Violences sexuelles : 8 fois sur 10, l’agresseur est le patron, un collègue, un proche

Photo Jean Baptiste Giraud
Par Jean-Baptiste Giraud Modifié le 21 janvier 2015 à 21h50

C'est un drame absolu qui frappe tous les jours 750 femmes, en France. Hier, 750. Aujourd'hui, 750 de plus. Demain, encore 750. En tout, on estime à 240 000 le nombre de viols ou tentatives de viol perpétrés sur des femmes dans l'Hexagone, tous les ans.

Estime, car la règle, en cas de viol, c'est le silence, assourdissant. La victime ne peut en effet pas révèler ce qu'elle a subit à son entourage, tout d'abord parce qu'elle a été souillée, elle a honte, et veut à tout prix oublier le plus vite possible. Mais surtout parce que dans 86 % des cas, son agresseur est un proche. Et l'entourage n'accepte pas qu'un proche puisse avoir trahi la confiance d'autant de monde à la fois. Il est alors beaucoup plus simple de penser que la femme victime de l'agression sexuelle était consentante, qu'elle a "allumé l'homme" avec des attitudes ou des vêtements provocants, ou encore qu'elle a commis un écart, obéissant à une "pulsion". La chair est faible... Et quand l'agresseur a tous les attributs de la respectabilité (le fameux "bon père de famille"), il devient très difficile de le confondre. La victime devenant alors aux yeux des autres... Le harceleur !

Le mythe du "bon père de famille", qui ne peut pas être un pervers sexuel

Si l'agresseur est son patron ou encore un collègue de travail, le viol ou les attouchements relèvent du harcélement sexuel. Mais dénoncer avoir été agressé sexuellement par son employeur ou un collègue (masculin, dans 97 % des cas, faut-il le préciser ?), c'est la certitude de perdre son emploi. Si la victime aime son travail, ou encore, est dépendante financièrement, elle préférera se taire, ou se convaincre qu'elle était consentante, occultant le harrassement dont elle a été l'objet pendant des semaines, parfois, pendant des mois.

Quand la victime est en couple, si l'agresseur est un proche, un membre de la famille ou un ami, la douleur d'avoir été "trompé" empêche également le plus souvent le mari ou le concubin offensé de prendre du recul, et de détecter les incohérences dans l'histoire qu'il découvre. Un couple sur deux se sépare après l'annonce d'un adultère, même si celui-ci est en fait un viol ou une agression sexuelle. Là encore, plutôt que d'essayer d'expliquer l'inexplicable, la victime prèfère occulter le viol ou l'agression, oublier le harcélement dont elle a fait l'objet, et tourner la page.

La victime, c'est la femme harcelée sexuellement, pas son agresseur qu'elle aurait "allumé"

C'est contre cette situation abominable qui assure une quasi impunité aux pervers sexuels et autres manipulateurs, qui s'attaquent le plus souvent à des femmes fragilisées ou isolées, que l'association CFCV (collectif féministe contre le viol) lance une nouvelle campagne de communication télévisée. Gilles Lazimi, de l'association CFCV, rappelle que "les proches sont parfois dans la minimisation ou dans un discours du type "elle exagère". C’est difficile pour une victime d’en parler. A qui en parler ? Qui va la croire ?". Or, "quand cela surgit dans le cercle des proches, cela remet en question toutes les autres relations, certains voient cette personne comme un copain et non pas comme un violeur". "Une victime se sent coupable, elle se dit qu’elle n’aurait pas dû s’habiller comme ça, aller chez cet homme, le laisser faire… Mais la coupable ce n’est pas la victime !", se révolte Gilles Lazimi.

Un numéro vert est à la disposition des femmes victimes d'agresssions sexuelles ou de viol : 0800 05 95 95, accessible du lundi au vendredi de 10h à 19h. Il apporte écoute, conseil et assistance aux victimes.

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Photo Jean Baptiste Giraud

Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).

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