« Face à Biden, Poutine penche un peu plus vers la Chine », titrent Les Echos du 5 février. C'est inquiétant, parce que c'est probablement vrai. Or, si la Chine met la main sur la Sibérie, en utilisant sa formidable aptitude à réaliser des voies de communication qui requièrent de gigantesques travaux, et à dynamiser économiquement les territoires ainsi désenclavés, le centre de gravité du pouvoir, sur notre planète, se déplacera : l'Europe et les Etats-Unis, démocraties riches en savoir-faire, ne feront pas le poids face à un géant géographique et démographique dont les compétences technologiques sont déjà quasiment égales aux leurs.
L'Europe doit faire alliance avec la Russie
Bien entendu, Poutine n'est pas un grand partisan de la démocratie, mais entre le régime chinois et le régime russe, il n'y a pas photo : il est moins éloigné que Xi Jinping de l'idéal démocratique. Xi tient ses « sujets » d'une main de fer, et empêche les étrangers de mettre si peu que soit le nez dans les affaires chinoises, tandis que Poutine se borne à conserver certaines manières de faire qui lui ont été inculquées au KGB.
A Davos, le chef du Kremlin a fait une ouverture en direction des Occidentaux, manifestant notamment son désir de consolider la politique de limitation des arsenaux nucléaires. Certes, il n'est pas tendre avec Navalny, mais en comparaison de l'absorption de Hong-Kong par la Chine communiste, et de ce qui risque de se passer pour Taïwan, il n'y a pas photo. Si Taïwan est mise au pas comme l'a été Hong-Kong, quel sera le prochain domino ? La Corée du sud ? En attendant un grignotage du Japon ?
Complémentarité de la Russie et de l'Europe centrale et occidentale
La Russie, elle, n'a pas besoin d'agrandir son espace vital : elle en a à revendre. Ce qu'il lui faut, c'est de la technologie et des hommes pour développer l'immensité sibérienne, qui va bénéficier du changement climatique. Pour pouvoir y travailler, elle a tout intérêt à entretenir de bonnes relations avec l'Union européenne, les autres pays européens, et les pays africains, où les Européens sont bien implantés - encore qu'il faille se faire du souci à ce sujet : la Chine y est très entreprenante.
Eviter une colonisation chinoise du continent africain
Jadis colonisatrices d'une grande partie du continent africain, où elles ne se sont pas toujours bien comporté, mais où elles ont quand même éradiqué l'esclavage et apporté beaucoup d'instruction et de technologie, les nations européennes, notamment la Grande-Bretagne, la France, l'Espagne et le Portugal, sont bien placées pour jouer une carte décisive à l'échelle de la planète : aider à maîtriser une explosion démographique africaine qui rend très difficile l'évolution indispensable des modes de vie et de production.
Aider au recul d'une natalité excessive
Avec actuellement 1,3 milliards d'habitants, en partant de 100 millions en 1900, l'Afrique a été le théâtre d'un phénomène démographique prodigieux. Mais continuer sur cette lancée soulèverait un problème planétaire redoutable, comme d'ailleurs la croissance très rapide de la population de l'Inde, du Pakistan et de quelques autres pays asiatiques. Le problème se pose donc : est-ce un totalitarisme à la chinoise qui ramènera le taux de croissance démographique de l'Afrique à un niveau acceptable, ou une politique plus respectueuse des droits de l'homme ?
Certes, les pays européens ont déjà aidé les populations africaines à débuter la transition démographique indispensable pour que leur avenir ne soit pas tragique : de plus de 6 en 1960, le nombre d'enfants par femme est descendu aujourd'hui à 4,4. S'agissant de l'efficacité, le rouleau compresseur du communisme chinois serait certainement supérieur. Mais c'est de femmes, d'hommes et d'enfants que nous parlons, pas de troupeaux de zébus ! Notre devoir d'occidentaux n'est-il pas d'assumer nos responsabilités ?
C'est nous qui avons rendu possible cette explosion démographique en pacifiant, en éduquant, en apportant des techniques, parfois aussi en brutalisant : à nous d'accompagner les Africains dans le passage difficile de 4,4 enfants par femme à environ la moitié. Une partie du chemin est d'ailleurs déjà parcourue : le taux a culminé à plus de 6 vers 1960, il a donc déjà pas mal baissé, il faut persévérer ! Tout en aidant la Russie, elle, à booster quelque peu sa natalité, aujourd'hui si faible (1,5 enfant par femme).