La réglementation du congé de paternité évolue : la Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2021 a doublé sa durée, qui passe de 14 jours à 28 jours, voire davantage pour certaines situations. Cette mesure concerne les naissances et adoptions survenues à compter du 1er juillet 2021 (ou antérieurement s’il s’agit d’un accouchement précoce).
Elle comporte un accroissement de rigidité : alors que les dates du congé de paternité pouvaient antérieurement être fixées par accord entre l’entreprise et le salarié heureux papa, il devra désormais obligatoirement être pris à compter du premier jour ouvrable suivant la naissance. Notre législateur et ceux qui lui préparent les projets de loi donnent ainsi libre cours à leurs tendances caporalistes.
Insuffisance des compensations apportées aux entreprises du fait des naissances qui surviennent parmi leur personnel
On notera aussi que nos élus – et les apparatchiks qui ont concocté le projet de loi - ne semblent pas avoir compris à quel point la natalité peut être freinée par l’absence de compensations financières accordées aux entreprises obligées de se « débrouiller » pour remplacer les parents pris par leur paternité ou maternité : dès lors que les grossesses et les naissances, grandement bénéfiques pour la nation, mais le plus souvent génératrices de difficultés pour les entreprises concernées, ne font pas l’objet de compensations financières, l’entreprise est perdante lorsque ses salariés procréent.
L’intérêt général, dans une telle situation, est que la nation prenne en charge tout ce que la fécondité des travailleurs impose comme problèmes aux organismes (entreprises, associations, administrations) dans lesquels œuvrent les dits travailleurs. Et qu’elle ne s’occupe pas seulement des salariés, mais aussi des travailleurs indépendants. Il reste donc encore du chemin à parcourir pour que soient correctement dédommagés les employeurs et travailleurs indépendants qui rendent service à leur pays, et à l’ensemble de leurs concitoyens, en cherchant à concilier au mieux la vie familiale et les impératifs professionnels.
La faiblesse de la natalité requiert un effort plus conséquent
La mesure globalement positive relative au congé de paternité ne doit pas faire oublier que la France, si elle est moins mal lotie, en matière de natalité, que beaucoup d’autres pays développés, ne réalise pas tout-à-fait le nécessaire renouvellement de ses générations.
Pour l’année 2016 (date un peu ancienne, mais pour laquelle on dispose de données pour tous les pays du Globe), le taux de fécondité, en France, était 2,06 enfants par femme. C’est beaucoup mieux que de nombreux pays européens, où les chiffres atteignent 1,3 ou 1,4 (par exemple 1,36 pour la Pologne, pays jadis fécond), mais il ne faudrait pas descendre plus bas. Or la tendance est baissière : en France, la descendance finale des femmes nées dans les années 1931 à 1935 était 2,48 enfants par femme ; pour les femmes nées être 1961 et 1965, le chiffre n’est plus que 1,99. En Afrique sub-saharienne, c’est plus du double : 4,8 enfants par femme. Un rééquilibrage serait profitable à tous.
La démographie constitue encore un des atouts de la France. Mais si nous ne nous en préoccupons pas davantage, cet atout s’amoindrira et finira par disparaître. La petite mesure prise en faveur de la paternité est sympathique, elle part d’un bon sentiment, mais elle ne suffira évidemment pas à faire remonter la natalité. Il faut voir les choses avec plus de hauteur de vue : rendre notre pays plus accueillant à ceux et celles qui construisent une famille, développer l’équivalent moderne de ce que fut la grande politique familiale instaurée en 1945.
Cette politique a connu un recul considérable, auquel s’ajoute une complexification incroyable : redonnons-lui, sous une forme appropriée, moderne, la vigueur et la simplicité qu’elle avait à ses origines, et notre pays se redressera comme le fait un plant oublié que l’on pense enfin à soigner correctement, le sécateur dans une main et l’arrosoir dans l’autre.