L’importance des questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) s’accroît dans tous les secteurs industriels, et celui de la grande distribution ne fait pas exception à la règle. D’après une récente étude menée par PwC, les consommateurs français sont prêts à payer en moyenne 9.7 % de plus pour des biens dits “ durables ”.
Les réglementations ESG, à l’aube d’une nouvelle ère pour l’industrie du retail ?
De ce fait, les entreprises de la grande distribution se trouvent à un tournant majeur à l’échelle européenne. Dans le cadre du Pacte Vert pour l’Europe, voté en 2020, et de l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, une série de réglementations se sont développées pour se donner les moyens d’atteindre ces objectifs. Alors que la grande distribution a dû faire face à la crise énergétique et à l’inflation, l’ESG est probablement le principal moteur de transformation du secteur, dans la mesure où les acteurs qui ne respecteront pas les obligations des nouvelles directives pourraient être confrontés à de graves conséquences.
Les réglementations ESG redessinent les priorités de la grande distribution
Année après année, les scandales ayant éclaté dans l’industrie textile comme celui du Rana Plaza, ou encore récemment dans l’agro-alimentaire avec l’affaire du Bisphénol A, ont soulevé des failles majeures du secteur du retail. Dans un monde où l'engagement en faveur du développement durable et de la transparence est devenu un impératif législatif, l’industrie du retail doit accélérer sa transformation afin de garantir la durabilité de ses activités. Le secteur de la grande distribution fait partie des secteurs d’activité les plus impactés par l’ensemble du corpus législatif ESG, depuis le reporting extra-financier, au devoir de vigilance, à une traçabilité et une transparence complète au niveau de la chaîne d'approvisionnement.
Parmi les directives européennes qui vont radicalement transformer la grande distribution, il y a la CSRD, aussi connue sous le nom de reporting de durabilité, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Celle-ci va contraindre les organisations à établir un reporting extra-financier qui tient compte des critères de durabilité, et veille aussi à améliorer la disponibilité et la qualité des données publiées par les entreprises. Parmi les autres réglementations phares, le règlement européen contre la déforestation (EUDR), qui vise à interdire la mise sur le marché ou l’exportation depuis le marché européen de produits ayant contribué à la déforestation ou à la dégradation des forêts, entrera en vigueur d’ici la fin de l’année 2024. Cette directive va contraindre les entreprises à repenser leur chaîne d’approvisionnement pour se concentrer sur la transparence, la traçabilité et la qualité. Dans ce contexte, la gestion efficace des données est donc une question essentielle.
Enfin, parmi les réglementations marquantes de l’année 2024 on retrouve la CSDDD - devoir de vigilance - adoptée fin avril 2024 par le parlement européen. Les entreprises concernées par cette réglementation doivent prévoir des mesures de prévention des risques d’atteintes aux droits humains, à la santé et à la sécurité, et à l’environnement. Par ailleurs, ces organisations pourront être reconnues comme responsables d’incidences négatives découlant de leurs activités ou de celles de leurs filiales et, lorsqu’elles sont liées à leurs chaînes d’activités ou à celles de leurs partenaires commerciaux.
Ce nouveau cadre réglementaire peut-il devenir un avantage concurrentiel pour les entreprises ?
Les nouvelles réglementations ESG offrent aux acteurs du retail l'occasion non seulement de reconsidérer la gestion des risques, mais aussi de faire évoluer leurs stratégies de développement. Les entreprises qui vont adapter une politique de développement durable et en conformité avec les directives ESG pourront bénéficier d’une image de marque éco-responsable auprès des consommateurs et avant tout, elles limiteront les risques liés à la non-conformité aux directives européennes. Au-delà du cadre réglementaire imposé par l'Union européenne, l’adoption de nouveaux processus pourraient permettre aux entreprises d’avoir une meilleure visibilité sur les actions et les interlocuteurs qui interviennent à toutes les étapes de leur activité et ainsi réaliser des choix plus stratégiques pour limiter les risques et les coûts.
L’année 2024 est un tournant majeur pour le secteur du retail en termes de conformité avec l’entrée en vigueur de ces directives européennes. La grande distribution, qui est l’un des fleurons de l’économie française, doit impérativement mesurer l’importance de ces changements et intégrer dès maintenant des solutions permettant de s’adapter à toutes ces nouvelles réglementations. Les distributeurs qui considèrent l'ESG comme une opportunité de faire évoluer leurs activités pour qu'elles aient un impact plus positif, et en même temps moins néfaste pour l'environnement, pourront en tirer des bénéfices en termes de revenus, d'attraction d’investissements et d'image de marque.