentissement du nombre de cas. Les réponses de politique économique, avec le rôle des banques centrales, en dépend.

Changeons de perspectives et parlons de la poursuite des primaires démocrates aux Etats-Unis. Joe Biden a gagné celle de Caroline du Sud (48,4% des voix). Parmi les autres candidats, seul Bernie Sanders s’en sort honorablement (19,9%). Les autres prétendants sont en difficulté : au centre Amy Klobuchar et à l’extrême-gauche Elisabeth Warren, si elles n’ont pas encore renoncé, voient leurs chances d’aller au bout du processus nettement compromises. A gauche, Pete Buttigieg a annoncé qu’il renonçait à aller plus loin dans la course. Le Super Tuesday de demain permettra de mieux hiérarchiser le potentiel des trois candidats respectifs du centre de la gauche et de l’extrême-gauche, à savoir Biden, Bloomberg et Sanders. Au sortir de cette série d’élections, 38% des délégués auront été attribués. Pour l’instant, l’avantage est à Sanders ; mais un éventuel accord entre Biden et Bloomberg « rebattrait les cartes ».

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Hervé Goulletquer est stratégiste de la Direction de la gestion de La Banque Postale Asset Management depuis 2014. Ses champs d’expertises couvrent l’économie mondiale, les marchés de capitaux et l’arbitrage entre classe d’actifs. Il produit une recherche quotidienne et hebdomadaire, et communique sur ces thèmes auprès des investisseurs français et internationaux. Après des débuts chez Framatome, il a effectué toute sa carrière dans le secteur financier. Il était en dernier poste responsable mondial de la recherche marchés du Crédit Agricole CIB, où il gérait et animait un réseau d’une trentaine d’économistes et de stratégistes situés à Londres, Paris, New York, Hong Kong et Tokyo. Il est titulaire d’une maîtrise d’économétrie, d’un DEA de conjoncture et politique économique et diplômé de l’Institut d’Administration des Entreprises de Paris.

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