La baisse du nombre de chômeurs compte tenu des temps partiels

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Par Julien Manceaux Publié le 26 septembre 2020 à 8h03
Chomage Baisse Deuxieme Trimestre 21
@shutter - © Economie Matin
11,8%La zone euro a vu son économie chuter de 11,8 % au deuxième trimestre 202

Le nombre de chômeurs a continué de baisser en août, témoignant du fait que les travailleurs à temps partiel qui avaient perdu leur poste pendant le confinement retrouvent de l'activité. Il semble que la situation des 2,4 millions encore en chômage partiel en juillet n'ait donc pas basculé vers le chômage au mois d'août. Les derniers indicateurs d'activité font cependant peser le risque d'une reprise moins dynamique au T4, ce qui pourrait changer la donne.

  • Les nouvelles mesures de lutte contre l'épidémie devraient avoir un impact direct limité, mais un impact important sur la confiance
  • Les dernières enquêtes d'activité laissent supposer que la reprise plafonne
  • Alors que les travailleurs à temps partiel et les contrats courts retrouvent du travail, les rangs du chômage ne se gonflent pas encore du fait de faillites ou de restructuration d'entreprises.

Le climat des affaires rebondit alors que de la lutte contre l'épidémie implique de nouvelles mesures

En France, des mesures ont de nouveau été mises en place pour lutter contre l'épidémie de Covid-19, notamment dans les grandes villes où les rassemblements de plus de 10 personnes sont désormais interdits, les salles de sports doivent arrêter leurs activités et les bars et restaurants doivent désormais fermer à 22h (la fermeture totale a même été imposée dans certaines villes comme Marseille). Pour l'instant, les écoles restent ouvertes et les travailleurs reprennent le travail avec toute l'artillerie de distanciation sociale disponible. Nous nous attendons à ce que ces nouvelles mesures aient un impact direct limité sur certains secteurs, ceux où le rebond de l'activité a par ailleurs été le plus faible (événements, tourisme, arts du spectacle, restaurants). Tant que les écoles resteront ouvertes et que les gens pourront se rendre au travail en toute sécurité (ou faire du télétravail), la reprise de l'activité ne sera pas remise en question. Toutefois, nous nous attendons à ce que ces mesures aient un impact plus important sur la confiance, avec une augmentation des comportements d'épargne par les ménages en octobre et plus de prudence dans les dépenses de consommation.

Dans cette perspective, les indicateurs de confiance des entreprises pour le mois de septembre, publiés hier, reflètent le fait que la prudence accrue et les mesures pour limiter l'épidémie touchent pour l'instant principalement le secteur des services.

La confiance dans l'industrie manufacturière a en effet continué à se rétablir en septembre, conformément à la hausse affichée cette semaine par les indices PMI (qui sont passés de 49,8 à 50,9). L'enquête de l'INSEE, selon laquelle le climat des affaires du secteur manufacturier est passé de 92 en août à 96 en septembre, montre que l'amélioration des carnets de commande et la diminution des stocks permettent aux fabricants de continuer à planifier de la production, alors que les niveaux de production récents augmentaient plus rapidement qu'avant. Ils restent néanmoins prudents en ce qui concerne la situation financière de leur entreprise mais, dans l'ensemble, la confiance n'est pas loin de ses niveaux d'avant la crise.

Dans le secteur des services, où le rebond de l'activité était plus marqué cet été, le pessimisme est de retour et les récentes mesures prises pour lutter contre l'épidémie ne feront rien pour le changer. Bien que l'enquête INSEE montre que l'activité récente a été meilleure et que la situation des entreprises s'est améliorée sans interruption depuis le mois de mai, elle suggère également que le vent tourne pour les perspectives (Graphique 1). De même, les intentions d'investissement restent à la hausse, bien que les intentions d'embauche se soient détériorées en septembre (seul le travail temporaire semble progresser). Dans l'ensemble donc, la confiance dans les services a augmenté en septembre… mais avec une détérioration de ses composantes les plus prospectives (ce qui explique en partie la mauvaise enquête PMI de septembre, où la composante du secteur des services a chuté à 47,5). Cela souligne à quel point les entreprises restent prudentes face aux incertitudes du Covid-19, que les dernières mesures anti-Covid ne font qu'accroître.

Gr 1 Le doute regagne du terrain dans les services

Souce: Refinitiv Datastream

Nous ne pensons pas que tout cela devrait entraver le fort rebond du PIB attendu pour le troisième trimestre de l'année prochaine (+55% en termes annualisés). Cependant, il signale clairement le risque d'un ralentissement de la dynamique au 4ème trimestre, confirmant que l'économie française continuera d'évoluer en dessous de 95% des niveaux d'activité pré-Covid jusqu'à la mi-2021 au moins.

La baisse de l'activité partielle n'entraine pas (encore) de hausse du chômage

Les statistiques de chômage du mois d'août laisse entrevoir que l'évolution observée ces derniers mois se poursuit. Le nombre de chômeurs complets (catégorie A) a diminué de 171 000 en août, comme en juillet, ce qui implique que la baisse totale du nombre de chômeurs depuis le mois d'avril est de 694.000. Toutefois, cette diminution cache un glissement entre catégories de chômeurs. Sur base de la décompostion des chiffres par catégorie, on peut observer qu'une partie des chômeurs à temps plein de la période avril-mai (où plus d'un million de travailleurs temporaires - intérimaires et contrats courts - avaient perdu leur poste) semblent avoir retrouvé des emplois partiels (et sont ainsi comptabilisés dans les catégories B et C). Cela signifie que la hausse du nombre de chômeurs observée pendant le confinement et la diminution observée depuis est causée principalement par la population composée de personnes ayant des contrats courts ou occasionnels. Avec les déconfinement, ces personnes semblent donc avoir repris le rythme d'activité qu'ils occupaient au préalable.

Gr 2 La diminution du nombre de chômeurs est principalement causée par un glissement entre catégories

En milliers de personnes, évolution par rapport au mois précédent
Source: Refinitiv Datastream, ING Economics Research

Dans le même temps, la DARES indique que le nombre de travailleurs en activité partielle est en forte diminution sur les derniers mois (les derniers chiffres faisant état de 2,4 millions de salariés dans cette situation en juillet, contre 4,5 millions en juin et 8,8 millions en avril). Il semble donc que, pour le moment, cette diminution du recours à l'activité partielle n'a pas entrainé d'augmentation forte du nombre de chômeurs, indiquant que les suppressions d'emploi suite à des faillites ou restructurations sont encore peu nombreuses.

Pour la suite, tant que les mesures de chômage partiel sont prolongées et que les entreprises évitent la faillite à coup de crédit, la vague pourrait resté limitée. Mais la recrudescence de l'épidémie est un risque qui pèse sur le marché de l'emploi. Nous estimons encore vraisemblable qu'à la fin du quatrième trimestre 2020, la population au chômage aura augmenté de plus d'un demi-million de personnes sur l'année, conduisant le taux de chômage vers 10,5 % (contre 7,9 % au quatrième trimestre 2019). En effet, la fin des « trêves » de remboursement de crédit déclarée par l'Autorité Bancaire Européenne pour les prochaines semaines et l'augmentation probable des faillites d'entreprises pourraient faire basculer une partie des 2,4 millions de travailleurs encore au chômage partiel dans le chômage à temps plein (catégorie A). Comme les travailleurs les plus vulnérables (qui par ailleurs ont aussi la plus forte propension à consommer) seront touchés de manière disproportionnée (car ils sont surreprésentés dans les secteurs les plus touchés comme le tourisme), nous pensons que cela pèsera sur la reprise de la consommation privée tout au long de 2021.

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Julien Manceaux est Senior Advisory Economist chez ING. Il travaille depuis plus de dix ans dans l’équipe Eurozone de la recherche économique d’ING à Bruxelles et suit plus particulièrement les développements macroéconomiques en France. Pour ING, il est également spécialiste des questions de commerce international et de stratégies d’exportations, d’immobilier et d’épargne. Après deux mastères en économie appliquée, Julien vient de terminer le global EMBA de la prestigieuse IESE business school de Barcelone afin d’être au plus près des préoccupations stratégiques des clients d’ING, notamment en matière d’innovation.