Les grands groupes de distribution, comme Casino ou Auchan, amorcent aujourd’hui un surprenant “retour aux racines”. En effet, qui aurait pensé qu’à l’heure de la mondialisation et de l’urbanisation à marche forcée les enseignes de distribution retourneraient s’implanter en centres villes. Récit et analyse de ce nouveau phénomène économique.
Le groupe Casino, précurseur de tendance :
On peut dire que Jean-Charles Naouri a senti le vent venir. Le PDG du groupe Casino (incluant Monoprix spécialiste de ce segment mais aussi Franprix et Leader price) a effectivement été le premier à lancer la grande mode du retour à l’hyper-centre dans son secteur. Les “grandes épiceries” reviennent en fait là où tout a commencé pour elles, dans les centres villes. C’est ainsi qu’en 1949, Edouard Leclerc ouvre à Landernau son premier magasin à prix “discount”, avec le succès que l’on connaît aujourd’hui.
Mais alors pourquoi cette envie soudaine de réinvestir les centres villes ? Comment expliquer les prévisions donnant le réseau de proximité générateur de 9 % de part de marché dans l'alimentaire en 2016 ? Cette nouvelle tendance répond en fait aux grands mouvements socio-démographiques de notre époque et plus particulièrement des aires urbaines. Le vieillissement relatif de la population a d’abord porté un coup à l’hyper-mobilité des citadins. Mais l’explication n’est pas seulement à chercher du côté des retraités. Les classes actives ne sont également plus enclines à utiliser leur voiture pour se déplacer dans les temples de la consommation péri urbains et cherchent ainsi à passer le moins de temps possible à faire leurs courses hebdomadaires. Ces derniers sont aussi à la recherche de point de vente rapide pour acheter leur déjeuner de travail.
Quel avenir pour la grande distribution “de proximité” ?
Cette grande distribution “de proximité” profitent également de la vacance de plus en plus importante des locaux de commerce en centres villes. L’institut Procos établit ainsi que la proportion de locaux vides augmente de façon importante en centre-ville : 8,5 % en 2014 contre 7,2 en 2012. Une chance de plus pour acquérir un capital immobilier à bas prix pour les grands groupes français.
Malgré cet alignement de planète favorable à l’implantation des chaînes de distribution au coeur des villes, ces dernières doivent aborder ce virage stratégique avec méfiance. Effectivement, plusieurs dangers guettent les géants tels que Casino, le principal acteur, mais aussi Auchan ou Système U …
Les grandes chaînes devront d’abord trouver un biais stratégique propre aux villes de moyennes et petites tailles. Ces dernières ne répondent en aucun cas aux caractéristiques des métropoles françaises (vieillissement encore plus important de la population, concurrence plus accrus des commerces authentiques et de proximité …).
Enfin, le digital a aujourd’hui presque pour seul et unique but de faciliter la livraison de produits en centre ville par ses mêmes enseignes. Les grands groupes doivent investir plus massivement dans les technologiques numériques afin d’anticiper et intégrer les révolutions de demain.
Ce retour à la source pour la grande distribution peut donc être salvateur pour des groupes français disposant d’un réel savoir-faire. Mais au delà d’un choix “cosmétique”, cette stratégie ne sera payante que si une véritable démarche d’accompagnement du consommateur est mise en place (web to store, promotion des productions locales …).