Quel avenir pour le RER B après la décision d’Alstom de retirer l’offre de Bombardier Transports ?

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Par Rédacteur Modifié le 18 février 2021 à 15h20
Alstom Bombardier Fusion 2
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35%La part d'usagers du CDG Express composée d'anciens voyageurs du RER B est estimée à 35%.

Alstom vient d’annoncer jeudi 4 février 2021 sa décision de retirer l’offre de Bombardier Transport pour la livraison des 146 nouveaux trains destinés à remplacer les anciens trains du RER B en 2025. Ce nouveau rebondissement fait planer le risque d’importants retards dans le remplacement d’un matériel roulant vieillissant, et vient renforcer les inquiétudes des usagers du RER B. La mise en service du CDG Express à horizon 2025 permettra, de son côté, de moderniser la ligne. Une bouffée d’air frais pour le trafic du Nord de Paris, plus que jamais nécessaire après la décision d’Alstom.

Une décision lourde de conséquences pour les usagers du RER B

146 nouveaux trains pour remplacer le matériel vieillissant de la ligne B du RER, pour un montant de 2,56 milliards d’euros : c’était l’offre proposée par Bombardier Transport et retenue par le consortium SNCF voyageurs-RATP. « Une offre trop belle pour être vraie » pour Henri Poupart Lafarge, PDG d’Alstom qui a récemment pris le contrôle de Bombardier et qui vient d’annoncer le retrait de cette offre, provoquant l’ire de la SNCF, de la RATP et d’Île-de-France Mobilités. Pour justifier ce qui apparaît comme un nouveau rebondissement dans cette affaire, Henri Poupart Lafarge évoque dans un entretien au Figaro une offre non viable sur les plans technique et financier, avec une « agressivité sur les coûts qui n'est pas raisonnable. Les choix techniques ne comportent aucune marge d'erreur, ceux des équipements sont réalisés au plus juste et le gabarit des trains n'est pas aux normes ». En réaction à cette décision, le groupement RATP – SNCF Voyageurs "se dit prêt à engager toutes les actions judiciaires à l'encontre d'Alstom-Bombardier, compte tenu de l'engagement pris par le groupement Bombardier".

Dans ce contexte, les engagements pris initialement de livrer les nouveaux trains en 2025 pourront-ils être tenus ? Rien n’est moins sûr. « Avec cette décision, les usagers de RER B ne verront certainement pas les nouveaux trains en 2025 » évoque l’Usine Nouvelle. Cette décision sonne en tout cas comme une mauvaise nouvelle pour les usagers du RER B, dont les matériaux vieillissants occasionnent toutes sortes de désagréments régulièrement dénoncés. Selon Michel Babut, vice-président de l’Association des usagers des transports d’Île-de-France, « les trains actuels sont trop vieux, peu fiables et connaissent trop de problèmes de régularité. Les nouvelles rames permettront, selon le cahier des charges établi par Ile-de-France Mobilités, le gestionnaire des transports qui finance le projet, d’augmenter le nombre de voyageurs transportés de plus de 20% ». La ligne B du RER est en effet la deuxième la plus empruntée du réseau, avec près d’un million de voyageurs par jour avant la crise sanitaire. La signature du contrat de livraison des nouveaux trains aurait dû remettre le RER B sur les rails. La décision d’Alstom fait au contraire craindre d’importantes conséquences financières, tant pour les exploitants que pour les usagers, premiers à être affectés par un retard dans la modernisation du réseau.

Pour des usagers excédés, le risque d’un surcoût financier

Un retard dans la livraison des trains, qui serait occasionné par une renégociation des termes du contrat par Alstom, pourrait se répercuter sur la facture payée par les usagers. Île-de-France Mobilités, qui finance le projet, a-t-il les moyens d’aller au-delà des 2,56 milliards d’euros initialement prévus ? Alstom, candidat malheureux à l’appel d’offre, proposait une offre qui dépassait de 500 millions d’euros celle de Bombardier. Mais la crise sanitaire a mis en difficulté IDFM, comme le rappelait en juillet Valérie Pécresse, présidente de la région Ile de France et d’IDFM : « Le Covid est un ouragan qui nous a causé des pertes de recettes abyssales, de 2,6 milliards d'euros : 1,6 milliard de recettes commerciales perdues en raison de la chute de la fréquentation et un milliard du versement mobilité. Depuis le début, nous avons payé pour l'équivalent de 100 % des services avec 30 % des trains qui roulaient, des trains eux-mêmes vides. Nous l'avons fait en pensant que l'Etat serait à nos côtés ». Depuis, un accord qualifié de « plan de sauvetage des transports » a été trouvé avec l’Etat sur le financement des transports en Ile-de-France pour compenser cette perte de recettes. Mais la crise sanitaire s’éternise, au point qu’elle pourrait contraindre la région à décaler son plan d’investissement qui comprend notamment le financement de nouveaux trains pour le RER B. Si la facture venait à augmenter suite à un nouvel appel d’offres, ce sont les usagers qui devraient payer : soit par une diminution de l’offre de transport, soit par une hausse des tarifs payés.

La contribution du CDG Express à la modernisation du RER B, un espoir pour les usagers

Le RER B serait-il alors une « ligne maudite », comme certains le qualifient ? Face à cette modernisation dont l’horizon semble reculer, que peuvent attendre les usagers ? Prévu à horizon 2025, le projet CDG Express, au coût estimé à 2,2 milliards d’euros dont 1 md€ a déjà investi, prévoit 537 millions d’euros spécifiquement dédiés à la modernisation des transports du quotidien. Dans le contexte du rejet par Alstom de l’offre de Bombardier, ces fonds sont l’occasion de commencer la nécessaire modernisation du RER B avant la livraison des nouveaux trains, et ce sans impact financier pour les usagers. Le financement du CDG Express est en effet assuré par un apport en fonds propres des trois actionnaires (Groupe ADP, SNCF Réseau et la Caisse des Dépôts) et par un prêt de l’Etat, remboursé avec des intérêts. La livraison des futurs trains dépend d’ailleurs étroitement de la modernisation des voies dont le projet de CDG Express a la charge. En particulier le Pont 1 à la sortie de la gare du Nord : datant de 1894, il doit être remplacé pour permettre le passage des nouveaux trains à double étage.

Prévue en 2025, la mise en service du CDG Express n’interviendra pas avant ces travaux de modernisation du RER B. Quant au CDG Express lui-même, il contribuera à soulager le RER B d’une part importante des voyageurs qui l’utilisent pour se rendre ou quitter l’aéroport Charles-de-Gaulle. La part d’usagers du CDG Express composée d’anciens voyageurs du RER B est ainsi estimée à 35%. Une décongestion bienvenue en attendant les nouveaux trains du RER B après 2025.

Au-delà des conséquences de cette bataille judiciaire qui s’engage entre Alstom et le groupement RATP-SNCF à propos de la livraison des nouveaux trains du RER B, c’est le renouveau de l’offre de mobilité en Île-de-France qui est en jeu, avec ses conséquences sur la relance économique et sur la transition environnementale. Thiery Mallet, PDG de Transdev et président de l’Union des Transports Publics et Ferroviaires (UTP) l’évoquait ainsi en juin dernier : « sans soutien, le report vers les modes de déplacement individuels carbonés et l'augmentation de la pollution de l'air nous feront revenir dix ans en arrière, annihilant toute crédibilité des engagements en faveur de l'environnement, pour une mobilité durable et une croissance verte. » En attendant ce soutien et les futurs trains du RER B qui risquent bien de se faire attendre, la contribution de 25% du budget du CDG Express à la modernisation des transports du quotidien apparait comme une première étape bienvenue vers le renouveau de l’offre de transport francilienne.

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