Poussés par la mouvance écologiste, nos dirigeants, au fur et à mesure des années, ont voté des lois sous la pression électorale pour minimiser la production de CO2, mais aussi supprimer tous les produits pouvant épuiser les ressources naturelles. Ce qui peut se concevoir, mais ce qui l’est beaucoup moins, c’est la précipitation parfois avec laquelle cela se fait au détriment de la suppression de certains pans d’activité, induisant des fermetures de sites, des licenciements avec leurs lots d’incompréhension, de déchaînements de fureur, de souffrance et violences.
Ce qui peut paraître encore plus incompréhensible, c’est que certains employés militaient pour un nouveau monde meilleur, plus économe, près de la nature ! Les mesures prises ont (et vont tuer) sous leurs pieds leur outil de travail, leurs revenus et transformer une vie qui pouvait leur sembler sereine !
A ce sujet, deux idéologies et leurs résultantes s’opposent. Par exemple celle de François de Rugy, co-Président du Groupe EELV et Hervé Label, co-fondateur du CERF (Créateurs d’emplois et de richesse en France). Pour François de Rugy, la transition écologique, c’est la possibilité de développer des activités qui ne demandent qu’à se développer surtout dans le secteur du Bâtiment. Nous pouvons donner du travail à des centaines de milliers de personnes pendant des années, avec l’isolation des logements, travaux non délocalisables. Le développement des énergies renouvelables, c’est aussi de nombreuses opportunités de créations d’activités avec les éoliennes, y compris en mer, l’énergie marine…
Dans un registre diamétralement différent, Hervé Lambel estime que la transition écologiste sera destructrice d’emplois. On aura de véritables problèmes de trésorerie, car on sera obligé de passer par la norme, ce qui sera une vraie contrainte. Les particuliers, qui devront dépenser leur argent pour ces programmes, devront emprunter, cela les privera de ressources pour faire « tourner » les commerces. Cela enclenchera un mouvement destructeur d’entreprises car les plus faibles n’auront pas les moyens de s’adapter. Ce qui se répercutera par des inévitables pertes d’emplois, d’où l’augmentation du chômage.
Cet exemple démontre le degré d’intégration des enjeux environnementaux qui demeurent très hétérogènes selon les secteurs, exemple entre la production d’électricité et les transports.
Ce qui semble logique, c’est qu’il y a un important conflit entre les branches qui prônent le développement économique et celles qui mettent en cause l’excès de réglementation environnementale, surtout dans l’urbanisme, la construction, l’agriculture et celle de la protection de l’environnement. Cette dernière « rue dans les brancards » en estimant que cela va trop lentement, que l’on prend beaucoup de retard. Les controverses se portent surtout sur des choix technologiques tels OGM, nucléaire, gaz de schiste et des projets locaux.
L’enjeu se définit comme suit : "comment stimuler la croissance en maintenant les actifs naturels essentiels au développement humain ?". En plus simple, "comment concilier développement économique et environnement ? "
Les écologistes avancent que productivité globale et politique environnementale ambitieuse peuvent aller de pair, mais cela ne se fait pas spontanément. La qualité économique des régulations environnementales est déterminante, au regard notamment de son impact sur les processus d’innovation. En effet, l’innovation est un des moyens pour nous de continuer de prospérer malgré les contraintes environnementales.
Le plastique, difficilement remplaçable
Prenons le cas du plastique, c’est une branche qui emploie 122.000 personnes et qui était en plein croissance. La première loi de Ségolène Royal de septembre 2015 sur les sacs plastique oxo-fragmentables et ceux de moins de 50 microns d’épaisseur, applicable au 1er janvier 2016, a pris de court les fabricants. Beaucoup ont licencié et certains ont même fermé des usines sans avoir eu le temps de se reconvertir. Le plastique étant dans le viseur des partisans de la transition écologiste, les lois se succèdent à un rythme rapide, mais toutefois pas assez pour les partisans de sa suppression.
Cela a commencé en janvier 2015 par la suppression des microplastiques, en septembre 2015 celle des sacs plastique oxo-fragmentables, le 01.01.2016 les sacs de caisse, le 01.01.2017 les emballages en rayon (sauf biosources), le 01.01.2018 les microplastiques (bulles), le 13.10.2019 les objets plastique jetables, le 01.01.2020 les cotons tiges, assiettes, gobelets, bouteilles, le 01.01.2020 tous les objets à usage unique et polystyrène expansé, le 01.04.2020 les pailles et bioplastique, le 01.01.2022 les emballages usages unique et jouets, le 01.01.2023 les couverts de restauration, le 01.01.2025 les contenants alimentaires, le 01.01.2040 l’ensemble des objets à usage unique, contenants, y compris bidons, tubes dentifrices, etc…
Le fief de cette branche est en grande partie installée dans la Plastique vallée, que je connais bien ; Ain, Jura. Que vont devenir les familles entières qui ne vivent que grâce au plastique, emplois directs et indirects, les écoles, dont l’école supérieure de plasturgie est à Oyonnax. Il faut noter qu’il existe en France 62 établissements de formation plastique qui devront se recycler au fil du temps. Grosse déstabilisation psychologique et même physique en perspective !
Beaucoup de produits plastiques sont difficilement remplaçables. De nombreux spécialistes s’interrogent sur la mise en place d’une interdiction aussi large. Ce n’est pas seulement parce qu’il n’est pas cher mais c’est aussi pour ses caractéristiques techniques : étanchéité, résistance, légèreté, flexibilité, facile à stériliser et à produire. Pour beaucoup de produits, il sera difficilement substituable : Pour l’eau de javel, emballage de produis frais, comment remplacer les films plastiques notamment sur la viande ?
Le jetable représente aux environs de 20% des plastiques, il risque d’être remplacé par d’autres jetables !
Un exemple : S’il n’y a plus de bouteille plastique, il y aura d’avantages de canettes alu. Hors l’alu, le verre, le carton sont loin d’être neutres en termes d’impact environnemental ! Comme le dit Emmanuel Guichard, délégué général d’Elipso, « Ce n’est pas parce que l’on interdit le plastique à usage unique que l’on verra développer le réemploi. »
Il serait très intelligent de performer le tri pour augmenter fortement le recyclage. Les bouteilles en plastique commencent à faire une percée, par contre la consigne de bouteilles plastique est pour l’instant un clash.
Une partie du plastique fait partie du secteur de l’emballage. Ce secteur développe entre 30 à 35 milliards avec près de 200.000 emplois, 900 entreprises de 20 salariés et plus. C’est aussi le 4ème exportateur mondial.
Quels secteurs vont souffrir de la transition écologique ?
Les secteurs de l’énergie, pétrole, gaz, charbon et toutes les entreprises directement impactées ou indirectement avec tous les sous-traitants.
Le secteur de l’emballage comme vu ci-dessus, notamment plastique.
Le secteur des transports sur plusieurs années avant de trouver de nouvelles énergies pour les mouvoir, en particulier l’aviation, aéroports,..
Le secteur de construction de véhicules….
Le secteur chimique, des engrais, des phytosanitaires, polluants,…
La grande distribution avec la concurrence de l’écologie circulaire…
Il en reste encore beaucoup d’autres…
La transition écologique est donc une révolution technologique profonde et multidimensionnelle qui peut se programmer. Ce pilotage suppose de faire des choix, tant en termes de hiérarchie des objectifs et de rythme qu’en termes d’instruments de politique publique.
La transition écologique est une transformation dont les objectifs sont relativement aisés à identifier mais qui nécessite un pilotage par la puissance publique, dans la mesure où les marchés, laissés à eux-mêmes, n’engendreront pas les signaux de prix adéquats. Ce pilotage suppose de faire des choix, tant en termes de hiérarchie des objectifs et de rythme, qu’en termes d’instruments de politique publique.
Les enjeux économiques, humains sont tellement importants qu’il sera très difficile de concilier les attentes de chacun. Les grandes difficultés et craintes seront liées aux coûts supplémentaires, à la perte de compétitivité, engendrant des mutations technologiques, humaines, des reconversions, le stress du changement de lieu, d’emploi, diminution de niveau de vie…
Les débouchés et emplois créés le seront principalement dans le secteur des déchets et environnement qui représenteront 75% du total, suivi par les nouvelles énergies, éolien, photovoltaïque, hydrogène, nouvelle agriculture…
Le relativisme
La France est le 20ème pays du monde par sa population représentant 1% de la population mondiale. La France est le 41ème pays du monde par sa superficie soit 0,05% de la surface habitée du monde. Les surfaces habitées représentant 29% de la surface totale.
C’est-à-dire que si la France réalise complétement les objectifs de réduction et même plus, cela ne changera presque rien au niveau diminution de GES (Gaz à Effet de Serre). Pour la pollution par contre, c’est une évidence, il faut les diminuer au maximum.
Ce raisonnement est toutefois simpliste, car si tous les plus petits pays ne se mobilisaient pas pour le climat, cela représenterait un pourcentage non négligeable. Ce sont donc les pays les plus importants qui par leur fort engagement devront faire pencher la balance du bon côté.