Revers pour le Premier ministre François Bayrou : plus de 160 sénateurs dénoncent l’un de ses grands projets, qu’ils jugent insuffisant et dépourvu de vision d’ensemble.
Politique énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?

Ces sénateurs, issus de la droite et du centre, ont adressé une lettre ouverte à François Bayrou, mardi 11 mars 2025, dans laquelle ils exhortent le Premier ministre à revoir entièrement son projet de loi de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), censée définir la politique énergétique de la France pour la période 2025-2035.
Les sénateurs jugent la PPE de Bayrou « bancale » et « précipitée »
Une stratégie floue, bâclée... Les 160 sénateurs signataires de la lettre ouverte adressée à François Bayrou ne ménagent pas leurs critiques à l'égard du projet de loi de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE 3) du Premier ministre. Selon eux, cette feuille de route, censée fixer la politique énergétique de la France pour la période 2025-2035, n'est ni claire ni cohérente dans ses objectifs. Ces derniers ne manquent d'ailleurs pas de pointer du doigt la décision de l'exécutif d'écarter les propositions du Sénat sur la PPE, ainsi que celles de la commission d'enquête sur le prix de l'électricité, pourtant votée lors d'un vote à l’automne 2024.
Les élus de la Chambre haute s'inquiètent par ailleurs de la précipitation du gouvernement, la PPE étant prévue pour être adoptée par décret au mois d'avril 2025, c’est-à-dire sans passage devant le Parlement. « Sur un sujet aussi majeur pour l’avenir de notre pays, il nous semblerait totalement inconcevable que la représentation nationale soit ignorée », déplorent en effet Vincent Delahaye (centriste) et Stéphane Piednoir (Les Républicains).
Des objectifs énergétiques irréalistes
Que prévoit la trajectoire fixée par François Bayrou pour la PPE ? Premièrement : faire passer la part des énergies fossiles dans la consommation énergétique finale en France de 58 % en 2023 à 42 % en 2030, puis 30 % en 2035, d'augmenter celle de l’électricité qiu était de 27 % en 2023 à 34 % en 2030, puis 39 % en 2035, ains que celle des énergies renouvelables hors électricité (géothermie, biomasse...) : 15 % en 2023, 23 % en 2030 et 30 % en 2035.
Ces ambitions sont tout simplement jugées irréalistes par les 160 sénateurs. Ces derniers n'hésitent pas à tacler le Premier ministre, arguant que sa feuille de route ne donne aucune précision quant aux moyens par lesquels François Bayrou compte atteindre cesdits objectifs. Pis, les parlementaires s'inquiètent que ceux-ci se traduisent par une explosion des coûts énergétiques pour les ménages et les entreprises. « Je ne comprends pas que l’on puisse faire des propositions sans réelle étude d’impact », fustige Vincent Delahaye, qui dénonce l'absence de chiffrage détaillé sur les éventuelles conséquences financières de la PPE 3.
Le nucléaire (encore) mis de côté
Le projet de PPE 3 prévoit par ailleurs de renforcer le développement de l’énergie solaire, ce qui ne manque pas d'alerter les sénateurs qui s'inquiètent que celui-ci – le solaire, comme son nom l'indique, étant dépendant des aléas météorologiques – se fasse au détriment de sources de production d'énergie décarbonée, jugées plus fiables : le nucléaire.
Les sénateurs ne sont pas les seuls à tirer la sonnette d'alarme. Le Haut Conseil pour le Climat et le Haut Commissariat à l’énergie atomique avaient en effet tous émis des réserves sur le projet de loi de programmation pluriannuelle énergétique de François Bayrou. Le Premier ministre fera-t-il marche arrière ?