Dans la nuit du 29 au 30 octobre 2024, des pluies diluviennes ont frappé le sud-est de l’Espagne, dévastant des régions agricoles clés comme Valence, Tarragone et Castellón. Les inondations qui en ont résulté ont fait plusieurs centaines de victimes, des centaines de disparus, détruit maisons et infrastructures mais aussi détruit de nombreuses exploitations agricoles.
Inondations en Espagne : vers une pénurie de fruits et légumes ?
Les conséquences de cette catastrophe climatique s’étendent désormais bien au-delà des frontières espagnoles, menaçant désormais l’approvisionnement en fruits et légumes de la France. Les premières difficultés d’approvisionnement sont même déjà d’actualité.
Des pluies historiques dans le sud-est de l’Espagne : une catastrophe pour l’agriculture
Les pluies torrentielles qui ont balayé les provinces espagnoles de Valence, Tarragone et Castellón ont atteint des niveaux sans précédent, transformant des terres fertiles en champs inondés et des routes en rivières de boue.
Les inondations ont directement affecté la récolte et le transport de fruits et légumes essentiels, notamment dans la communauté de Valence, connue pour sa production d’agrumes, un secteur majeur pour l’économie locale et pour l’approvisionnement européen. Des producteurs d'oranges et de clémentines rapportent que la situation est catastrophique : « Les fruits sont gorgés d'eau et risquent de pourrir », indique un responsable d’entreprise agricole dans la région de Valence interrogé par France Bleu. « Pour l'instant, certains producteurs sont très difficiles à joindre, mais on sait qu'ils ne peuvent absolument pas aller dans leurs champs et qu'à cause des inondations, les réseaux électriques sont totalement à refaire. Ça va prendre du temps ! »
Région touchée | Type d’inondation | Impact sur les cultures |
---|---|---|
Valence | Inondations massives | Destruction des récoltes d’agrumes |
Tarragone | Routes inondées | Difficulté de transport des produits |
Castellón | Glissements de terrain | Blocage de l’autoroute A-27 |
Ces conditions météorologiques extrêmes ont notamment compromis la saison des récoltes à venir. Pour les agriculteurs locaux, les pertes s’annoncent colossales. Thierry Desouches, porte-parole du groupe Coopérative U interrogé par Le Figaro, explique que les promotions prévues sur les clémentines devront être revues à cause de la priorité accordée aux opérations de secours et à la gestion des conséquences humaines. Carrefour et E.Leclerc ont, de leur côté, émis des alertes à l’attention de leur clientèle.
La dépendance de la France aux fruits et légumes espagnols : un enjeu de sécurité alimentaire
La France est le principal importateur de produits agricoles espagnols, avec une dépendance particulièrement marquée sur certains fruits et légumes. En 2021, la France a importé pour 9,1 milliards d’euros de produits agricoles et agroalimentaires espagnols.
Les chiffres de France AgriMer révèlent l’importance de cette relation commerciale :
Produit | Pourcentage importé depuis l’Espagne |
---|---|
Courgettes | 77 % |
Concombres | 84 % |
Artichauts | 79 % |
Salades | 76 % |
Fraises | 61 % |
Abricots | 85 % |
Pêches-Nectarines | 94 % |
Les agriculteurs français produisent désormais moins de 50 % des fruits et légumes consommés sur le territoire national, un chiffre en nette baisse depuis les années 2000. Cette situation s’explique par une concurrence accrue des pays méditerranéens, notamment l’Espagne, qui bénéficie d’un climat plus favorable et de techniques de culture sous serre très développées. Avec les récentes inondations, cette dépendance devient un véritable risque pour l’approvisionnement en produits alimentaires.
Les répercussions dans les rayons français : des ruptures de stock et des hausses de prix à prévoir
Les effets de ces inondations se font déjà sentir en France. Le marché de Saint-Charles à Perpignan, l’un des principaux centres de distribution des fruits et légumes espagnols en France, connaît des perturbations importantes. Les transporteurs espagnols ont de grandes difficultés à acheminer leurs produits en raison des routes bloquées et des voies alternatives limitées. Selon un exploitant de transport de Saint-Charles, « les transporteurs espagnols ne peuvent pas prendre l’autoroute directe pour remonter vers Barcelone et livrer en France », aggravant les délais et limitant l’offre en produits frais.
Certaines grandes enseignes françaises comme Carrefour et E.Leclerc ont averti leurs clients que les ruptures de stock en fruits et légumes pourraient se multiplier dans les semaines à venir. L’application mobile de Carrefour a prévenu ses utilisateurs que « certains fruits et légumes peuvent momentanément manquer en rayon », et des pénuries de clémentines, de citrons, et de « légumes pour ratatouille » (courgettes, tomates, poivrons, aubergines) sont d’ores et déjà signalées.
Enseigne | Produits affectés | Mesures prises |
---|---|---|
Carrefour | Fruits et légumes variés | Avertissement via application mobile |
E.Leclerc | Fruits et légumes frais | Signalement de ruptures de stock |
Super U | Clémentines, citrons | Retard de promotions prévues |
Les prix des produits concernés pourraient également augmenter, sous l’effet de la rareté et des coûts additionnels liés aux transports et à l’approvisionnement.
Enjeux pour la souveraineté alimentaire française : le plan de souveraineté
Face à cette dépendance accrue aux importations et aux risques climatiques, le ministère de l'Agriculture français a annoncé en mars 2023 un plan de souveraineté pour la filière fruits et légumes. L'objectif de ce plan est d’augmenter la production nationale de fruits et légumes pour atteindre 55 % de la consommation d'ici 2030.
Cependant, ce plan ne produira des effets tangibles qu’à moyen terme, laissant entrevoir une période difficile pour l’hiver 2024-2025. En attendant, les Français devront probablement faire face à des hausses de prix et à une offre restreinte pour certains fruits et légumes frais. La situation actuelle pourrait aussi inciter les consommateurs à se tourner vers des produits locaux et de saison, renforçant ainsi indirectement la souveraineté alimentaire.