Alors que l’Union européenne avance sur le sujet de l’identité numérique à travers différents appels d’offres, il est temps pour les entreprises de se pencher sur le sujet en commençant à mener des expérimentations dès aujourd’hui
La Commission européenne a récemment clôturé un premier appel d’offres lié à l’identité numérique : il s’agit de développer à court terme des projets pilotes dans le cadre des portefeuilles (ou “wallets”) européens d’identités numériques. Derrière les différents appels d’offres ouverts sur ce sujet, l’un des objectifs de la Commission est de commencer à explorer les cas d’usages de cette nouvelle identité numérique, tout en créant une architecture technologique ouverte, pour faire en sorte que les différents portefeuilles soient interopérables et utilisables dans tous les pays de l’Union Européenne.
L’enjeu est de taille et il se fait de plus en plus urgent, car les grands acteurs technologiques mondiaux sont déjà bien avancés sur le sujet. Par exemple, dans certains états américains, les citoyens peuvent ajouter leurs permis de conduire et cartes d’identité à leur Apple Wallet, sur leurs iPhones et Apple Watch. Dans plusieurs aéroports américains, ces utilisateurs bénéficient d’ores et déjà de files dédiées qui leur permettent de passer les contrôles de sécurité sans contact, grâce à leur carte d'identité numérisée…
Plus récemment, c’est le coréen Samsung qui a lancé son propre portefeuille, intégré à ses smartphones. Ce Samsung Wallet permet à ses utilisateurs de stocker leurs mots de passe, moyens de paiement, cartes de fidélité, cartes d’embarquement… et bientôt d’autres documents, tels que les permis de conduire.
Qu’on le veuille ou non, le développement de l’identité numérique est donc bel et bien enclenché. Très vite, tout citoyen pourra, à partir d’un portefeuille hébergé sur son smartphone, prouver son identité, ses revenus ou son âge, en quelques secondes…
Mais qui gagnera cette bataille du wallet ? Les grands acteurs technologiques ? Des acteurs publics ? Les Etats ? Et avec quelles technologies et quels principes sous-jacents ? Les choix que nous allons faire aujourd’hui auront des implications fortes pour l’avenir. Une certitude : pour que les portefeuilles d’identité numérique soient adoptés largement, la sécurité, la protection des données et la préservation de la vie privée des utilisateurs devront être au cœur des futurs dispositifs.
La blockchain - grâce à ses protocoles décentralisés et open-source - semble aujourd’hui être la technologie la mieux à même de répondre à ces enjeux, d’autant plus si elle est portée par des acteurs publics. Néanmoins, les acteurs publics ne pourront pas s’imposer dans les usages sans l’apport des acteurs privés, qui disposent à la fois des moyens de recherche et développement, des capacités de déploiement, d’expertises éprouvées en matière d’expérience utilisateur et de cas d’usages variés.
La Commission Européenne a pour ambition de proposer en pilote les premiers portefeuilles à l’échelle européenne en 2023, en commençant par plusieurs cas d’usages prioritaires : la numérisation du permis de conduire, l’ouverture d’un compte en banque, l’achat d’une carte SIM, la location d’un véhicule, etc. Autant de situations dans lesquelles les entreprises vont pouvoir bénéficier des apports de l’identité numérique pour simplifier leurs processus d’onboarding, accélérer les KYC, améliorer l’expérience utilisateur ou réduire les fraudes.
Banques, assureurs, loueurs de véhicules, opérateurs de paris en ligne, e-commerçants, acteurs du paiement seront les premiers à tirer parti du développement des portefeuilles d’identité numérique. Mais ils seront loin d’être les seuls ! Très vite, l’intégration des services en ligne avec les portefeuilles d’identité numérique qui vont se lancer sur le marché européen représentera un avantage concurrentiel et sera un outil de fidélisation pour les clients.
Que ce soit en BtoC ou en BtoB, les cas d’usages de l’identité numérique vont se multiplier, et les acteurs qui auront mené des expérimentations en amont - c’est-à-dire dès aujourd’hui - auront un coup d’avance sur leurs concurrents. Les enjeux en matière de souveraineté numérique et de protection des données sont également très forts. Le succès à long terme des solutions de confiance, portées par des acteurs européens, dépendra de la bonne coopération entre acteurs publics et privés. Une coopération qui est sur de bons rails mais qu’il est indispensable de renforcer afin de démontrer la viabilité de cette alliance