Même s’il s’agit de deux groupes privés, le gouvernement veut avoir voix au chapitre concernant le mariage entre Numericable-SFR et Bouygues Telecom. Dès le lancement de la rumeur dimanche 21 juin, le politique s’est inséré dans le débat économique.
Emmanuel Macron, le ministre de l’Économie, a été prompt à réagir dès la parution de la rumeur d’une acquisition de Bouygues Telecom par Numericable-SFR. Dans une déclaration à l’AFP, il affirmait ainsi que cette opération n’était pas, selon lui, « souhaitable ». « Que chacun se concentre sur les engagements pris en matière d'investissements, sur l'innovation, sur l'attribution imminente de la bande 700 MHz et sur les opérations. C'est cela qui est bon pour l'emploi dans le secteur, pour la production et l'équipement du pays ».
Méfiance
Ce discours de méfiance a été relayé par son homologue aux finances, Michel Sapin, pour qui le montant de dettes accumulées par Altice, maison-mère de Numericable-SFR, avait atteint un niveau très important. Pas question de bâtir un empire sur « le sable de l’endettement », a-t-il déclaré sur RFI.
Manuel Valls a ensuite embrayé et prévenu Patrick Drahi, patron d’Altice, que le gouvernement ne donnerait pas son aval à un projet qui ne respecterait pas cinq obligations : l’emploi tout d’abord, et on sait que malgré les précautions prises par Altice, il y aura nécessairement des doublons entre Numericable-SFR et Bouygues Telecom. L’investissement ensuite, ainsi que la vente des fréquences 700 MHz — l’État en attend au moins 2,5 milliards d’euros qui iront notamment abonder le budget de la Défense : pas question de s’assoir sur le pactole.
Les enchères compromises ?
Or, les enchères, qui se dérouleront en fin d’année, n’auront pas le même piquant à trois qu’à quatre joueurs. Enfin, le Premier ministre veut que les opérateurs améliorent l’innovation et la qualité du service. Ces investissements ont baissé de 300 millions d’euros depuis l’achat par Numericable de SFR, et il n’est pas question pour le gouvernement de voir ce poste baisser encore à la faveur d’une fusion avec Bouygues Telecom.
Toutes ces déclarations auront-elles un effet sur le conseil d’administration de Bouygues, qui doit se réunir aujourd’hui pour discuter de l’offre d’Altice ? Rien n’est moins sûr. Le précédent de l’an dernier pèse encore dans les esprits : Arnaud Montebourg et le gouvernement avaient pesé de tout leur poids pour pousser SFR dans les bras de Bouygues Telecom… sans y parvenir et en frôlant l’humiliation. En ira-t-il autrement pour Numericable-SFR et Bougyues ?