Alors que la Présidentielle 2017 arrive à grand pas, le gouvernement commençait à se complaire de voir des chiffres du chômage « baisser »… bien que ce n’était déjà pas vrai : notre article sur les chiffres du chômage de novembre 2016 l’avait montré. Décembre 2016 signe un frein à cette tendance avec une nouvelle hausse du chômage de catégorie A de 0,8 % sur un an. Une mauvaise nouvelle publiée le 24 janvier 2017 et que le gouvernement tente de minimiser : en un an la baisse du nombre de chômeurs en catégorie A a été de 3 %. Sauf que la réalité est bien moins jolie…
Le nombre d’inscrits à Pôle Emploi ne cesse d’augmenter
Pourquoi les Français s’inscrivent-ils à Pôle Emploi ? Si l’on peut éliminer quelques fétichistes de l’administration qui adorent faire des dossiers administratifs et prendre des rendez-vous, en général on s’inscrit à Pôle Emploi quand on a un problème d’emploi.
Si la situation de la France était rose, donc, les inscrits à Pôle Emploi devraient baisser. Ce n’est malheureusement pas le cas.
Entre novembre et décembre 2016, soit sur un mois, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi toutes catégories confondues a augmenté de 1 300 personnes. Une augmentation somme toute raisonnable. Sauf que sur un an la hausse a été bien plus élevée : 64 400 personnes. On comptait, en effet, 6,1753 millions d’inscrits en décembre 2015 et ils étaient 6,2397 en décembre 2016. On peut même pousser le vice à regarder le nombre d’inscrits en décembre 2014 : 5,879 millions d’inscrits soit, en deux ans, une hausse de 360 700 personnes. À peu près la population de la ville de Nice.
Pôle Emploi, dans ses inscrits, a également une catégorie un peu floue, la catégorie E, qui est celle des personnes ayant un emploi et n’étant pas tenue de chercher un emploi. La somme totale des inscrits n’est donc pas la meilleure donnée. Allons voir le détail des chiffres.
Les inscrits dans les catégories A, B et C n’évoluent pas
Si la catégorie A, celle des demandeurs d’emplois n’ayant aucun emploi, est celle mise en avant par le gouvernement, ce sont en réalité les catégories A, B et C qui sont les catégories importantes. Elles recoupent les personnes n’ayant pas d’emploi et celles ayant un emploi qui n’est pas un temps plein (Intérim, mi-temps…) Pour sortir de la catégorie A et passer en catégorie B, par exemple, il suffit d’avoir travaillé 1 heure dans le mois. Difficile de dire, dans ces conditions, que la personne « a un emploi » alors qu’elle a gagné, si elle est payée plus que le SMIC, une dizaine d’euros.
Le nombre de personnes inscrites dans les catégories A,B et C n’évolue pas sur un mois ni sur un an. Elle reste stable à 5,4757 millions de personnes. Certes, les effectifs de la catégorie A seule ont augmenté de 0,8 %, soit 26 100 personnes mais ils ont baissé sur un an de 117 500 personnes. On ne peut nier le succès. Sauf que si sur un an la catégorie A baisse et que les catégories A, B et C ne baissent pas, c’est que les deux se compensent : on peut donc dire que les chômeurs des catégories B et C ont augmenté de 117 500 personnes en un an et que la baisse n’est, en réalité, qu’un transfert.
Mais où sont donc passés les chômeurs en plus ?
Reprenons : le nombre de chômeurs dans les catégories A, B et C ne bouge pas sur un an ni sur un mois et pourtant le nombre total de chômeurs augmente sur un mois et sur un an. Mais où sont-ils ?
Réponse : dans les catégories D et E, soit dans la catégorie des chômeurs ayant un emploi et n’étant pas tenus de chercher du travail (la catégorie E) et celle des chômeurs sans emploi et n’étant pas tenus de chercher un travail (la catégorie D) car ils sont, par exemple, en formation.
Cette dernière, la catégorie D, voit ses effectifs exploser. Entre novembre 2016 et décembre 2016 le nombre d’inscrits dans cette catégorie a augmenté de 1 %, soit 3 300 personnes pour attendre 341 600 inscrits. Sur un an, la hausse est même bien plus élevée : le nombre d’inscrits de la catégorie D entre décembre 2015 et décembre 2016 est de 24,6 %, soit 67 400 personnes.
Un peu plus que l’augmentation totale du nombre d’inscrits à Pôle Emploi mais c’est normal : la catégorie E voit ses effectifs baisser sur un mois et sur un an en décembre 2016.
La catégorie D, l’arbre qui cache la forêt
Le gouvernement a multiplié les actions pour les chômeurs et, notamment, les formations. Un plan gigantesque de 500 000 formations a été lancé et on ne peut guère critiquer la chose : formés, les chômeurs ont plus de chances de retrouver un travail.
Sauf que ce plan de formation maquille la réalité : il transfère les chômeurs de la catégorie A à la D et ça se remarque en comparant les évolutions annuelles du chômage entre 2016, 2015 et 2014.
En 2014 et 2015 le chômage a augmenté et les hausses se concentraient sur les trois catégories principales, A, B et C. Les chiffres de décembre 2014, par exemple, montrent une variation annuelle du nombre de chômeurs en catégorie A de 5,7 %, 4,2 % pour la catégorie B et même 10,1 % pour la C. La variation annuelle des catégories A, B et C était alors de +6,4 %.
Il en est de même en décembre 2015 : une variation annuelle de +5 % des catégories A, B et C marquée par +2,6 % en un an pour la catégorie A, +5,2 % pour la B et +13 % pour la C.
Les chiffres de décembre 2016 sont complètement différents : le gouvernement peut mettre en avant une baisse du nombre d’inscrits en catégorie A de 3 % et une stabilisation du nombre d’inscrits dans les catégories A, B et C (+0,0 %) sur un an.
Sauf que, comme on l’a dit, il y a tout de même 64 400 chômeurs inscrits à Pôle Emploi de plus sur la même période.